Nos écrits de janvier 2023

Intérieur en extérieur 

La petite fille déambule dans sa maison de poupée à ciel ouvert.
Elle écoute le vent léger qui ébouriffe gentiment ses cheveux bouclés.
Il chuchote à son oreille de joyeux et tendres mots.
Les branches des arbres, au diapason, ondulent et chantent une douce mélodie, comme si les anges s’amusaient à donner le tempo.
Même les oiseaux ont suspendu leurs gazouillis pour apprécier le temps suspendu ! L’atmosphère baigne dans une agréable quiétude et la petite fille y est très sensible.

Elle aspire à jouer à la maman dans cet endroit fait de bric et de broc.
La décoration désuète a été péniblement installée, tout au long de l’été.
Ses yeux s'approprient chaque parcelle de cet endroit. 
Elle est fière de ses trouvailles composées de meubles abimés, recouverts de verdure pour cacher les dégâts occasionnés par le temps.
Toutes ces vieilleries composent le décor de la pièce de théâtre qu’elle joue ; 
Elle, dans son propre rôle avec, comme figurants, sa collection d’amis retrouvés dans le grenier : nounours mi aveugles, pelage lustré, poupées habillées d’étoffes défraichies avec des cheveux coupés, brulés, baigneurs cassés, marionnettes désarticulées, décousues par trop de manipulations. 
Installés au gré des humeurs quotidiennes de la demoiselle, ils trônent assis, couchés, de guingois sur la pelouse rabougrie par la chaleur. 
Ils semblent indifférents à sa rêverie, mais elle aime penser qu’ils l’implorent de les prendre dans ses bras pour les faire encore revivre quelques aventures épiques. 
Ce lieu est son trésor. Lorsqu’elle l’investit, la magie s’opère, ses pensées fourmillent de scénarios pour faire jouer tout ce petit monde délaissé à qui elle attribue un rôle bien défini. 
Sa solitude d'enfant crée un monde imaginaire. Moment magique, libre, léger, heureux, 
Son regard accroche deux papillons qui virevoltent en effectuant de gracieuses boucles, l’un copiant l’autre et vice et versa. 
Tout à coup changement de rythme, l’ambiance ouatée disparait et laisse place à une symphonie naturelle : braiment d’un âne, bêlement de moutons, abeille bourdonnante, 
et contre toute attente, chant du coq . La réalité reprend sa place tout doucement.

Elle sourit car elle se sent bien, en osmose avec tout ce qui l’entoure. 

Patricia Dalhoumi

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