Manuel d’utilisation du groupe propulseur de la chaloupe à vapeur SUZANNE




Sommaire

 

1. Notions sur la chaudière de Suzanne.

Parmi les différents types de chaudières qui existent, la chaudière de Suzanne est une chaudière verticale à foyer intérieur cylindrique terminé à sa partie supérieure par un fond plat et portant en son centre un tube-cheminée qui débouche sur l'extérieur. Le fond plat du foyer intérieur est percé de 34 trous coniques dans lesquels sont emmanchés des tubes à eau, fermés à leur extrémité inférieure et pendant dans le foyer. Ces tubes dits « tubes Field » ne reçoivent pas le tube barboteur en raison de leur trop petit diamètre.
Au milieu du foyer est disposé une calotte métallique appelée brise-flamme, dont le but est d'empêcher les gaz de combustion de s'engouffrer directement dans la cheminée et de les obliger à lécher les tubes pendentifs. La surface de chauffe directe est de 2,52 m2 et la production de vapeur pour ce type de chaudière est de l'ordre de 15 kg de vapeur par mètre carré et par heure soit une production de vapeur horaire de 38 kg. Le rendement est assez médiocre et dépasse rarement 50%. La conséquence directe de ce mauvais rendement est la sortie à une température élevée des gaz. La calorifugeage de la chaudière est un atout important pour éviter la perte de la chaleur par les parois extérieures.
De faible encombrement ce type de chaudière présente l'avantage d'avoir une mise en pression rapide et un encombrement relativement faible bien adapté à l’espace offert par la chaloupe.

Pressions

Durées

Temps

Pressions

Durées

Temps

0 bar

  0 mn

  0 mn

3,5 bars

3 mn

1h07

0,5 bar

35 mn

35 mn

4 bars

2 mn

1h09

1 bar

10 mn

45 mn

4,5 bars

1 mn

1h10

1,5 bars

  5 mn

50 mn

5 bars

1 mn

1h11

2 bars   5 mn

55 mn

5,5 bars

1 mn

1h12

2,5 bars

  5 mn

60 mn

6 bars

1 mn

1h13

3 bars

  4 mn

1h04

6,5 bars

 1 mn

1h14

Afin d'obtenir une production de vapeur maximale et de conserver en bon état cette chaudière, il est nécessaire de suivre quelques recommandations concernant la conduite du feu et l'entretien, recommandations validées par l'APAVE. 
Tel est le but de ce manuel « de former le lien entre le chauffeur et la chaudière qu'il conduit ».
« Conduire un feu ne se résume pas à jeter de la houille dans le foyer. Un bon chauffeur doit être avant tout un observateur et raisonner les opérations qu'il pratique ». 
Il faut savoir d'autre part que :

Données administratives de la chaudière

Caractéristiques du générateur

Notions sur la chauffe

Le combustible
Le combustible ou plutôt les combustibles sont solides, liquides ou gazeux. Dans notre cas, il s'agit d'un combustible solide : le bois et/ou la houille, caractérisée par son pouvoir calorifique, et son calibrage. On retiendra dans le classement des calibrages la noix dont la taille est de 30 à 50 mm et qui conviendrait mieux pour la chaudière de Suzanne.
Tous les bois et charbons ne brûlent pas de la même façon et avec la même facilité. Cela dépend de leur nature et principalement des matières volatiles qu'ils dégagent en s'enflammant. En terme de qualité de charbon, nous retiendrons :

La principale caractéristique d'un combustible est son pouvoir calorifique, c'est à dire la quantité de chaleur que dégage 1 kilo de ce combustible. Cette quantité de chaleur est variable selon la teneur en eau et en cendre de ce combustible.
Le flambant à un pouvoir calorifique de 7200 calories alors que le bois a un pouvoir de 3500 calories. 
Les différents essais ont montré que la chauffe au bois étant très satisfaisante, tant pour la rapidité de montée en pression que pour son maintien en pression de service. Par ailleurs ce mode de chauffe est de très loin beaucoup moins salissant et plus économique. De plus les cendres sont pulvérulentes et n’encrassent pas la grille. Enfin le feu s’éteint rapidement lorsqu’on cesse d’alimenter le foyer.

La combustion
La combustion est la combinaison vive du combustible avec l'oxygène de l'air (l'azote ne participe pas à la combustion). Elle s'accompagne d'un dégagement de chaleur sous forme de feu. Chaque combustible ne s'enflamme qu'à partir d'une température qui lui est propre et que l'on appelle température d'inflammation. 
La quantité d'air nécessaire à la combustion d'un kg de charbon est de 8 m3. C'est la quantité d'air théorique. Elle varie de 1,5 voire 2 fois pour une combustion complète. Ce surplus est appelé excès d'air. Il ne faut toutefois pas exagérer l’excès d’air sans quoi les gaz de la combustion deviennent trop dilués et leur température s'abaisse.
Le carbone contenu dans le charbon donne avec l'oxygène du gaz carbonique CO2 qui occupe le même volume (en proportion car il y a de l'azote dans l'air) que celui de l'oxygène dont il provient. S'il y a insuffisance d'air, il y a production de d'oxyde de carbone CO et la combustion n'est pas complète entraînant une perte de chaleur. 
Il est important que le calibrage du bois ou du charbon soit régulier pour laisser passer suffisamment d'air afin de garantir une bonne qualité de la combustion.

Le tirage
Le tirage de la cheminée est d'autant plus fort que :

À l'allumage, comme la cheminée est froide, le tirage n'est pas optimal. Pour la réchauffer il faut commencer par brûler du papier et du carton afin d’augmenter la température du conduit.

Le foyer (parties constitutives)
Le foyer ou chambre de combustion comporte une grille sur laquelle brûle le charbon et un cendrier pour recueillir les cendres et par lequel arrive l'air nécessaire à la combustion. L'air passe par les lumières de la grille (espace entre les barreaux qui représente 40% de la surface de la grille). Le foyer de la chaudière de Suzanne est un foyer logé à l’intérieur de la double paroi circulaire de la chaudière formant une « une lame d'eau ». Le chargement se fait par la porte du gueulard. En position fermée, cette porte doit être loquetée et bien s'appliquer sur son cadre.

Les outils du chauffeur

Allumage du feu (chauffe au charbon)
Avant de procéder à l'allumage du feu, le chauffeur doit impérativement s'assurer que le niveau d'eau dans la chaudière n'est pas trop bas et que le cendrier contient environ une quinzaine de litres d’eau.
Préparer du papier, carton, petit bois et bois plus gros.
Lorsque le bois est bien allumé, refermer la porte du gueulard.
Le bois étant plus économique que le charbon, n'introduire le charbon qu'en vue de l'exploitation. Une chaudière peut très bien être amenée au timbre avec seulement du bois.
Lors du chargement du foyer avec du charbon, veiller à ce que la porte du gueulard soit ouverte le moins longtemps possible, c'est à dire que pour l'introduction du combustible. En effet, lors de son ouverture, l'air entre dans le foyer et le refroidit. Au premier chargement, le charbon doit être projeté en éventail, c'est à dire recouvrir la grille de manière homogène sur une couche de quelques centimètres. Quelques pelletées doivent suffire. La répartition doit être uniforme sur l'ensemble de la grille. Un bon chauffeur doit du premier coup d’œil reconnaître les tâches claires où le charbon va manquer et les tâches sombres où le feu languit. Il doit y remédier par la bonne répartition du charbon. 
La cadence de chargement doit être régulière, c'est à dire « peu et souvent ». On admet 1 kg par mètre carré de grille et par minute. Si la production de vapeur doit diminuer, on réduit cette cadence. Si au contraire la production doit être activée on augmente la cadence, mais pas la quantité de charbon (une trop forte quantité de charbon frais ralentit le feu). 
La couche de charbon ne doit pas excéder une dizaine de centimètres pour la noix. Cette épaisseur peut varier en fonction de la qualité du charbon utilisée. Ne pas hésiter à casser les morceaux les plus gros pour les réduire à la taille requise. Le charbon ne brûle pas instantanément, il faut donc anticiper. Cette anticipation reste valable pour la production de vapeur. Entre l'introduction de la pelletée et la montée de la pression, il se passe un certain temps que le chauffeur doit prendre en compte. Son savoir faire viendra avec l'habitude.

En brûlant le charbon se décompose sur la grille en :

Lorsque la couche présente des inégalités d'épaisseur ou de teinte, le chauffeur doit l'uniformiser et/ou l'aérer en s'efforçant de respecter l'ordre ci-dessus, (de la grille vers le foyer) c'est à dire éviter de mélanger le charbon frais et le mâchefer. Toute opération doit normalement commencer par le fond du foyer puis finir par le devant. Le piquage doit se faire quand le feu est bien clair, c'est alors qu'on voit le mieux les trous s'il y en a. Après le piquage attendre que le feu soit bien repris à l'endroit du piquage avant de refaire une nouvelle charge.
On reconnaît la bonne combustion à la couleur jaune claire des flammes de la couche incandescente. Des flammes blanches indiquent un excès d'air. Un défaut d'air au contraire entraînerait des gaz incomplètement brûlés, reconnaissables aux des flammes bleues ou à de courtes flammes jaunes se terminant par un filet de fumée noire. L'épaisseur de la couche joue également un rôle pour la perméabilité de l'air.

 

Le décrassage
Après un certain temps d'utilisation qui varie selon la qualité du combustible, la chaudière doit être décrassée. On s'en aperçoit lorsque le feu diminue de vivacité, devient rougeâtre, parfois avec de petites flammes bleues à sa surface. C'est le mâchefer qui obstrue la grille et ne laisse plus passer assez d'air. Le décrassage a pour effet de séparer le charbon incandescent, les cendres et le mâchefer. 
Arrêt de la production de vapeur.
Il convient de faire une distinction entre un arrêt de courte durée (déjeuner) et l’arrêt complet de la production de vapeur (fin de journée). 
Dans le premier cas on fait à l'aide du rouable un petit talon devant la porte du gueulard. On profite de cet arrêt pour décrasser et faire tomber les cendres dans le cendrier.

Pour l’arrêt de fin de journée ou extinction du feu, il vaut mieux laisser tomber le feu environ une demi-heure avant la fin du service (ce temps restera à déterminer en fonction de la pratique) en diminuant progressivement ou en arrêtant la charge de combustible puis en fermant la porte du cendrier. La fumée ne doit toutefois pas refouler par la porte du gueulard. Dans ce cas ouvrir progressivement le registre pour l'évacuation des gaz et attendre que le combustible se consume. Lorsque qu'il n'en reste presque plus, faire tomber les cendres dans le cendrier ramener le mâchefer vers l'arrière du foyer à l'aide du rouable et enlever le tout à l'aide de la pelle et le mettre dans un seau métallique en eau. 
Avant de quitter la chaloupe, le chauffeur devra impérativement s'assurer que plus aucun charbon incandescent ne reste dans le foyer et le cendrier. 

Extraction des boues
En fin de service il faut faire une extraction des boues. 
Attendre que le manomètre soit descendu à 2 bars, connecter le tuyau sur la vanne de vidange et ouvrir progressivement la vanne de vidange deux ou trois fois en maintenant bien le tuyau à l’extérieur de la chaloupe puis la refermer.

Nettoyage du cendrier
Avant le service, ne pas oublier de mettre un seau d’eau (10/15 litres) dans le cendrier.
Après chaque utilisation, le cendrier doit être nettoyé. L’eau est aspirée à l’aide d’une seringue et les cendres sont mises dans un seau métallique et vidées à l'extérieur de la chaloupe.

Vidange de la chaudière
La chaudière doit être vidangée à chaque fin de service annuel. Attendre que la pression soit retombée naturellement ou manuellement à zéro, vérifier que le tuyau est branché sur la vanne de vidange et ouvrir cette vanne jusqu’à ce que l’eau de la chaudière soit épuisée.

2. Règles à suivre dans la conduite des chaudières au point de vue de la sécurité

Le décret du 2 avril 1926
C'est lui qui réglemente les générateurs de vapeur. Il doit être affiché ou présent dans la chaloupe et le chauffeur doit en avoir pris connaissance avant de mettre en oeuvre sa pratique.
La chaudière de Suzanne est une chaudière de troisième catégorie. C'est à dire que le produit du volume par la température -100° est inférieur à 50 . 
(0,210m3* (184°-100°)= 17,64.
(t=184° à 10 bars). Elle est donc soumise à ce décret.

Production de vapeur
La chaleur dégagée par la combustion dans le foyer se transmet à travers les parois par conduction, puis à l'eau qu'elle transforme en vapeur par convection. À l'intérieur de l'eau des bulles de vapeur se forment et remontent à la surface du liquide. Cette vapeur se rassemble dans la partie de la chaudière la plus haute et qu'on appelle chambre ou dôme de vapeur où elle est prélevée. Sur la chaudière de Suzanne, la prise de vapeur se fait à partit de la nourrice.
Du fait que la chaudière soit hermétiquement close, la pression de vapeur augmente en fonction de la température. Cette pression est évaluée en kg/cm2 ou hectopièze (1 hpz=1,02 kg/cm2). On considère qu'à la pression de 10 bars, la température est de 184°.

Tableau des pressions remarquables

Comme dans la chaudière la vapeur est en contact avec l'eau, on dit qu'elle est saturée.

Sécurité du fonctionnement d'une chaudière à vapeur
Pour que la sécurité de fonctionnement d'une chaudière à vapeur soit assurée deux conditions sont à observer :
- La pression de la vapeur ne doit en aucun cas dépasser le timbre de la chaudière, c'est à dire la pression maximale pour laquelle la chaudière a été construite qui est de 10 bars. C’est la pression de service. 
La pression d’épreuve effectuée chez le constructeur est de 16 bars.
- Le niveau de l'eau ne doit jamais baisser au-dessous du niveau minimal réglementaire qui doit être marqué sur le corps de chauffe et qui se situe à 6 cm au dessus du ciel de foyer. La conduite de l’alimentation en eau est une des fonctions les plus sérieuses et délicates du chauffeur.

Risque de manque d'eau
Le risque de manque d'eau est le risque majeur dans la conduite des chaudières. En effet si la paroi en tôle vient à ne plus être en contact avec l'eau, la tôle n'est plus refroidie et s'échauffe au contact de la vapeur qui n'absorbe pas la chaleur. Le résultat de cet échauffement est la perte de la résistance de la tôle qui, de plus, est soumise à la pression. La conséquence du manque d'eau est pour les chaudières à foyer intérieur, verticales ou horizontales, l'enfoncement du foyer qui survient sous la pression de la chambre de vapeur. Cet enfoncement s'accompagne généralement de déchirures de la tôle voire d'une explosion dans les cas extrêmes souvent dus à la non surveillance.
Il est donc essentiel pour la sécurité que toute paroi de la chaudière en contact avec la flamme soit baignée sur sa face opposée. 

Jeter le feu
Il est parfois nécessaire de "jeter le feu" (fin de service ou impossibilité de remettre de l'eau dans la chaudière, etc.) dans ce cas prendre le seau rempli d'eau, tremper le gant dans le seau en revêtir la main et sortir les morceaux incandescents et les plonger dans le seau ou la rivière.

3. Les appareils réglementaires et actions à mettre en oeuvre

Le manomètre
Le manomètre est un appareil de mesure qui indique la pression de la chaudière. Il est gradué en kg/cm2 et doit porter la marque apparente (un trait rouge) de la pression du timbre. Ce repère doit être facilement lu par le chauffeur.
Le fonctionnement d’un manomètre est basé sur la déformation, sous l'action de la pression, d'un tube métallique élastique de section elliptique, fermé à une extrémité et incurvé. Dans sa déformation, le tube entraîne une aiguille qui se déplace sur un cadran. Le tuyau allant de la chaudière au manomètre est ordinairement recourbé en forme de lyre de manière à présenter un point bas, afin que l'eau provenant de la condensation s'y accumule et protège le tube élastique contre la température élevée de la chaudière. Dans le cas de Suzanne un support de « manomètre étalon » permet la purge de l’appareil. Il faut purger le manomètre au moins à chaque mise en service de la chaudière.
Comme on l’a vu dans le tableau des correspondances entre la pression et la température la pression est une fonction quatrième de la température . C’est-à-dire qu’à partir de 6 bars le chauffeur doit surveiller de très près la pression et prendre les décisions d’usage quant à la conduite du feu et de l’eau. Dans le cas de la chaudière de Suzanne, on passe de 7 à 8 bars en moins d’une minute et plus la pression augmente, plus le temps de réaction doit être rapide.

Le niveau d'eau
Le point bas du niveau de l'eau est à 6 cm au-dessus du ciel de foyer. Pour se rendre compte du niveau de l'eau dans la chaudière le chauffeur a à sa disposition deux niveaux à glace, de type "Klinger". Chaque niveau est indépendant l'un de l'autre. Les niveaux haut, bas et ciel de foyer doivent être marqués visiblement sur le bardage.
Chaque niveau est muni 

Le niveau est monté avec deux joints d’étanchéité : un devant la glace et un deuxième derrière.
Au moins une fois par service, il faut purger les communications d'eau et de vapeur. Pour cela fermer le robinet haut (vapeur) et purger, puis le réouvrir et faire de même avec le robinet bas (eau). La remontée lente de l'eau dans le tube indique une obstruction en formation. Il suffira de l’évacuer par une succession d’ouvertures et de fermetures du robinet de purge.
L’eau doit toujours apparaître dans le niveau, même au point bas. Si elle n’apparaît plus, il est urgent de jeter le feu et de libérer progressivement la vapeur sans brutalité.
Les soupapes de sûreté
Les soupapes de sûreté sont tarées de manière à laisser le vapeur s’échapper dès que la pression atteint le timbre. Leur débit est calculé en fonction de la production de vapeur du générateur. Il est formellement interdit de les dérégler par quelque moyen que ce soit. Un certificat de tarage est déposé dans le dossier de l'APAVE
Si l’on voit que la pression monte alors que la vapeur n’a pas à être utilisée (stationnement), il faut lever les soupapes afin de réguler la pression et éviter inutilement d’atteindre le timbre.
Les soupapes doivent être levées manuellement avant chaque mise en service afin de s’assurer qu’elles ne sont pas collées sur leur siège.

Les clapets de retenue d'alimentation.
La conduite d'alimentation est munie d'un clapet de retenue. Il fonctionne automatiquement et a pour but d'empêcher l'eau introduite dans la chaudière de refluer vers la pompe ou l'injecteur et par conséquent de vider la chaudière. Un robinet d'arrêt vapeur doit obligatoirement être interposé entre la chaudière et le clapet d'arrêt.
Il y a deux clapets en amont de la vanne trois voies  :

Un petit bâton qui sert de stéthoscope permet de vérifier auditivement le bon fonctionnement :

Les appareils d’alimentation en eau de la chaudière
La réglementation ne prescrit rien en terme d'appareils d'alimentation en eau dans la chaudière, sinon que ces appareils d'alimentation doivent être au nombre de deux. Dans le cas de Suzanne, il y a une pompe alimentaire et un injecteur en charge.

La pompe alimentaire
La pompe alimentaire est la plus petite des deux. Elle débite 3,19 litres à 300 t/mn.
La pompe alimentaire est directement prise sur le mouvement de la machine. Elle pompe l'eau de la soute à eau et l'envoie directement dans le réchauffeur dans lequel, sa température est élevée avant d'être introduite dans la chaudière. La pompe alimentaire maintient le niveau de l'eau tant que la machine tourne. Si le niveau est trop bas et que la chaloupe est à l'arrêt (stationnement obligatoire), amarrer la chaloupe solidement au quai et faire tourner la machine (interdiction de quitter le bord). Si la machine ne tourne pas il faut avoir alors recours à l'injecteur qui lui utilise la vapeur prélevée directement sur le générateur.

Fonctionnement
Lorsque le niveau de l'eau est suffisant dans la chaudière il faut isoler le circuit d'alimentation à l’aide de la vanne 3 voies en L.
.
Dans ce cas l'eau pompée retourne dans la soute à eau.

La vertu de la pompe est d'alimenter régulièrement, c'est à dire peu et souvent (comme pour la conduite du feu). Un anti-bélier en sortie de pompe évite les coups de bélier agressifs pour les conduits et bruyant de surcroît.

L'injecteur
L'injecteur est un injecteur dit « en charge », c'est à dire qu'il se situe au-dessous du niveau d'eau de la soute à eau et qu'il n'a pas comme dans le cas des « Giffard » besoin d'aspirer l'eau pour être gavé.
L'eau qui arrive dans l'injecteur est envoyée dans la chaudière au moyen d'un jet de vapeur prélevé directement sur la chaudière et qui imprime à l'eau une vitesse assez grande pour que la force vive du liquide pénètre à l'intérieur de la chaudière. L'injecteur ne fonctionne que dans des conditions de pression et de température qui restent à observer par expérience.

Fonctionnement
Avant d'utiliser l'injecteur, il convient d'isoler le circuit de la pompe alimentaire, afin de ne pas contrarier les flux.
Dans un premier temps 

Cette ouverture de vapeur est fonction de la température et de la pression de la chaudière. Pour se rendre compte du bon amorçage de l'injecteur, il suffit de constater avec la main l'écart de température entre l'aspiration (tuyau d'eau froid) et le refoulement vers la chaudière (tuyau chaud). On se basera également au bruit caractéristique.
L'usage doit privilégier la pompe à l'injecteur afin d'obtenir une alimentation régulière.

Quelque soit le type d'alimentation (pompe ou injecteur) il faut veiller à ce que le niveau de l'eau monte dans le tube lorsque l'alimentation fonctionne.
L'abaissement anormal du niveau de l'eau peut entraîner rapidement un manque d'eau. C'est une situation grave et une des causes les plus fréquentes d'accident. Dans le cas où un abaissement d'eau ne pourrait être remédié, il faut alors arrêter l'action du feu ou le jeter bas et ouvrir les soupapes.

Le traitement de l'eau d'alimentation
L'eau qui sert à l'alimentation des chaudières contient de sels minéraux et des matières en suspension et en dissolution. Elles contient aussi de l'huile issue du graissage de la machine. La mesure de ces sels s'exprime en "degré de dureté" qui se fait par l'analyse chimique. Afin de faire précipiter des sels en boues il faut ajouter à l'eau une proportion de produit alcalin KEBO (25 cl par m3 d'eau) et extraire ces boues en fin de service au moyen de la vanne d'extraction qui se trouve au point bas de la chaudière.
Les dépôts qui se forment dans les chaudières présentent plusieurs inconvénients. Ils constituent une couche isolante qui oppose une résistance au passage de la chaleur entre la surface de chauffe et l'eau et qui a pour effet d'élever la température de la tôle pouvant l'amener à provoquer des "coups de feu" (déformation), sans compter les pertes de production de vapeur et de rendement.
Le recyclage de l'eau de condensation est à cet égard un avantage, car elle est débarrassée des sels calcaires. La décantation de l'huile est néanmoins nécessaire.

La pompe à vide
La pompe à vide sert à éliminer les gaz dissous, principalement l'oxygène source de l'oxydation de la chaudière. Elle pompe l’eau de condensation pour l’envoyer dans le déshuileur. Cette eau est encore chaude. De plus elle active la dépression du cylindre BP et favorise la marche du moteur en créant un vide à l’échappement bas-vapeur (seulement lorsque la marche est en circuit fermé).
Elle débite 12,74 litres à 300 t/mn.

Ramonage des surfaces de chauffe en service.
Les suies et les cendres volantes se collent aux surfaces en formant une couche épaisse qui fait écran à la transmission de la chaleur et entravant le parcours des gaz. De ce fait les fumées sortent plus chaudes de la cheminée et abaissent le rendement de la chaudière. En conséquence, il est nécessaire de nettoyer les tubes à l'intérieur du foyer avec une brosse.

Arrêt, vidange et ouvertures de la chaudière
Au moins une fois par an, (tous les 24 mois) il faut nettoyer l'intérieur de la chaudière. Le but est d'éliminer autant que faire se peut les incrustations et dépôts divers. De toute façon, ce nettoyage doit être fait en vue des visites réglementaires. Si cela est possible il faut introduire une lance de karcher et nettoyer un à un les tubes d'eau. Un manche fabriqué à cet effet permettra d'extraire l'eau de chaque tube par débordement. Avant d'hiverner la chaudière un léger feu de bois sèchera les tôles et les tubes. En cas de lavage de la chaudière à l'acide, celle-ci devra ensuite faire l'objet d'une passivation à la soude, suivie de plusieurs nettoyages à grande eau. Cette opération devra faire l'objet de soins attentifs.

Le rendement
Le rendement est égal au rapport de la chaleur utilisée sur la chaleur fournie. Pour une chaudière qui consomme 300 kg de charbon par heure avec un pouvoir calorifique de 7200 calories pour vaporiser 2300 kg de vapeur à une pression de 8 kg. L’eau est à 10°, le rendement est :

La consommation de la chaudière est fonction du combustible employé. Cela se mesure en Kg/h de combustible par heure.

Les visites et épreuves réglementaires
Les visites réglementaires ont lieu au moins tous les 24 mois après la première mise en service de la chaudière. Il s'agit d'une visite complète, intérieur et extérieur à froid. Tous les bouchons, trous de poing et trous d'homme doivent pour cela être déposés et la chaudière soigneusement nettoyée. La visite est faite par un inspecteur APAVE qui rend un rapport de visite du générateur et en donne la substance verbalement au responsable vapeur. La visite est consignée dans un livret avec :

La visite intérieure qui précède une épreuve décennale doit être faite de manière plus complète que les visites périodiques et si des parties de la chaudières sont inaccessibles, il faut néanmoins en faciliter l'accès par le démontage d'un certain nombre de tubes si cela est demandé par l'inspecteur. D'autre part le responsable vapeur est tenu de faciliter l'inspection (éclairage, prise de manomètre étalon, raccords divers, etc.).

L'épreuve décennale 
Elle a lieu tous les 10 ans, cela dit une dérogation de quelques semaines (ou mois) est négociable. La chaudière doit être mise à nue. Cette épreuve consiste à soumettre la chaudière à une pression hydraulique équivalent 2 bars au dessus du timbre c'est à dire 12 bars maximum pour les ré-épreuves ordinaires . Cette mise en pression dure pendant l'examen de toutes les parties de la chaudière. Pour préparer l'épreuve, il faut, après nettoyage de la chaudière, enlever les calorifuges et bardages, boucher les trous de tubulures, remettre les trous de poings et trous d'hommes. Les soupapes, niveaux, sifflet doivent être également démontés et les tubulures bouchées par des joints ou bouchons. Avant la mise en pression à l'aide d'une pompe manuelle, il convient d'évacuer l'air du récipient à l’aide d’un robinet de fuite. Il est bon de faire un essai avant l'épreuve officielle.

4. Notions sur la machine

La machine de Suzanne est une machine à vapeur alternative verticale à double effet, double expansion avec deux cylindres disposés en tandem.

 


Les cylindres
Les cylindres sont des pièces creuses en fonte, alésées à l’intérieur à 60 mm pour le cylindre haute pression et 120 mm pour le cylindre basse pression, portant aux extrémité des brides pour la fixation des fonds. Le couvercle du cylindre haute pression pénètre légèrement à l’intérieur des cylindres afin de laisser entre leur surface intérieure et le piston, à fond de course un espace de quelques millimètres. Les fonds présentent dans la partie centrale une cavité qui laisse le logement à l’écrou de fixation du piston sur sa tige. Dans le bas de chaque cylindre et en haut du cylindre haute pression il y a des robinets de purges. Ces robinets doivent être ouverts à chaque arrêt prolongé et en fin de service.

Le piston et la tige 
Le piston, tout comme les segments qui servent de garniture est en fonte et garni de gorges dans lesquelles sont logés les segments. Ces segment sont pressées contre la paroi du cylindre par leur élasticité et assurent l’étanchéité entre leurs deux faces respectives.
Les pistons ont une course de 80 mm. Ils doivent :

La tige commune des pistons cylindriques est reliée rigidement au piston et articulée au pied de bielle motrice. Étant soumise à des efforts alternatifs de traction et de compression, elle est en acier forgé, à haute limite élastique.
L’emmanchement de la tige dans le piston est cylindrique et fixé à l’aide d’un écrou et d’un contre-écrou.

Le presse-étoupe
Le presse-étoupe est un organe d’étanchéité qui permettant le passage de la tige du piston, tout en interceptant la communication entre l’intérieur et l’extérieur des cylindres et l’atmosphère. Il se compose de trois parties :

Crosse, glissière, bielle, excentrique
À l’extrémité de la tige opposée au piston est vissée la crosse, en acier. Elle porte en haut et en bas des patins qui se meuvent sur des glissières appropriées, fixées rigidement sur le bâti.
La bielle est en acier doux. Aux deux extrémités elle porte des articulations avec la crosse en haut (pied de bielle) et la manivelle en bas. Le pied de bielle a un mouvement alternatif rectiligne.
La glissière est nécessaire pour former réaction à la pression qui s’exerce normalement à la tige, par suite de l’obliquité de la bielle. Elle n’est pas munie de contre-glissière.

L’arbre moteur
L’arbre moteur est en acier forgé, muni de coudes, vilebrequins, manivelles, pour la jonction avec la tête de bielle. Le tout est appelé vilebrequin ou arbre à manivelles. Côté chaudière il est muni d’un volant d’inertie et coté barre il est relié à l’arbre d’hélice par un cardan spécial.

Les paliers
Les paliers de l’arbre ou vilebrequin sont en fonte avec coussinets et revêtement en bronze à l’intérieur. Ils sont conçus de manière à pouvoir compenser l’usure par un dispositif de serrage, on dit qu’ils sont à « rattrapage de jeu ». Lorsque l’usure des coussinets est trop importante, il faut alors les réguler avec un alliage comportant généralement 4 à 5 % de cuivre, 70 à 95 % d’étain et 5 à 10 % d’antimoine.

Le bâti 
C’est la pièce de fonte sur laquelle sont montés les divers organes constitutifs du moteur. Le bâti est rigidifié par deux colonnes en acier. Il a pour but de relier entre eux les organes et d’assurer leur constante position, malgré les efforts importants qu’ils subissent.

Mode d’action de la vapeur dans les cylindres
La vapeur agit par sa pression sur la surface du piston haute pression dont les deux faces sont mises alternativement en communication (double effet) avec la vapeur vive ou admission, c’est à dire avec la vapeur dont la pression est contrôlée par le mécanicien.
Cette mise en communication automatique est obtenue grâce au système de distribution commandé par une paire de tiroirs plans HP et BP.

Les tiroirs
Ils sont constitués :

Le calage du tiroir est l’angle formé par la manivelle du piston, ou manivelle motrice avec le rayon d’excentrique du tiroir.
On appelle recouvrement du tiroir les quantités dont les arêtes du tiroir débordent celles correspondantes des orifices du cylindre quand le tiroir est à mi-course, c’est à dire dans la position moyenne. Les tiroirs sont soumis à la pression de la vapeur qui les applique sur leur glace et assure ainsi l’étanchéité
Il y a 4 recouvrements réglables, 2 pour l’admission et 2 pour l’échappement :

 
La mesure des recouvrements se fait toujours lorsque les tiroirs sont à mi-course.

Transformation du mouvement
Le piston, alternativement poussé sur l’une et l’autre de ses faces, prend un mouvement rectiligne alternatif que l’on transforme en un mouvement circulaire continu au moyen du système bielle manivelle. La tige du piston est reliée à une extrémité au piston (tête de bielle) et à l’autre à la crosse (pied de bielle) qui se déplace sur une glissière unique. Sur la crosse est articulée l’extrémité de la bielle dont l’autre extrémité s’articule sur la manivelle motrice. La manivelle est solidaire de l’arbre moteur.

Excentrique
Avec un système bielle-manivelle, on transforme un mouvement rectiligne alternatif en mouvement circulaire et réciproquement. C’est sur la partie mouvement circulaire qu’on se branche pour la commande des tiroirs. A cet effet, la tige du tiroir est réunie à un plateau circulaire calé sur l’arbre moteur, tournant avec lui, non autour de son centre mais autour d’un centre de l’arbre excentré par rapport au sien. Ce plateau est embrassé sur sa circonférence par un anneau ou collier d’excentrique portant une tige droite ou barre d’excentrique, elle-même reliée à la tige du tiroir ; il tourne, en frottant, dans le collier et communique un mouvement rectiligne alternatif à la barre d’excentrique. On obtient ainsi le même déplacement, c’est à dire la même course qu’avec la manivelle qui aurait pour longueur l’excentrique OC.
Pour le guidage longitudinal, le collier présente intérieurement une rainure-guide dans laquelle s’engage le plateau.
La calage est en principe à 90° par rapport, à la manivelle de manière à ce que, lorsque le piston est en bout de sa course, le tiroir commence à ouvrir :

L’admission n’est donc pleinement ouverte qu’à la moitié de la course du piston. C’est pour cette raison que les constructeurs ont avancé cette admission en augmentant ou en diminuant l’angle de calage, d’un angle appelé angle d’avance. Cette disposition, en même temps qu’elle donne une admission anticipée, fait également découvrir un peu plus tôt les arêtes d’échappement et permet à la vapeur de s’évacuer plus vite et d’augmenter le rendement de la machine par une réduction de la contre-pression, c’est-à-dire la pression résiduelle côté échappement du piston. Pour information, on appelle pression effective la différence entre la pression et la contre-pression.

La détente
Ce système entraîne une grande consommation de vapeur lors de son admission pendant toute la course du piston. En effet celle-ci est évacuée à pleine ou quasi pleine pression qui n’est pas totalement utilisée lors de la détente. Afin de mieux tirer partie de cette détente, on n’admet la vapeur dans le cylindre que pendant une fraction de la course du piston, ainsi pendant le reste de la course, la vapeur admise se détend dans le cylindre et c’est la propriété élastique, d’expansion de la vapeur qui continue d’agir lorsque son admission est interrompue. On dit qu’on admet au 1/3 ou à la moitié selon le calage.

Les phases de la distribution
Lorsque l’excentrique est calé à 90°, il n’y a que deux phases, l’admission et l’échappement, phases qui durent pendant la course complète du piston. En modifiant le calage on peut obtenir jusqu’à 6 phases :

Ces phases s’expriment en pour cent de la course du piston côté haut-vapeur et côté bas-vapeur.Exemple

 

haut-vapeur

bas-vapeur

admission

38%

35%

détente

60%

62%

avance à l’échappement

  2%

  3%

échappement

85%

83%

compression

14%

15%

avance à l’admission

  1%

  2%

Sur la machine le Suzanne, le calage est fixe et le pourcentage d’admission n’est pas ou peu sensible.

Machine compound
Lorsque la détente est effectuée dans un seul cylindre, on dit que la machine est à simple expansion la vapeur est utilisée qu’une seule fois et double effet car elle agit sur les deux faces du piston. Si la valeur de l’admission n’est pas variable on parle d’une détente fixe, si au contraire, elle est modifiable on parle de détente variable.
La machine de Suzanne comprend deux cylindres, c’est une machine à double expansion ou « compound » (il existe des machines à détentes multiples, jusqu’à quatre expansions).
Le premier cylindre qui admet la vapeur est dit cylindre haute pression HP, le deuxième est appelé cylindre basse pression BP. Les deux cylindres sont séparés par un réservoir « receiver » c’est ce qui les différencie de la machine de Woolf qui n’a pas de réservoir.
En fait sur la machine de Suzanne, étant donné la proximité des cylindres, ce sont les conduits qui mènent du cylindre HP au cylindre BP qui font office de réservoir, mais ceux-ci sont difficilement décelables sauf sur la remarquable maquette réalisée pour le Palais de la Découverte où l’on voit bien ces conduits et leur volume qui fait office de « réservoir».
La vapeur travaille avec une faible détente dans le cylindre HP dont l’échappement se fait dans ce réservoir intermédiaire qui alimente à son tour le cylindre BP ou « cylindre d’expansion » où la vapeur cette fois travaille avec une grande détente avant de s’échapper vers le condenseur. Chaque cylindre possède son tiroir indépendant commandé par une tige unique, d’où le nom donné à ce type de machine « compound en tandem ».

Action physique de la vapeur dans le cylindre (action des parois)
Les parois du cylindre, le piston et sa tige constituent des organes qui ont pour effet de refroidir la vapeur. En effet, les parois sont extérieurement, en contact avec l'air ; quant au piston, l'une des faces est en contact avec une vapeur sensiblement à la pression atmosphérique, ou à une pression moindre. De plus s'il y a un condenseur, la face du piston en contact avec la condensation est beaucoup plus froide que celle qui agit sur l'autre face. 
Il en résulte qu'à l'admission, au moment où la vapeur est introduite (dans le cylindre, il s'en condense une partie, en gouttelettes, sur les diverses parois, c'est la condensation initiale. Il y a abaissement de température de la vapeur et chute de la pression. La ligne de pression, dans un diagramme, au lieu de rester horizontale, est légèrement inclinée. 

Pendant la détente, la pression éliminant, une partie de l'eau de condensation se re-vaporise en reprenant du calorique aux parois. Au moment de l'échappement, l'intérieur du cylindre arrive en communication avec l'atmosphère, à une pression encore plus faible. 
On peut protéger le cylindre contre le refroidissement extérieur en l'enveloppant de matières calorifuges, comme les conduites de vapeur. Quant au refroidissement intérieur, il est difficile de l'éviter sans augmenter la pression à l'échappement, ce qui entraîne de la contre-pression. Celle-ci développe une puissance négative, qui vient en déduction de celle fournie par l'action de la vapeur sur le piston; cette perte est même plus considérable que celle résultant de la condensation due au refroidissement. 
Un moyen efficace permet de combattre la perte par condensation : la chemise de vapeur. Bien que la machine de Suzanne ne comporte pas de chemise de vapeur, le réservoir intermédiaire participe à garder en partie la chaleur des cylindres. 
Lorsque sous l'action de la détente les parois se refroidissent, la vapeur de l'enveloppe cède de son calorique à celle qui travaille l'intérieur, de manière à rétablir le degré de saturation de cette vapeur, à la pression qu'elle possède. C'est pour cette raison que la courbe de détente d'une machine à enveloppe de vapeur est légèrement plus forte que ne la donne la loi de Mariotte. Elle tombe, au contraire, au-dessous de celte courbe, s'il n'y a pas d'enveloppe protectrice et surtout si le cylindre est complètement nu, c’est-à-dire non isolé. 
Plus l'admission de vapeur est restreinte, plus il y a avantage avec l'enveloppe. 

Le volant
Le volant est une roue métallique dont le diamètre sur le moteur de Suzanne est réduit (diamètre 180 mm, épaisseur 63 mm, muni de 6 trous de 40 mm) à cause du manque de place.
Il est monté sur l’arbre moteur et sert à régulariser l’allure de la machine en atténuant les variations périodiques dues : 

Il joue le rôle d’accumulateur d’énergie mécanique en absorbant sous forme de puissance vive ½ MV2, l’excès d’énergie motrice quand elle se produit, pour la restituer quand l’énergie résistante devient prépondérante. Il participe à la régularité du nombre de tours/minutes (300 tours/mn pour Suzanne) et doit être équilibré.

Appareils de distribution
La distribution est l’âme de la machine à vapeur. C’est elle qui régule la marche et permet une utilisation économique de la vapeur. Le système de distribution de la machine de Suzanne est un système par glissement à tiroir plan, système simple et robuste.

Mise en marche, changement de marche, arrêt

Le mécanicien aura à commander :

L’ensemble du dispositif de distribution de la machine de Suzanne est la coulisse.
La conduite des tiroirs par le seul excentrique, convient à la plupart des machines destinées à tourner dans un seul sens (pompes). Pour celles qui doivent tourner dans les deux sens (locomotives, machines de navigation, machines d’extraction) on fait appel à la coulisse dont le principe est dû à Stephenson.
La coulisse de distribution comporte non pas un mais deux excentriques, disposés symétriquement sur l’arbre moteur et calés avec un angle d’avance ordinaire, un pour chaque sens de marche. Les deux barres d’excentriques s’articulent aux extrémités d’une pièce en arc de cercle appelée coulisse à laquelle elles donnent un mouvement d’oscillation. Dans les rainures de la coulisse est engagé un coulisseau lui même fixé à la tige du tiroir. Un système de levier (changement de marche) tournant autour d’un arbre (arbre de relevage) permet en relevant ou abaissant la coulisse d’impulser au coulisseau la commande d’un des excentriques et donner le sens de marche AV (position basse) ou AR (position haute). 
Il existe d’autres systèmes de coulisse différents de celle de Stephenson.

5. Schéma d’implantation des différents éléments et les organes annexes

Le réchauffeur
Si l’on met la vapeur d’échappement entre en contact avec l’atmosphère, ce qui reste de calorique dans cette vapeur est perdu. Le réchauffeur est un récipient qui permet de récupérer les caloriques de la vapeur d’échappement qui servent à réchauffer l’eau d’alimentation de la chaudière par échange thermique. L’eau d’alimentation en se réchauffant refroidit la vapeur d’échappement, mais cette opération n’est pas suffisante pour obtenir un gain de travail que l’on obtient avec le condenseur.

Le condenseur
Le condenseur est comme le réchauffeur un récipient dans lequel se produit un échange thermique entre les calories de la vapeur résiduelle (35-40°) et une source d’eau froide. Sur Suzanne il s’agit d’un condenseur par surface.

Le condenseur est un simple tube de cuivre de 1200 mm de longueur et de 28 mm de diamètre qui passe sous la coque. La vapeur circulant dans ce tube se condense rapidement au contact de l’eau froide. Cette chute brutale de température produit un vide relatif dont la valeur dépend de la quantité d’eau et de la température initiale de l’eau employée au refroidissement (eau de la Seine).
Cette condensation a pour effet d’abaisser la contre-pression dans le cylindre et d’augmenter la différence de pression sur les deux faces du piston d’où le gain de travail (25%). Les doubles cylindres permettent d’obtenir une plus grande détente, le cylindre BP étant celui dans lequel la vapeur est la plus faible. 
Plus l’eau de condensation est froide, meilleur est le rendement au niveau machine. En revanche pour la chaudière l’alimentation en eau froide diminue son rendement, c’est pourquoi il faut la réchauffer avant de l’introduire dans la chaudière. C’est le réchauffeur qui assure cette fonction.
Dans son livre « Cours de machines à vapeur – moteurs à vapeur » Ecole Spéciales des Travaux Publics – 1919, Monsieur Douat écrit « On adopte souvent, comme bases d’établissement des condenseurs à surface, 0,2 m2 de surface tubulaire par cheval, avec un débit d’eau de circulation de 40 à 50 litres par kilos de vapeur à condenser ». 

Eau d’alimentation Rendement machine Rendement chaudière
chaude diminué augmenté
froide Augmenté (vide) diminué

Au cours du deuxième essai, il s’est avéré que la condensation ne se faisait pas faute de refroidissement du condenseur et au bout de quelques secondes, c’est de l’eau chaude mêlée de vapeur qui était rejetée dans le déshuileur. Cet état s’est senti au fait que la contre-pression au lieu d’être abaissée était contraignante dû au manque de vide créé normalement par la condensation.

La pompe à air
C’est la plus grosse des deux. Elle évacue l’eau du condenseur vers le déshuileur et maintient ainsi le vide dans le condenseur en purgeant l’air contenu dans l’eau de condensation. Le vide dépend de la pression atmosphérique : plus elle est importante, plus le vide est grand. Il se mesure en centimètres de mercure.
Le volume de la pompe à air est de 0,042 litre et son débit est de :

8,5 litres 200 t/mn
10,61 l  250 t/mn
12,74 l 300 t/mn

Le déshuileur
Réceptacle de l’eau évacuée par la pompe à air, le déshuileur est un ensemble filtres qui permettent de séparer l’huile contenue dans l’eau de condensation mélangée à la vapeur qui a traversé les cylindres et l’eau. Une série de trois bacs de décantation permettent d’obtenir une eau relativement pure qui retourne directement dans la bâche à eau. Le troisième bac est en communication avec la bâche à eau en sa partie supérieure.

La vapeur est produite par la chaudière. Elle est introduite dans la machine à l’aide 

La vapeur agit alternativement sur le piston HP puis sur le piston BP . 
Elle passe ensuite dans le réchauffeur où elle transmet une partie de sa chaleur à l’eau d’alimentation de la chaudière en perdant du calorique puis traverse ensuite le passe-coque qui fait office de condenseur 
où elle se condense en produisant un vide.
L’eau de condensation est reprise par la pompe à air qui évacue l’air contenu dans l’eau et la propulse vers le déshuileur , qui par une succession de filtres, sépare l’huile de cylindre contenue dans la vapeur, puis dans l’eau de condensation de cette même eau qui retourne à la bâche.
La vapeur utilisée doit être remplacée dans la chaudière pour assurer la pérennité du travail à fournir. On sait que la propriété d’une chaudière est de transformer l’eau en vapeur sous l’action du feu. Pour introduire l’eau dans le générateur, deux systèmes sont mis en oeuvre.

La pompe d’alimentation est actionnée par la crosse. Elle pompe d’eau à partir de la bâche et la fait traverser le réchauffeur où sa température s’élève par échange thermique avant d’être introduite dans la chaudière en passant par la vanne 3 voies d’alimentation
Son volume est de 0,01 litre et son débit de :

2,12 litres 200 t/mn
2,65 l 250 t/mn
3,18 l  300 t/mn

C’est le mode d’alimentation par défaut de la chaudière. Il est stable et régulier. Si le niveau d’eau est trop haut, il faut alors que l’eau de la pompe retourne à la bâche. Dans ce mode d’alimentation, l’eau est introduite que si le moteur tourne.
Si le moteur ne tourne pas et que le niveau d’eau est trop bas, il faut alors avoir recours à l’injecteur pour combler le déficit en ayant soin préalablement de positionner le sens d’introduction à l’aide de la vanne trois voies d’alimentation. L’injecteur nécessite une pression suffisante pour agir. 
La conduite de l’alimentation est une des fonctions les plus sérieuses et plus délicate du chauffeur.

La vanne trois voies d’alimentation en eau
La vanne trois voies d’alimentation est une vanne en T. Elle a deux positions possibles :


En amont elle est pourvue 

Ne pas oublier de l’ouvrir avant la mise en service.
Concernant la conduite du feu, on rappellera simplement que le feu doit toujours être clair et que l’alimentation en combustible doit être « peu et souvent ».

6. Outillage et fournitures relatifs à la machine et à la chaudière

  • Un crochet,
  • Un rouable,
  • Une pelle à charbon,
  • Tube deux parties pour l'extraction
Sous le plancher avant bâbord
  • Graisse Belleville
Sous le plancher milieu bâbord
  • Un vireur,
  • Plusieurs joints de ½ pouces,
  • Trois joints de 1 pouce,
  • Clés plate de 10, 17, 19, 23, 36,
  • Clé à pipe de 19,
  • Clés à molette grande
  • Clé à molette moyenne,
  • Clés à laine de 3/16 et de 5/16,
  • Une pince à  épiler (du Docteur Veslot) pour extraire les clapets des pompes,
  • Un marteau moyen,
  • Deux glaces de niveau,
  • Un gant de protection « haute température »,
  • Deux gants
  • Un briquet,
  • Une cordelette nylon pour placer les grilles,
  • Sifflets
  • Multiprises
  • Raccord Gardena mâle/mâle
  • Couteau de peintre
Caisse à outils
  • Une hache
Soute à bois
  • Un seau métallique à cendre, serpillière, chiffons
Étrave
  • Une gamelle pour le trop plein de l’injecteur,
  • Une burette huile de mouvement,
  • Une burette huile de cylindre HT,
  • Un bidon huile de mouvement,
  • Un bidon huile de cylindre HT,
  • Un bidon de Kebo
  • Une seringue,
  • Une éponge, 
  • Paille de fer fine pour astiquer les cuivres,
  • Miror, 
Dans le seau métallique
  • Une pompe d’exhaure,
  • Boite à douilles
  • Un tuyau de remplissage, 
  • Raccord Gardena mâle/mâle
sous le siège arrière

7. Conduite de la machine

La conduite de la machine doit être confiée à un homme qualifié dans cet art. En prenant son service, le mécanicien doit tout d’abord se livrer à une inspection détaillée de la machine afin de voir si elle est suffisamment graissée ou si elle ne présente pas un défaut caché ou un commencement d’avarie (desserage d'écrou), jeu intempestif, etc.). 

Avant l’allumage, il convient de :

Allumer le feu dans le foyer 

Pendant l’allumage

À cette pression la machine peut être mise en marche. Ouvrir les différentes vannes de la nourrice et la vanne trois voies d’alimentation (position en haut).

Avant la mise en marche de la machine

marche avant marche arrière
commande de marche en haut commande de marche en bas
Vilebrequin aux 2/3 haut à tribord Vilebrequin aux 2/3 haut à bâbord

Une ouverture brutale du régulateur peut entraîner un coup d’eau (entraînement d’eau dans le cylindre et on sait que l’eau n’est pas compressible). 
Si le démarrage de la machine ne s’effectue pas, ouvrir le régulateur et changer de marche jusqu’à ce que la machine tourne, puis choisir le sens de marche voulue et ajuster l’ouverture du régulateur.

Côté mécanique, 

il faut graisser 

Le mécanicien doit être attentif à tous les bruits insolites, localiser leur emplacement et essayer de les identifier. Arrêter la machine si nécessaire. Hormis le choc dû au jeu des pièces mobiles dont l’apparition est progressif, tout autre choc ou claquement doit être examiné avec attention. Les chocs ou claquements sur les pièces d’inertie sont les plus dévastateurs.
Il existe également des chocs dus aux coups de béliers (pompe alimentaire) et à l’accumulation d’eau dans les cylindres. Dans ce cas il faut ouvrir les purgeurs sans tarder.

Pendant la marche, surveiller :

Si le niveau d’eau baisse, il faut ré-alimenter la chaudière en eau. Deux cas de figure se présentent :

Lorsque le niveau est de nouveau satisfaisant, remettre le levier de la vanne dans sa position initiale (horizontale).
Une fois par service, purger le niveau d’eau.

Pour l’arrêt en fin de service

En fin de service plus aucune braise ne doit rester dans le foyer. 

Si la chaloupe doit être allumée le lendemain, laisser la pression descendre d’elle-même. Si la fin de service correspond à une sortie de l’eau, laisser s’échapper la vapeur jusqu’à ce que la pression soit retombée à zéro.
Dans les deux cas, toutes vannes en contact avec la chaudière doivent être fermées, sauf celle du manomètre.

Conclusion
En écrivant ce manuel, nous avons cherché à rendre service à ceux qui auront à conduire « Suzanne » pour leur propre plaisir et celui qu’ils donneront à ses admirateurs.
Pour rédiger ces quelques lignes, nous avons du consulter de nombreux ouvrages qui ont fait autorité en la matière dont celui de Monsieur Henry Mathieu, Contrôleur Principal des Mines qui fut inspecteur des appareils à vapeur de la Seine et qui dès le début du vingtième siècle s’est efforcé de transmettre son savoir à travers un cours de thermodynamique destiné aux chauffeurs-mécaniciens d’appareils à vapeur.
Carnot disait : « La vapeur est à notre époque une force vive du progrès pacifique ». Avec Suzanne les membres de Sequana ont su redonner vie à cette force et réanimer cette machine merveilleuse.
Il nous est infiniment agréable d’adresser nos remerciements à tous ceux qui de près ou de loin ont contribué à la rédaction de ces quelques pages et principalement à Monsieur Georges Schlindler, sans qui cette aventure passionnante n’aurait jamais pu être partagée par toute l’équipe de Sequana.

Marc André DUBOUT et Jean-Jack GARDAIS
fin 2006


Sources

  • Notions sur les machines à vapeur - Anguenot - Ed. Ecole spéciale des Travaux Publics - 1925
  • Manuel du chauffeur de chaudières - Kammerer - Ed . Berger-Levrault – APAVE – 1958
  • Manuel du chauffeur-mécanicien et du propriétaire d'appareils à vapeur – Mathieu – Béranger - Librairie polytechnique –  - - 1902
  • Mes Maîtres et mon expérience des machines à vapeur.

 

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