Mémoire de la ligne

La ligne Port-Marly—Marly-le-Roi (ligne 59)
1,935 Km.

Marc André Dubout

La ligne 59 au gré des archives et au fil des cartes postales

La Génèse

L'histoire de cette courte ligne remonte à 1878 mais les projets de construction sont antérieurs et liés au "Chemin de fer Américain" de Rueil-Gare à Port-Marly concédé au Vicomte de Mazenod. 
Sans revenir sur le détail de l'histoire du "Chemin de fer Américain" système Loubat, le Sieur Proust se substitue au Vicomte de Mazenod le 1er février 1860. En effet fortement déficitaire le tramway de Rueil à Port-Marly n'était plus exploitable. Ce changement entraîna immédiatement une augmentation des tarifs, condition indispensable pour sa survie. M. Proust prévoyait également une extension de la ligne de Port-Marly à Marly-le-Roi en prolongeant la voie de 1,9 Km en accotement de la route de St Germain à Versailles. À cela s'ajoutait un projet de règlement (mars 1867) et une amélioration concernant le matériel roulant avec des voitures d'au moins 50 places dont 6 de coupé, 24 d'intérieur, 20 d'impériale. Il s'engageait aussi à favoriser la commune de Rueil en mettant à sa disposition une voiture supplémentaire de 25 places entre Rueil-Gare et Rueil-Ville sans compter l'augmentation de capacité les dimanches et jours de fêtes à la faveur desquels les parisiens découvraient, avec le chemin de fer et maintenant le jeune tramway, les plaisirs de la campagne. M. Proust s'entoure de M. Francq1 comme directeur technique de la compagnie. Léon Francq est Ingénieur chez Cail grand constructeur de locomotives. C'est lui qui introduisit en France, en la perfectionnant notablement, la machine sans foyer mise en service par le docteur Émile Lamm1 sur les tramways de la Nouvelle-Orléans à Carrolton.
M. Francq est l'inventeur d'un procédé de moteur à vapeur pour locomotive fonctionnant à la vapeur comprimée. Il était par ailleurs concessionnaire des tramways de Versailles.
Il participa aussi aux études du métropolitain de Paris.
Mais le tramway malgré ces améliorations ne donnait pas satisfaction aux populations des communes traversées par la ligne et qui se plaignaient auprès de leur maire respectif.



Le Conseil municipal de Marly-le-Roi après lecture du rapport du maire de Marly-le-Roi prie M. le Préfet de prendre en considération les difficultés de communication du chemin de fer américain entre Marly-le-Roi et Rueil en correspondance avec la Compagnie de l'Ouest.
"Considérant le mauvais état de la voie ferrée du chemin dit Américain, le délabrement des voitures pour transporter les voyageurs, l'insuffisance de la cavalerie, enfin l'exploitation défectueuse, dangereuse, compromettant la sécurité publique de ce chemin américain". Voilà pour le chemin de fer du Vicomte de Mazenod exploité par M. Proust, mais la suite n'est pas plus tendre pour la construction du nouveau tramway à vapeur de M. Eugène Tarbé des Sablons.
"Considérant d'autre part les lenteurs apportées dans l'exécution de la nouvelle ligne à traction de locomotive, émet le vœu qu'il plaise à M. le Préfet, dans l'intérêt général et particulièrement dans l'intérêt des habitants de Marly-le-Roi, de mettre en demeure le concessionnaire dudit chemin de fer d'avoir à remplir sans délai les obligations qui lui sont imposées par décret du 15 juillet 1874 et février 1864 sous peine de voir prononcer contre eux (Tarbé des Sablons & Cie Générale de Tramway à vapeur) déchéance.
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C'est ce qui nous vaut ce brouillon de lettre du 26 mars 1869 écrit par le maire de Marly-le-Roi, certifiant que les trains complémentaires du tramway à vapeur de Rueil à Marly n'étant pas arrivés en gare de Marly à 6h15 et à 8 heures, il a prévenu le Préfet et la brigade de gendarmerie qui s'est rendue à Port-Marly. Le service, à la lecture difficile de ce brouillon, semble défectueux et on apprend même que M. Francq ne paient pas toujours les employés qui ont renoncé à prendre leur service. Le maire détaille les dus de la Compagnie à ses employés.
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Le 6 mai 1872, la préfecture de Seine & Oise donne à afficher l'enquête d'utilité publique pour l'établissement d'un chemin der fer à traction de locomotives entre les stations de Rueil et de Marly-le-Roi. Les pièces seront déposées pendant vingt jours à la Préfecture de Versailles où des registres d'enquête seront ouverts pour recevoir les observations faites sur ledit projet.
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Le 8 mai 1872, le préfet adresse au maire de Marly-le-Roi les pièces du projet  de M. Eugène Tarbé des Sablons propriétaire de la concession du chemin à traction de chevaux de Rueil à Port-Marly établi sur le chemin de Grande Communication 39 (avenue Albert 1er) à Rueil, Route nationale 13 (entre Rueil, Bougival, Louveciennes et Port-Marly) pour transformer ce chemin en chemin de fer à traction de locomotive établit sur les mêmes voies et qui s'étendrait le long de la Route nationale 184 de St Germain à Versailles jusqu'à l'Abreuvoir de Marly-le-Roi.  
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Le cahier des charges de 1874 stipule bien l'utilisation de rail sans saillie, c'est à dire "type Loubat".
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Le 29 octobre 1875, le maire de Maule (S & O) écrit à son collègue de Marly-le-Roi suite à la visite d'intéressés pour la construction d'un tramway d'Épône à Versailles qui ont évoqué le tramway de Rueil à Marly pour lui demander son avis sur ce sujet.
En réponse le maire de Marly-le-Roi précise qu'il ne connaît qu'un chemin de fer américain entre Rueil et Port-Marly et non Marly-le-Roi et que son fonctionnement est loin d'être satisfaisant.
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La France financière publie un article le 6 février 1876 au sujet du Tramway à vapeur de Rueil Marly-le-Roi.
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Le 1er mai 1876, M Eugène Tarbé des Sablons écrit au maire de Marly-le-Roi que par suite aux mesures prises par le conseil d'administration de la Compagnie Générale des Tramways à Vapeur, le tronçon de Port-Marly à Marly-le-Roi sera mis en pleine exploitation publique du 1er au 10 août. Il lui demande d'en informer le conseil municipal car il se peut qu'il ait à dénoncer des subventions pour le service des omnibus de St Germain. Il propos en outre de reculer la fête de Marly-le-Roi et de la donner plus brillement les dimanches 13 & 20 août et d'en faire une fête des Loges qui attirerait les populations de Versailles et de St Germain. 
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Le 22 mai 1876, le maire de Marly-le-Roi écrit à la Compagnie Générale des Tramways Vapeur pour lui préciser que l'autorisation pour l'établissement de la Gare sur le site de l'Abreuvoir doit faire l'objet d'une autorisation par le préfet, l'Administration foncière devant donner son avis sur toute occupation de terrain. Il en est de même pour la fête7 dans le parc, pour laquelle, il appartient au préfet de statuer
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Le 28 juin 1876, paraît cet article de "La France Financière" dans lequel est écrit que M. Tarbé des Sablons ne fait plus partie de la Compagnie Générale de Tramway à vapeur. La Compagnie formée en Société anonyme possède sa complète autonomie. La construction du chemin de fer se poursuit.
Le signataire en profite pour demander au maire de Marly-le-Roi le nombre d'obligations qu'il doit lui réserver.

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Le 30 octobre 1876, le maire de Rueil écrit à son collègue de Marly-le-Roi pour l'informer que de son côté il a rendu compte au préfet de l'état déplorable du chemin de fer américain et de la non exécution du tramway à vapeur. En conséquence, on statuait que M. Tarbé des Sablons fut mis en demeure de justifier des ressources nécessaires pour l'exécution et la mise en service du tramway. Sans satisfaire à ces conditions M. Tarbé serait déchu de sa concession. L'argent nécessaire aux expropriations est déposé chez M. Herbette, notaire et il est possible d'espérer que l'achèvement aura lieu le 17 juin 1877. Les travaux en cours sont surveillés par l'ingénieur des Ponts & Chaussées.
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Le 3 novembre 1976, le député de Seine & Oise (signature illisible) écrit au maire de Marly-le-Roi pour lui dire que le Préfet s'occupe de l'affaire du tramway ainsi que l'ingénieur des Ponts & Chaussées. M. Tarbé de Sablons est malade et a été mis en demeure 4 ou 5 fois par le Préfet. Pour Rueil, la voie a été réceptionnée le 23 juin. Les travaux se sont élevés à 80 000 Francs et il reste une indemnité à fixer pur la commune de Rueil. Il reste aussi à faire exécuter aux frais de M. Tarbé des Sablons les travaux restant et l'obliger à compléter son matériel roulant. 
Le député a parcouru toute la ligne à pied de Port-Marly à Marly-le-Roi mais les travaux ne sont pas aussi avancés qu'à Rueil8.

Archives de Marly-le-Roi

Le 7 novembre 1976, Le notaire M. Herbette écrit au Maire de Marly-le-Roi que les acquisitions de terrains ont été signées et qu'une une société s'est constituée pour se substituer à M. Eugène Tarbé mais que l'Administration supérieure n'aurait pas autorisé cette substitution. C'est à ce moment que le Conseil municipal de Rueil a pris une délibération dans le même sens que celui de Marly. Peu de jours après M. Herbette comprenait que M. Edmond Tarbé prenait en main la direction de l'entreprise et qu'il se procurait les capitaux nécessaires pour la mener à bonne fin, c'est à dire pour le printemps 1877.
Archives de Marly-le-Roi

Le 6 décembre 1876, le député de Seine & Oise écrit au maire de Marly-le-Roi lui disant qu'il est intervenu auprès du Procureur de la République et de la Préfecture pour la mise en état du matériel roulant et de la voie du chemin de fer américain.
Archives de Marly-le-Roi

En prolongeant la ligne, l'objectif était de mettre le chef lieu de canton Marly-le-Roi en correspondance avec le Chemin de fer de l'Ouest à la gare de Rueil, bien que Marly-le-Roi ait également une gare propre depuis 1884 (ligne St Lazare—St Nom-la- Bretèche). L'approbation du projet remonte au 20 novembre suivant et l'expropriation des terrains pour cause d'intérêt public a été prononcée le 18 mai 1876. Ce prolongement, par conséquent, ne connaîtra pas la traction hippomobile mais pendant cette période de reconstruction tout va mal pour l'exploitation du chemin de fer américain : mauvais état de la voie et du matériel roulant, insuffisance du nombre de chevaux, défaillance du service émeuvent le Conseil municipal enclin à suspendre le service dans sa séance du 12 novembre 1875 et M. Tarbé des Sablons déclaré déchu de la concession et tenu d'installer un service de remplacement par omnibus. 
Le 26 novembre 1876, le maire de Marly-le-Roi écrit au Procureur de la République retraçant l'historique et la situation financière de la Compagnie Générale des Tramways à Vapeur entre Rueil et Marly-le- Roi. Il reprend le contenu de la lettre que le maire de Rueil a transmis au Préfet selon lequel M. Tarbé des Sablons pourrait être déchu de sa concession en cas de manquement à l'exécution des travaux. Le détail du contenu de la lettre.
S'ensuit une correspondance entre le maire de Marly-le-Roi et le député de Seine & Oise sur les sommes versées ou à verser pour l'exécution des travaux.

  • année 1877
Au point où il en est "M. Tarbé des Sablons est bien incapable d'achever les travaux et de mettre son chemin de fer en service dans le délai d'une année qu'il lui a été donné à cet effet à partir de l'approbation de ses plans". 
Archives de Rueil-Malmaison

En effet semble-t-il M. Tarbé des Sablons a eu du mal à se faire livrer les terrains nécessaires à la construction du prolongement. De plus ce court tronçon n'apparaît pas d'une utilité évidente pour les deux localités qu'il dessert et d'aucune pour les autres.
Archives de Rueil-Malmaison

Le Conseil municipal de Rueil lui reproche par ailleurs de ne pas avoir commencé les travaux à partir de Rueil en direction de Marly et que le tronçon Port-Marly—Marly-le-Roi ne peut être comme un commencement suffisant d'exécution ni comme un gage sérieux pour l'avenir. 
Entre temps M. Eugène Tarbé des Sablons décède (le 20 novembre 1876) 
Archives de Rueil-Malmaison
Ce document d'un député de Seine & Oise du 9 janvier 1877 nous rappelle l'historique de l'établissement des voies ferrées desservies par chevaux et d'un service omnibus par la voie publique de Rueil à Port Marly (décret n°1883 du 15 juillet 1854). À ce décret est annexé le cahier des charges et l'article relatif à la prolongation de Port-Marly à Marly-le-Roi. Puis le décret n°3578 du 28 août 1874 relatif à l'utilité publique de l'établissement d'une voire ferrée à traction de locomotive de Rueil à Marly à Marly-le-Roi. Il contient la concession au profit de M. Eugène Tarbé des Sablons et l'annonce de M. Edmond Tarbé qu'il allait continuer les travaux suite au décès de son frère Eugène survenu le 20 novembre 1876 mais que la concession cesse avec la vie du concessionnaire, en conséquence de quoi soit l'État reprend la concession ou fasse adresser une nouvelle concession au profit d'un nouveau postulant.
Archives de Marly-le-Roi
Le 12 janvier 1877 le maire de Marly-le-Roi écrit à l'entreprise de travaux publics Gorraz & Dubois de bien vouloir enlever les matériaux sis entre St Fiacre et l'Abreuvoir qui gênent la circulation en appelant que : "Il est défendu d'embarrasser les rues, trottoirs et places publiques par des matériaux ou objet quelconque pouvant empêcher ou diminuer la liberté ou la sûreté directe du passage. En cas de nécessité, les objets doivent être éclairés pendant la nuit".
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Le 19 janvier 1877, M. Herbette, notaire informe le maire de Marly-le-Roi qu'une demande concession a été déposée en décembre 76 au Ministre des Travaux Publics qui l'a transmise à la Préfecture de Versailles. Par ailleurs les héritiers (M. Edmond Tarbé et Madame Tarbé) ont continué les acquisitions de terrains qu'ils seront obligés de prendre puisque les expropriations ont déjà été faites et sont nécessaires au tracé de la voie. Les acquisitions réalisées s'élèvent à 51 000 Francs payés. Il ne reste qu'à traiter qu'avec sept propriétaires. L'ingénieur en chef des tramways à vapeur a confirmé que les travaux allaient commencer très tôt, les rails seront livrés par un entrepreneur sérieux fin mars 77. Si le notaire termine sur une note de confiance, il ne faut pas pour autant relâcher la vigilance.
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Lettre du 13 mars 1877
Le 15 mars 1877, M. Proust administrateur des tramways à vapeur écrit au maire de Marly-le-Roi 
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Le 9 avril 1877, le maire de Versailles informe son collègue de Marly-le-Roi des sommes dépensées pour l'exécution des travaux (80 000 F.) et pour l'acquisition des terrains à la gare de Rueil (100 000 F.). Une somme de 200 000 F. est à la disposition du nouveau concessionnaire qui achèvera les travaux. Il conseille à son collègue d'aller au Ministère des Travaux Publics et faire en sorte que M. Proust ne vienne pas arrêter la marche de l'affaire par une opposition. 
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Cette lettre du 20 mai 1877 aborde l'évaluation des terrains cédés pour la construction du tramway, ici un alignement de 7,80 m. pour un propriétaire qui en demande l'évaluation financière.
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Le 29 juin 1877 M. Housay, agréé au Tribunal de Commerce de Versailles comme syndic de la faillite de M. Eugène Tarbé des Sablons, écrit que M. Edmond Tarbé a entretenu le Ministre des Travaux Publics quant aux négociations de pouvoir devenir concessionnaire. Une somme de 150 000 Francs a été déposée à la Caisse des Consignations. Bien que la situation soit présentement bloquée, le Ministre assure qu'il se montrerait favorable au projet.
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Le 1er juillet 1877, Le Ministre des Travaux publics écrit au maire l'informant qu'il prend en considération sa demande relative au retard dans les travaux du tramway et qu'il a déjà sollicité le syndic de la faillite de Feu M. Tarbé des Sablons.
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Le 2 juillet 1877, M. Herbette écrit au maire de Marly-le-Roi que le Ministre des Travaux Publics ne perd pas de vue les intérêts auxquels le tramway à vapeur doit donner satisfaction, son administration fait tout ce qu'elle peut pour hâter la solution de l'affaire. Le Ministre a déjà invité le syndic de la faillite Tarbé pour savoir s'il était en mesure de terminer les travaux d'établissement de la voie ferrée à bref délai.
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Le 5 juillet 1877, l'inspecteur des Travaux Publics informe le maire de Marly-le-Roi qu'il a adressé un rapport au préfet pour être transmis au Ministre des Travaux Publics et qu'il il y lieu de croire qu'une solution sera donnée à cette affaire.
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Le 21 juillet 1877, les travaux semblent arrêtés, des dépôts de pierre et de matériaux font l'objet d'une plainte d'une habitante de la rue de l'Abreuvoir auprès du maire qui constate les faits, assisté du garde champêtre. Ces dépôts de matériaux encombrent l'accès à la propriété de cette dame et contribuent à diminuer la sûreté de la voie publique depuis le décès d'Eugène Tarbé et la ligne n'est pas exploitée depuis la déchéance. Un procès verbal a été dressé le 22 août 1877.
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Le 13 août 1877, étape importante pour la suite du projet dans cette lettre du maire de Marly-le-Roi car le Tribunal Administratif de Versailles a statué sur la faillite de M. Eugène Tarbé des Sablons. La faillite est reportée.
Ses héritiers légitimes sont M. Edmond Tarbé des Sablons, son frère, et Madame Tarbé des Sablons, sa mère qui ont accepté la succession sans bénéficier d'inventaire. Le bénéfice d'inventaire fait que l'héritier n'est pas tenu au paiement de dettes de la succession jusqu'à la concurrence de la valeur des biens qu'il a (illisible). Il peut même de décharger du paiement des dettes en abandonnant tous les biens de la succession aux créanciers, ses biens personnels n'étant pas confondus avec ceux de la succession contre laquelle il a droit de réclamer le paiement de ses créances.
L'héritier bénéficiaire est chargé d'administrer les biens de la succession à la condition de rendre compte de son administration à ses créanciers sans être contraint sur ses biens personnels qu'après avoir été mis en demeure de présenter son compte et faute d'avoir satisfait à cette obligation. Après l'apurement des comptes, il ne peut être contraint sur ses biens personnels que jusqu'à concurrence des sommes dont il se trouve reliquataire.
Heureusement grâce à l'autorité, au pouvoir suprême du Ministre des Travaux Publics, il appartient à ce dernier soit par dissolution, soit par décret de transmettre, à tous compétiteurs digne de son choix, la concession Tarbé devenue caduque, à moins qu'il juge plus utile de prononcer la déchéance encourue et de poursuivre l'adjudication des travaux exécutés. Le Ministre des Travaux Publics a le droit incontestable de pourvoir à la vacance de la concession qui a cessé d'être avec la vie du concessionnaire décédé.
Le vœu du conseil municipal de Marly-le-Roi qui demandait la mise en activité immédiate de la section de la voie ferrée comprise entre l'Abreuvoir de Marly-le-Roi et Port-Marly n'est pas réalisable. Cette partie de la voie qui a été réalisée depuis si longtemps a été établie d'une manière défectueuse :
  • pose sur un sol n'est pas celui prévu par l'article 9 du cahier des charges
  • courbes reconnues dangereuses ou impraticables par des hommes compétents
  • poids des rails (20 Kg/m) insuffisant alors que le cahier des charges prévoyait dans son article 18 des rails de 35 Kg posés sur traverses ou 30 Kg posés sur longerines. Le poids des contre-rails seraient de 20 Kg/m.

Ces infractions sont graves et il importe de les signaler à l'administration.
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Le 17 août 1877 le maire de Marly-le-Roi envoie au préfet le compte-rendu de la précédente délibération en le suppliant de prendre en compte le vœu formulé à savoir le Ministre des Travaux Publics concède d'urgence à tous compétiteurs la ligne interrompue du tramway de Rueil à Marly-le-Roi. Il envoie copie du procès verbal de reconnaissance des travaux effectués que le conseil municipal juge défectueux et contraires aux règles de l'art. Cette section a été construite par l'entreprise Gorraz & Dubois et livrée en octobre 1876.
Il attire l'attention du préfet sur la rampe excessive qui demande des machines d'une grande puissance. 
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Monsieur Le Breton, huissier à Rueil, remet au maire de Marly-le-Roi le traité intervenu entre la compagnie de tramway à vapeur et les entrepreneurs qui s'offrent à donner satisfaction le plus tôt possible. Il prie le maire d'informer le plus rapidement possible le Ministre des Travaux Publics de la nécessité qu'il y a à ce que la concession soit à nouveau donnée et le tramway soit mis en service.
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Le 17 août 1877, M Herbette informe le maire de Marly-le-Roi qu'il vient de saisir le Ministre des Travaux publics, afin que celui-ci prenne les dispositions pour le prompt achèvement des travaux et la mise en exploitation du tramway.
Le 21 août 1877, le Ministre des Travaux Publics informe que par suite du jugement qui a relevé la succession de M. Tarbé (Eugène) de la faillite prononcée contre elle, il a demandé à son héritier M. Edmond Tarbé de prendre d'urgence les mesures nécessaires pour l'achèvement des travaux et espère un prompt résultat.
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La réponse du préfet du 30 août n'est pas en faveur de la requête du maire et l'informe qu'il n'y donnera pas suite, le procès verbal dressé ne relevant pas de l'autorité municipale. Par ailleurs il affirme s'occuper personnellement de cette affaire en vue de la faire aboutir au plus vite.
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Le texte de la lettre de M. Herbette, adressée au Ministre des Travaux Publics.
Avant le tramway à vapeur, l'omnibus à chevaux de Port-Marly à Marly-le-Roi avait été concédé à M Mazenod puis cédé à Tarbé des Sablons qui demande une substitution de tramway à vapeur par décret du 28 août 1874. Deux plus tard M. Tarbé des Sablons décède laissant son entreprise inachevée et à peine commencée, l'acquisition des terrains ayant été réalisée par ses héritiers (sa mère et son frère Edmond) qui n'ont accepté la succession qu'après inventaire et cette mesure de précaution s'est trouvée bientôt justifier par la mise en faillite d'Eugène Tarbé des Sablons. Les héritiers sont décidés, sur leurs fonds personnels, à continuer l'établissement de la voie ferrée pour leurs intérêts et celui du public. Or semble-t-il les P & C leur ont enlevé qualité pour continuer, ce qui produit une situation intolérable qui fait l'objet de cet exposé. Par ailleurs, le tramway à traction par chevaux de Rueil à Port-Marly est dans un tel état de délabrement (voie, matériel et cavalerie) que la municipalité de Rueil a demandé la cessation de l'exploitation et la déchéance de M. Tarbé des Sablons de sa concession. La situation du tramway à vapeur est guère plus reluisante, les travaux interromps présentent des dégradations des trottoirs de droite de la Route Nationale 13, rendue impraticable aux promeneurs et aux riverains par le stockage de rails, ainsi que des cloaques formés à cause du mauvais écoulement des eaux. De plus l'abattage d'arbres magnifiques, laissent les habitants de Bois Préau sans abri du soleil et de la poussière. Cette situation désastreuse s'aggravera avec la mauvaise saison si des mesures énergiques et promptes ne sont pas prises or le syndic de cette faillite ne terminera jamais les travaux qui exigent plusieurs centaines de milliers de Francs sans compte l'achat du matériel roulant et des frais d'installation. Donc à courte échéance il n'y aura plus de tramway du tout, ni à chevaux, ni à traction de locomotives. Tel est le plaidoyer de M. Herbette en faveur des populations dont il vient remettre les intérêts entre les mains du Ministre en lui réclamant de prononcer la déchéance immédiate de la concession de M. Tarbé des Sablons et d'ordonner la mise en adjudication de cette concession.
Le 19 août 1877, le maire de Marly-le-Roi fait part au Ministre des Travaux Publics que le Conseil municipal de Marly émet le vœu que la voie ferrée soit mise en activité mais que cela n'est pas réalisable vu le procès verbal de reconnaissance qui mentionne les infractions au cahier des charges établit au 31 octobre 1876.
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Le 26 août 1877, en lui remettant le procès verbal des 22 & 23 août constatant les diverses infractions, il demande au Préfet que les décombres soient enlevés, que les accès aux propriétés soient dégagés ainsi que celui de la ruelle et de la fontaine des Vauillons, et de rétablir l'écoulement des eaux 
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Le 28 août 1877, le préfet, vu la délibération du Conseil municipal de Marly-le-Roi en date du 31 juillet 1877 tendant à ce que la dite commune soit autorisée à mettre en demeure le concessionnaire d'avoir à exécuter la ligne concédée avant le 1er octobre 77, vu les rapports présentés par les ingénieurs des Ponts & Chaussées, etc. c'est au Conseil de Préfecture qu'il appartient de connaître les difficultés auxquelles peuvent donner lieu les marchés de travaux publics passés entre les entrepreneurs et l'Administration. Le Préfet arrête donc que la commune de Marly-le-Roi n'est pas autorisée à être en justice aux fins de la délibération sus-visée.
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Le 31 août 1877, Monsieur Herbette, notaire à Rueil près Paris écrit au maire de Marly-le-Roi que le préfet lui annonçait que le Ministre des travaux publics résoudrait dans un bref délai la question de confirmation aux héritiers de la mise en adjudication de la concession dans les délais les plus brefs.
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Le 8 septembre 1877, le préfet annonce au maire de Marly-le-Roi que M. Edmond Tarbé des Sablons et sa mère viennent d'être reconnus concessionnaires de la voie ferrée de Rueil à Port-Marly par décision du Ministre des Travaux Publics. Rien ne s'oppose plus à le prompte exécution des travaux de la ligne qui sera livrée le 30 novembre prochain.
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Le 29 août 1877, la lettre du Ministère Public contre M. Housay condamné à payer la contravention due aux encombrements de l'avenue de l'Abreuvoir (manque le deuxième feuillet) et l'annexe de l'architecte Fauconnier chargé de constater et d'évaluer.
22 septembre 1877. Les choses semblent s'enliser et M. Herbette doit se justifier auprès du maire de Marly-le-Roi. Ce sont des problèmes d'acquisition de terrain en voie de règlement qui retardent l'échéance. En effet le nouveau tramway à vapeur de M. Tarbé des Sablons doit être re-construit entre Rueil et Port-Marly non plus au milieu de la chaussée mais en accotement de la Route Nationale 13. En revanche sur le territoire de Marly les travaux avancent, c'est la traversée de Bougival qui pose problème, les ingénieurs du tramway entendant maintenir le nouvelle voie à peu près à l'emplacement de l'ancienne (au milieu de la chaussée) mais en mordant plus ou moins du côté droit, c'est à dire sur la promenade ce qui ne manque pas d'entraîner les plaintes des habitants. Ces derniers veulent préserver leur unique promenade et souhaiteraient que la voie emprunte le chemin de halage, ce qui ne convient pas aux intérêts de la navigation. Malgré les promesses de la préfecture de fonctionner au 1er novembre prochain, le notaire en charge du dossier n'y accorde pas une confiance absolue. La substitution de la voie nouvelle se ferait aux dires de l'entrepreneur au moment où l'exploitation serait la moindre c'est à dire cet hiver. Par ailleurs reste à examiner si M. Francq peut offrir des conditions plus sérieuses que les héritiers Tarbé, point sur lequel l'auteur de la lettre ne peut se prononcer.
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Le 24 septembre 1877, M. Housay est désigné officiellement syndic provisoire de la faillite de feu M. Eugène Tarbé des Sablons, de son vivant concessionnaire de la ligne des tramways à vapeur de Rueil à Marly-le-Roi.
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Le 23 novembre 1877, préfet écrit au maire de Marly-le-Roi pour lui indiquer les stations du tramway et lui envoie l'affiche de l'arrêté qui prescrit la mise à l'enquête d'utilité publique 
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Le 12 décembre 1877, le préfet écrit au maire de Marly-le-Roi pour l'informer qu'il l'a été nommé le 23 novembre dernier comme membre d'une commission appelée à donner son avis sur les projets d'emplacement des stations à établir sur le tramway à vapeur de Rueil à Marly-le-Roi
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Le 14 décembre 1877, M. Herbette, notaire à Rueil près Paris, est appelé à faire partie d'une commission chargée de définir l'emplacement des stations à établir pour le tramway à vapeur de Rueil à Marly-le-Roi et demande à M. Louis Maziau maire de Marly-le-Roi de lui faire part de ses observations sur le sujet.
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ligne59p_347.jpg (305753 octets)ligne59p_348.jpg (233969 octets)ligne59p_349.jpg (200013 octets)Dans ce document, non daté mais très probablement de1877, est évoqué le changement d'emplacement du terminus de l'Abreuvoir. la commune de Marly-le-Roi ferait les dépenses de démolition et de reconstruction du pavage et de la bordure de la voie actuelle et  et les dépenses de démolition et de reconstruction du pavage et de la bordure de la nouvelle voie. Elle enlèverait également les arbres qui pourraient gêner.
Le concessionnaire supporterait les frais de démontage de la voie actuelle et la reconstruction de la nouvelle voie telle qu'elle a été demandée par la commune.
Les travaux précités s'élèverait pour la commune à 1 500 F. et seront confié à
l'entreprise Berneront Entrepreneur. 
cette charge est lourde pour la commune mais une série de dons volontaires allègera le fardeau.
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Dans sa délibération du 31 décembre 1877, le conseil municipal de Marly-le-Roi arrête l'emplacement de la station de l'abreuvoir, non à pas à gauche mais à droite de l'Abreuvoir avenue Fitz-James dans l'éperon ou contrefort du mur de clôture du parc. Le concessionnaire prendra à sa charge le remaniement de la voie pour porter la gare dans l'avenue Fitz-James, chemin de Grande Communication n°7.
En revanche restera à la charge de la commune :
- la démolition du pavage et de la bordure pour l'enlèvement de la voie actuelle
- la réfection dudit pavage et de la bordure 
- la démolition et la reconstruction des pavages pour le nouvel emplacement de la voie.
Ces travaux se feront sous sa direction et sous sa surveillance. 
Archives de Marly-le-Roi
Le déplacement de la voie a fait l'objet de dons volontaires proposés par les habitants de Marly-le-Roi. En voici un feuillet. Le montant atteint la somme de 780 Francs.
Archives de Marly-le-Roi
C'est l'entreprise Berneront Entrepreneur qui effectuera les travaux selon le devis proposé et qui s'élève à 1 050 Francs.
Archives de Marly-le-Roi

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Notes :
  • 1 Léon Francq était également concessionnaire (1876) des tramways de Versailles et comptait exploiter ce réseau avec des locomotives à vapeur sans foyer système Lamm.
  • 2 Eugène-Amédée Tarbé des Sablons, né le 9 septembre 1846 à Paris où il est mort le 20 novembre 1876, est un homme de lettres français. Il collabora à plusieurs journaux, avec son frère Edmond : ils firent en commun la critique musicale du Figaro, à l’époque où ce journal devint quotidien. C'est Son frère Edmond qui reprendra la suite du tramway
  • 3 C'était le souhait de Léon Francq mentionné dans une autre lettre que de poursuivre ultérieurement la voie jusqu'à Versailles. St Germain et Versailles auraient alors été reliées par le tramway mécanique.
  • 4 Ce document nous apprend que la voie, ainsi qu'une voie d'évitement était déjà posées le long de la Route Nationale n°184, ainsi qu'une plaque tournante.
  • 5 M. Proust
  • 6 C'est sans doute faute de calage en station terminus de Marly-le-Roi que 'une voiture est partie en dérive le long de la voie, s'écrasant contre le mur de la mairie de Port-Marly en 1908. Accident qui ne fit pas de victime.
  • 7 M. Tarbé des Sablons, dans un autre courrier adressé au maire, avait proposé à ce dernier de décaler la fête de la Marly-le-Roi pour la faire coïncider avec l'inauguration du tramway.
  • 8 À l'occasion de cette reconstruction, non seulement lavoie a été mise à l'écartement normal (1,44 m.) mais le tracé a changé sur la commune de Rueil, abandonnant la rue du chemin de fer (actuellement avenue Albert 1er) pour passer rue Victor Hugo et rejoindre Rueil-Ville. L'acquisition des terrains concernent ce nouveau tracé sur la commune de Rueil

Sources :

  • Archives de Rueil-Malmaison
  • Archives de Marly-le-Roi
  • Wikipedia

Sites :

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