Images de la ligne

La ligne Rueil-Gare—Port-Marly devenue Paris—St Germain-en-Laye puis ligne 58
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Marc André Dubout

Le deuxième chemin de fer à traction vapeur

Des chevaux à la vapeur - Le T.V.R.M.R.
Reconstruite à voie normale, la voie était cette fois en accotement des routes et un prolongement vers Marly-le-Roi de 1,935 Km amenait le nouveau terminus à l'Abreuvoir de Marly après avoir franchi des rampes successives de 50 et 70%o.
Un dépôt fut construit à Port-Marly à l'emplacement de l'ancien terminus. Le dépôt construit en 1876 abritait le générateur de vapeur pour le rechargement des locomotives Francq. La chaudière horizontale, timbrée à 16 bars, était capable d'alimenter quatre machines par heure. Ce dépôt disparut définitivement à la fin du XXè S. Le Directeur technique de la compagnie, M. Francq 5 était aussi ingénieur chez Cail et se préoccupait de la locomotive à "eau chaude" 6 inventée par Lamm 7 en Amérique. C'est ainsi qu'en 1877 une machine Francq sans foyer fut expérimentée et mise en service pour la première fois.
La ligne Rueil—Marly-le-Roi fut mise en service en 1878 et fit très vite la démonstration de l'utilité du chemin de fer urbain d'intérêt local. Rapidement le trafic se développa et les machines Francq se révélèrent vite insuffisantes quant à la puissance développée dans la rampe de Marly.
Quatre autres locomotives à foyer l'accompagnèrent : deux Corpet et deux Tilkin-Mention 8 à chaudière verticale très typiques. Ultérieurement quatre autres machines destinées au tramway de Versailles furent refusées et par conséquent exploitées sur la ligne de Rueil—Marly-le-Roi relayant les précédentes à la réserve.
Le matériel remorqué était constitué de quatre voitures AB (ex Traction hippomobile), six voitures ouvertes de 28  places assises plus deux fourgons (D101 & 102).
En 1889 la compagnie obtint l'autorisation de construire deux prolongements : en direction de St Germain-en-Laye et en direction de Courbevoie. 
Le 18 août le Tramway à vapeur de Paris à St Germain (P.S.G.) était créé.


Dans la séance du 18 mai 1872 du conseil municipal de Rueil, un projet de transformation du chemin de fer américain est présenté par la commission nommée à cet effet avec les questions se rattachant à cette transformation : traction vapeur, tracé, tarif, obligations, etc.). Cette commission comporte cinq membres et son rapporteur est Monsieur Herbette. Après avoir pris connaissance et examiné tous les documents administratifs s'y rapportant, elle fait un rappel de la concession de 1854 accordée à Monsieur Mazenod créateur et exploitant de la première ligne dit de "tramway américain" dont la concession prend fin en 1884. Après quoi la commission s'est rendue sur le terrain pour étudier la faisabilité du nouveau tracé proposé par Monsieur Tarbé des Sablons nouveau concessionnaire. Ce rapport comporte trois parties :

L'exposé du projet de Monsieur Tarbé des Sablons est contenu dans un document incluant l'exposé de la transformation du chemin de fer à traction hippomobile en traction de locomotive établi sur les mêmes voies que celui du précédent concessionnaire le Vicomte de Mazenod et s'étendant de Rueil-Gare à Marly-le-Roi-Abreuvoir. Ce document est adjoint d'un exemplaire de l'arrêté préfectoral prescrivant une enquête d'utilité publique. La principale modification réside dans le tracé entre Rueil-Gare et Rueil-Ville abandonnant le tracé par l'avenue de Chatou (GC 39). Le préfet attire l'attention du maire sur cette modification de tracé lui laissant le soin de retenir la meilleure solution.

Ce document annoté du 21 février 1878 rappelle le contenu du cahier des charges faisant suite au décret du 28 août 1874.
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PSG
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Le 10 novembre 1888, M. Léon Francq écrit au maire du Pecq au nom de Monsieur Tarbé des Sablons pour demander que l'affichage de l'enquête d'utilité publique soit assuré.
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Les deux tracés 
  • en vert celui du chemin de fer américain du Vicomte de Mazenod par l'avenue de Chatou (puis devenue avenue du Chemin de fer en 1867, aujourd'hui avenue Albert 1er)
  • en rose celui de Tarbé des Sablons par l'avenue Victor Hugo.
psg162.jpg (47039 octets) psg163.jpg (20881 octets)Le tracé de la ligne en 1879 d'après Louis Lagarrigue Directeur du réseau Routier de la R.A.T.P.

Dans  le premier projet de M. Tarbé des Sablons le tracé de la gare du chemin de fer de Paris à St Germain à la Route Nationale n°13 restait inchangé mais les inconvénients étant "si nombreux et graves" que l'opinion publique s'en est émue d'une sorte telle qu'une seconde proposition de tracé annula la première.
Le nouveau tracé prend naissance au droit de la gare de chemin de fer de Paris à St Germain par une boucle en raquette9 avec deux voies de dégagement pour la manœuvre des wagons. Deux escaliers permettront aux voyageurs d'assurer confortablement la correspondance. À partir de ce point la voie contourne la décharge publique de la ville puis se dirige vers Rueil par le chemin des Graviers (sans l'emprunter) et rejoint le chemin du Vieux Pont qu'elle suit en accotement gauche  jusqu'au terrain de Madame Béquet qu'elle traverse en biais pour arriver à la rue des Bois et débouche sur la route nationale n°13.
Parvenue à la Route Nationale 13 la voie la coupe par une courbe assez serrée au niveau de la rue Maurepas  pour s'établir sur le trottoir du côté gauche. Elle suit la RN 13 jusqu'à la route de Bois Préau entre la rangée d'arbres et les habitations à une distance de 2,70 m. des murs. À cet endroit précis elle traverse à nouveau la route et rejoint l'emplacement de la voie du tracé précédent10.De l'avenue de Bois Préau à la Pointe de Bougival les deux stations Bois Préau et La Malmaison sont supprimées et remplacées par celle des Trianons. La station de Maison Rouge est également supprimée.
Ce nouveau tracé sur la commune de Rueil fait l'objet d'un rapport de l'ingénieur ordinaire des Ponts & Chaussées et de l'agent voyer. Dans ce rapport du 19 avril 1872 de l'ingénieur ordinaire des Ponts & Chaussées qui s'occupe des routes nationales (RN 13 & 184), il est stipulé que :

et en marge

Le rapport de l'agent voyer attire l'attention du lecteur sur  l'inquiétude que ces machines ne seront pas sans conséquence sur les attelages ordinaires et demande à ce que les circulations soient espacées. Il se réserve en outre des questions de détail lors de l'établissement de la voie.

Si la Commission reconnaît les avantages dudit projet, elle émet certaines réserves concernant la commune de Rueil qui ne pourra bénéficier ni de l'augmentation de capacité des voitures sur une si faible distance sur son territoire, ni en terme de réduction de temps de trajet, le tracé par l'avenue Victor Hugo augmentant sensiblement la distance par rapport au tracé par l'avenue de Chatou. La commune, n'en retirant pas des bénéfices probants, ne veut pas a contrario en avoir les servitudes et inconvénients. Aussi souligne-t-elle que le déplacement de la station de Rueil-Ville l'éloigne de la rue Maurepas "qui est la grande voie de communication du pays"  et que la suppression des arrêts de Bois Préau, de la Malmaison et de Maison Rouge ne profite guère à la commune. En revanche elle est plus déterminée quant au changement de côté de la voie entre Rueil-Ville et Bois Préau. En effet l'accotement gauche est celui qui implique par deux fois la traversée de la RN 13 par la voie du tramway, décision qui fut déjà rejetée en 1855 par une décision ministérielle. L'accotement gauche est celui qui reçoit les plus de voies, rues et routes. Aussi aucune entrave et aucune gêne ne doivent y être apportées. Ce serait un danger permanent pour les voitures et pour les piétons sans compter les conduites d'eau et de gaz qui s'y trouvent. Pourquoi changer un état de choses accepté par la population ?  Entre l'avenue du Bois Préau et Bougival la commission insiste sur l'élargissement de la voie, le tramway à traction de locomotives nécessitant plus d'espace que celui par la traction par chevaux.

En conclusion :

Le Conseil municipal exprime ses remerciements pour cette lecture du projet et "approuve dans tout son entier" le rapport de la Commission à l'unanimité.
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En 1874 la Compagnie des Tramways Nord propose de prolonger sa ligne Arc de Triomphe (Paris)—Pont de Neuilly vers le tramway de Rueil à Port-Marly en suivant la Route Nationale 13. Le conseil municipal de Rueil ne peut être que favorable à ce prolongement reliant Rueil directement au quartier de l'Arc de Triomphe et émet un avis favorable après examen du plan.
En 1875, en raison du mauvais état du Chemin de fer américain, le maire assisté de ses conseillers municipaux demande la suspension du service et la déchéance de Monsieur Tarbé des Sablons, la compagnie n'ayant jamais donné satisfaction aux plaintes fondées et répétées. 
Mais ceci est un autre sujet qui concerne davantage la ligne de tramway à vapeur de Paris à St Germain devenue ligne 58 des T.P.D.S.

Le 7 novembre 1875, trois ans seulement après l'établissement du chemin de fer à traction à vapeur, le conseil municipal, étant donné que :

  • le service a depuis plusieurs années provoqué des plaintes,
  • l'administration de ce chemin de fer n'a pas donné de sérieuses satisfactions, 
  • le service se fait dans des conditions déplorables, voire dangereuses, pour la sécurité du public,
émet le vœu que Monsieur Tarbé des Sablons soit déclaré déchu de la concession de ce chemin de fer et qu'il soit tenu d'installer un service d'omnibus ou de remettre en complète exploitation le chemin de fer jusqu'au statut de sa déchéance.

En 1876, M. Tarbé des Sablons demande la cession du terrain de la Sablière pour l'établissement de la gare du chemin de fer à traction à vapeur. M le maire nomme une commission pour l'assister dans ladite cession. Le concessionnaire montre un plan de la parcelle en question et requiert une cession à l'amiable au prix de 0,75 francs le mètre carré pour une superficie totale de 2500 m2. Il précise qu'il a déjà acquis une parcelle auprès de la Compagnie de l'Ouest11. M. le Maire s'engage à donner la solution la plus prompte à la requête de M. Tarbé des Sablons mais fait remarquer des différences avec le plan de 1872, différences qui demandent l'examen du conseil municipal.
Enfin le Maire assisté de trois conseillers accepte avec quelques réserves qu'il expose au demandeur. Cela concerne la pose des voies qui devront être le plus près possible du talus de la Compagnie de l'Ouest et que la liaison entre les deux chemins de fer "devra être fournie aux voyageurs" par un escalier double.



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Le 14 novembre 1877 le conseil est invité à donner son avis sur l'emplacement des stations entre Rueil-Gare et Marly-le-Roi selon l'enquête ouverte le 13 décembre 1877 par la Préfecture de Seine-&-Oise. L'emplacement est approuvé dans son ensemble par les membres du conseil. Deux oppositions apparaissent : celle pour la fusion des stations de La Malmaison et Bois Préau ; celle contre. 
Le détail



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Le 20 mai 1878 le conseil municipal a émis des vœux relatifs à des améliorations à apporter à l'exploitation au service du tramway. Vœux transmis au préfet qui a donné des mesures à prendre et qui sont restées sans effet. Parmi ces demandes celle principalement d'imposer au concessionnaire de desservir  tous les trains directs qui s'arrêtent à la gare de Rueil et d'avoir des voitures spéciales en quantité suffisante pour desservir les dimanches, les jours de fête et d'affluence toutes les stations et points d'arrêt sur le territoire de Rueil et imposer au moins un service égal à celui du chemin de fer américain. En effet il a été constaté que nombre de voyageurs qui attendaient à la station de la Malmaison, à la halte de Bois-Préau n'ont pas pu monter dans le tramway du soir (9 h, 10 h et 11 heures) et par conséquent n'ont pas pu prendre le train de Paris à Rueil-Gare.

Le nouveau tramway est inauguré le 15 avril et dès le mois de mai 1878, des lacunes et imperfections apparaissent réunissant le conseil municipal dans une session au sujet du tramway à vapeur. Notons au passage que la dénomination de chemin de fer américain a disparu des textes et remplacée par celle de tramway à vapeur. L'exécution des travaux est largement en retard et l'exploitation en a été "improvisée". Les remarques suivantes sont consignées :

  • Sur la voie
    Les rails paraissent manquer d'aplomb et la voie est mal réglée ce qui entraîne des soubresauts dans la marche des trains et des secousses pour les voyageurs.
    L'écoulement des eaux est interrompu à l'endroit où est posée la voie et les trop-pleins ne sont pas apurés, le caniveau ne présentant pas un débit suffisant notamment à l'embranchement de la rue de Paris et de la rue de Bois (Rueil-Ville) et de la rue qui sépare le territoire de Rueil de celui de Bougival.
    À la traversée des chemins et voies publiques la voie s'est rehaussée provoquant une gêne et une détérioration pour les véhicules et demande un remaniement complet.
    Le pavage devant les issues de propriété des riverains n'est qu'incomplètement établi ou dans une largeur insuffisante.
    Au moment de la transformation du chemin de fer américain en tramway à vapeur, le conseil s'étant ému de la dangerosité de la traversée des rues et avenues, il avait été demandé que des barrières y fussent établies avec un gardien à poste fixe pour les ouvrir et les fermer à l'approche des trains, ainsi que des feux de couleur à la croisée des chemins. Les différents points concernés sont examinés.
    L'éclairage des stations sera également à établir afin que le public soit averti de leur existence.
  • Sur le matériel
    L'inconvénient majeur du chemin de fer américain était l'insuffisance de matériels laissant certains voyageurs sans possibilité de monter. Avec le tramway à vapeur on observe déjà des voyageurs ayant acquitté un billet de première ou de deuxième classe et voyageant dans le fourgon des bagages.
    Les machines que l'on espérait sans bruit, ni fumée ne présentent aucun de ces avantages surtout pour les voyageurs qui occupent la première voiture suivant la machine. Il conviendrait d'interposer un fourgon entre la machine et le première voiture.
    Dans toutes les voitures, les places situées sur les plate-formes seraient assimilées à une place de deuxième classe. 
  • Sur l'exploitation
    Les trains à vapeur ne desservent pas tous les trains de 11 heures du matin à 8 heures du soir allant à St Germain alors que le chemin de fer américain assurait ce service. De plus, alors que le chemin de fer américain partait après l'arrivée du train, la machine doit refaire une remise en tête avec un arrêt pour faire de l'eau et du charbon, entraînant un retard considérable.
    Le service de Port-Marly à Marly-le-Roi n'est pas garanti notamment le dimanche et l'unique voiture est largement insuffisante pour le nombre de voyageurs. 

Le détail

Un membre du conseil municipal relate un accident grave ayant entraîné la mort d'un voyageur à la suite de ses blessures. Ce voyageur a voulu monter dans le tramway alors qu'il était en marche. Plusieurs membres font remarquer que certains établissements riverains de la ligne ont établi sur les bas-cotés de la route nationale de petits réduits garnis de caisses et d'arbustes, de chaises et de tables destinées à leur clientèle ce qui oblige les passants à traverser la voie ferrée pour se garer du passage du tramway. Le conseil souhaite voir disparaître ces dispositions jugée dangereuses.

En décembre 1879, l'irrégularité du tramway et la suppression sans motif de trains font l'objet d'une plainte modulée par l'ingénieur ordinaire qui voit en ces faits l'inconvénient d'une saison particulièrement rigoureuse. La suppression de quatre trains a été due au fait que la prise d'eau en Seine n'a pu être faite à cause du gel et "Qu'à neuf heures du soir, il n'était plus possible de puiser l'eau à la main comme on le faisait pendant le jour". C'est dire si l'hiver a été rigoureux cette année-là.

Le 22 décembre 1880 M. Van Smschoot Roos adresse au conseil l'information selon laquelle il a déposé à l'administration des Travaux Publics une demande de concession d'une ligne de tramway allant de la Porte des Ternes à Rueil en passant par l'avenue du Roule,  rue du Château, l'avenue de Neuilly, l'avenue de St Germain, le rond-point de Courbevoie et la Route Nationale 13.
Le conseil accueille très favorablement ce projet d'autant que tous les autres de même nature n'ont jamais abouti. En effet, à l'unanimité le conseil reconnaît le grand avantage d'une telle ligne pour Rueil.

Le 7 novembre 1881, un autre projet, celui de M. Bellema, propose la création d'une ligne de tramway de grande banlieue de Paris à Mantes avec trafic marchandises et demande au maire de Rueil des statistiques sur le potentiel agricole et industriel de la commune et de celles environnantes. Une telle étude avait été menée quelques années en arrière afin d'obtenir de la Compagnie de l'Ouest une gare marchandises à Rueil.

Le 12 novembre 1883, le maire donne lecture d'un autre projet de ligne de Neuilly à Rueil. 

Décidément en cette fin de siècle les projets foisonnent. Il en est de même pour les autres communes de la région parisienne. Nombre de ces projets ne virent jamais leur réalisation.

Le 27 juin 1888 M. Francq5 propose l'examen d'un projet de ligne de la place de l'Étoile à Paris jusqu'à St Germain et sa mise en exploitation sans transbordement avant l'ouverture de l' Exposition Universelle de 1889.

 

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Le 27 juin 1888 le directeur des Tramways Nord12 informe le maire de Rueil qu'il a déposé auprès du ministre des Travaux Publics un projet de tramway de Courbevoie à Rueil et a sollicité sa bienveillance en argumentant qu'il donnera satisfaction aux populations des départements de la Seine et de de la Seine-&-Oise. Il informe en outre qu'une combinaison entre la Compagnie et les Ponts & Chaussées, moyennant une somme de 120 000 F versée à l'administration, faciliterait grandement la construction de cette ligne et en réduirait les délais à six mois. Il est évident que la Compagnie des Tramways Nord Parisiens est la seule à pouvoir permettre l'accès au centre de la capitale sans transbordement et offrir nombre de correspondances aux voyageurs des communes desservies. La demande de concession est jointe à la lettre.

Le 27 juin 1888, nouvelle lettre de M. Francq réclamant l'approbation de sa proposition de création de tramway de Paris à St Germain sans transbordement. La date de l'Exposition Universelle approche et la concurrence entre les créations de ligne s'accroît considérablement.

 
 

Le 4 juin 1888 M. Tarbé des Sablons a transmis une demande de concession d'un tramway de Rueil à Neuilly au Ministre des Travaux Publics. On apprend dans cette lettre que les T.N. mis en faillite ont été écartés de leur demande et que le projet de M. Tarbé des Sablons a reçu un avis favorable de la Chambre de Commerce, que le préfet et l'ingénieur en chef ont appuyé l'avis de la commission d'enquête, enfin que l'administration a conclu à la déclaration d'utilité publique. Le concessionnaire sollicite auprès du Maire que le décret de concession du tramway de Rueil à Neuilly intervienne promptement de manière à ouvrir la ligne avant l'Exposition Universelle. En outre il est question de la prolongation de la ligne du Port-Marly à St Germain sans transbordement ce qui, souligne l'auteur, favorisera la population de Rueil. M. Tarbé propose au maire de solliciter le conseil municipal sans autre enquête d'UP que celle qui a été faite précédemment afin d'accélérer les formalités. Il précise que la Société Générale de Crédit Industriel et Commercial lui prête son concours.
En post scriptum il précise que M. Léon Francq, ingénieur, est chargé par les "capitalistes" et par lui de l'exécution du projet.
Le conseil désigne une commission chargée d'étudier les différentes propositions.
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Le 6 novembre 1888 M. Herbette conseiller général informe le maire de Rueil : dans sa séance du 29 août, le conseil général sur la proposition du préfet appuyait le projet de M. Edmond de Tarbé quant au prolongement du tramway à vapeur vers St Germain et vers Paris en invitant à la prompte solution  des questions s'y rattachant de manière à ce que le nouveau service fonctionne pour l'ouverture de l'Exposition. Universelle.

Le 24 novembre 1888 le Ministre des Travaux Publics invite à ce que la construction du tramway de Rueil à Neuilly soit réalisé dans les plus brefs délais. De son coté il fera tout son possible pour qu'une prompte solution intervienne.


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Le 11 décembre 1888 les opinions divergent au sein du conseil municipal de Rueil quant au nouveau tramway à vapeur de Rueil à Neuilly. Certains membres pensent que les observations relatives au mode de traction et au détail de l'exploitation doivent être faites dès à présent, les autres pensent qu'il vaut mieux attendre que le prolongement soit officiellement décidé et le décret d'application promulgué.
Ce double prolongement vers Paris et vers St Germain étant réclamé depuis dix ans, il y a maintenant urgence à ce qu'il soit réalisé, mettant ainsi Rueil en relation directe avec Paris.
Le conseil émet les vœux qui suivent :
  • que l'ouverture et la mise en exploitation pour l'Exposition Universelle soient fixées au 1er mai 1889
  • que les différentes sections soient placées sous le régime de la loi du 11 juin 1880
  • que les aiguilles soient contenues dans des fourreaux mettant les piétons à l'abri des chutes sur la voie
  • que les frais  de construction des entrées des propriétés privées soient supportés pour moitié par la compagnie et par chaque propriétaire intéressé

Le 19 mai 1889  le projet est approuvé par le Conseil d'État. Le conseil s'en réjouit.

Plan de la ligne en 1890.

Séance du 13 mai 1890, le maire informe le conseil qu'un horaire d'été a été affiché par le Tramway à vapeur de Paris à St Germain pour le service d'été entre ces deux points et comprend en outre un service de correspondance avec le Chemin de fer de l'Ouest.  
C'est donc à partir de cette date que la future ligne Rueil—St Germain par Chatou et Le Pecq est née puisque dorénavant Rueil-Ville—Rueil-Gare n'est plus qu'une antenne de la ligne Paris St Germain. Mais ce changement ne passe pas inaperçu. En effet il s'avère que les deux trains partant de Paris-St Lazare  à 5h30 du soir et à minuit 35, ainsi que ceux partant de Rueil-Gare à 6h38  du matin et à 6h17 du soir ne sont plus desservis par le tramway, ce qui a soulevé un tollé parmi les voyageurs et parmi la population.
Le conseil exige le maintien de tous les trains entre Rueil-Gare et Marly et émet le vœu qu'à l'avenir, les communes concernées soient consultées pour toute modification de service.

Dans sa séance du 21 mai 1890, le maire se fait l'écho des plaintes résultant du désordre dans l'exploitation de la ligne de tramway. Alors que certains conseillers préconisent la reprise de la correspondance entre Rueil-Ville et Rueil-Gare et Port-Marly et Marly-le-Roi, d'autres sont favorables à un service in extenso entre Rueil-Gare et Marly comme auparavant ce qui ne nuirait pas au service sans transbordement du tramway de Neuilly à St Germain.
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Le 4 novembre 1890 suite à une collision, la halte de la "Petite Jonchère" a été déplacée sans enquête ce qui a entraîné la protestation des riverains. De plus, les machines à feu sont critiquées et une demande est faite de chauffer les trains comme mentionné dans le cahier des charges.
L'arrêt facultatif à l'octroi de Rueil est favorable aux fraudes. Une demande d'arrêt obligatoire est adressée.

Le 8 février 1891 le maire donne lecture d'un lettre du Conseil général de la Seine à provoquer d'urgence  des arrangements entre la compagnie des Tramways Nord et la celle du Tramway de St Germain pour que sur le tronc commun les voyageurs puissent y monter à l'aller et y descendre au retour entre l'Étoile et Courbevoie.

18 mars 1891 Le conseil suite à une demande du maire de Puteaux, se prononce favorablement à la construction du pont de Puteaux pour dégager la circulation intensive rencontrée sur celui de Neuilly.

Le 30 mars 1891 le maire est informé qu'en date du 4 mars, la compagnie est autorisée à construire une seconde voie entre le département de la Seine et Rueil-Ville et que ces travaux impliquent le déplacement de réverbères et d'une fontaine à la charge de la compagnie. Le problème est que le déplacement de cette fontaine obligerait les habitants de ce côté de la chaussée à traverser les deux voies pour aller chercher de l'eau ce qui pourrait être dangereux si l'on envoyait les enfants à cette corvée.

 

 

Bien évidemment cette deuxième voie installée sur le trottoir de droite rencontre des hostilités. Souvenons-nous de celle rencontrée lors de la première proposition13 de M. Tarbé des Sablons lorsqu'il avait voulu changer de bas côté lors de la réalisation de son nouveau tramway.
Le conseil du 30 mars 1891 souligne que l'établissement de cette deuxième voie a été décidé sans faire l'objet d'une enquête préalable.

Toujours est-il que cette deuxième voie a été construite rapidement.

Le 20 mai 1891, lecture est donnée d'une lettre de Monsieur Francq soumettant un projet de ligne de tramway à vapeur partant de la Boule Royale (Nanterre) au pont du Pecq. M. Hervet pense que ce projet est tout à fait secondaire pour la ville et viendrait emprunter le tracé du Paris St Germain au risque d'en compromettre sa régularité et qu'il est préférable d'attendre les décisions des communes concernées.
Il s'agirait là de la première ébauche de la ligne de Rueil-Ville à St Germain par Chatou et Le Pecq.

Le 20 juin 1891 il est question d'une deuxième voie entre la halte de Maison Rouge de la Petite Jonchère et la halte de la Chaussée à Bougival.

21 juillet 1891. L'établissement de cette deuxième voie est en violation des lois et règlement qui régissent l'exploitation des voies ferrées sur les voies publiques. Cependant l'enquête est close et le conseil est amené à donner son avis sur le projet. Le conseil s'associe aux protestations et repousse les propositions de la compagnie du Tramway de Paris à St Germain.

11 septembre 1891. Le maire donne lecture des lettres émanant des communes de Nanterre, Chatou, Le Vésinet, Le Pecq qui sont toutes favorables à l'établissement de cette ligne de tramway proposée par M. Francq allant de la Boule Royale (Nanterre) au pont du Pecq. Le conseil à l'unanimité pense que la ville de Rueil n'a rien à gagner avec l'installation de cette nouvelle ligne.

 

1er février 1892. Une enquête a été lancée sur la suppression des certaines haltes sur le territoire de Rueil dont celle dite de l'octroi qui en fait est située à plus de 100 m. sur le territoire de Nanterre et non pas à la limite des deux départements 14.
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Les horaires de 1892.
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17 mars 1892. Il est question de la suppression du gardiennage du passage à niveau de la rue du Chemin de fer. La municipalité avait demandé en 1878 qu'une chaîne soit tendue au passage des trains afin d'éviter des accidents. Il se trouve que dans le nouveau cahier des charges, la compagnie n'est plus tenue à cette obligation. Le conseil fait remarquer que l'article 10 bis joint au cahier des charges annexé au décret du 13 juin 1889 actuellement en vigueur pour l'exploitation de la ligne stipule que "la ligne de Rueil à Marly -le-Roi ne subira dans son établissement aucune modification autres que celles qui seraient reconnues nécessaires par le concessionnaire et qui seraient approuvées par le Ministre des Travaux Publics".
À l'unanimité le conseil demande le maintien intégral de ces prescriptions.

 

7 juin 1892. Une quarantaine d'habitants du quartier du pont demandent une halte au carrefour des Graviers.
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Dans sa séance du 25 mars 1896 le Maire de Rueil rappelle au Conseil municipal qu'à l'occasion de la Fête du 14 juillet, M. le Préfet de Police interdira la circulation des voitures publiques à partir de 8 heures du soir à l'intérieur de la capitale, en conséquence de quoi, les trains auront la barrière de la Porte Maillot pour terminus privant ainsi les habitants de la banlieue Ouest. Il signale que cet état de choses est très préjudiciable aux intérêts de la commune et contraire au décret du 13 juin 1889.

Le 18 juin 1898 une mesure impose à la Compagnie de faire monter les voyageurs à droite du train ce qui présente pour la commune de Rueil un inconvénient grave obligeant les voyageurs à traverser la voie et les faire attendre sur la route Nationale dans un endroit où la circulation est très active. De plus par temps de pluie, ils ne seront pas abrités.

Le décret préfectoral du 8 avril 1896 décide que la halte de Maison Rouge serait maintenue à son emplacement actuel. Le Maire demande à ce qu'elle soit reportée à l'angle de la rue des Closeaux sur la proposition d'un groupe d'habitants de ce quartier et rappelle que la Compagnie avait émis un avis favorable à ce déplacement.


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Le 8 septembre 1896 le Maire de Rueil donne lecture d'une circulaire de l'administrateur délégué de la Société du Tramway de St Germain à Poissy demandant que le terminus de St Germain soit reporté place du Château donc en correspondance avec le P.S.G.

L'année suivante la demande est réitérée.
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Une enquête d'utilité publique est ouverte concernant un projet de ligne de Courbevoie au Pecq à traction mécanique Cette ligne empruntera la route nationale 190. le maire souligne que cette liaison n'apportera rien à la commune de Rueil.
ligne60p_009.jpg (40945 octets) Cependant il est à noter que le tracé reprend en partie ce qui sera construit ultérieurement, à savoir : nouveau tracé de la Boule d'Or au Pont de Chatou et ensuite ce qui deviendra la ligne 60 jusqu'au Pecq.

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Notes :
  • 5 Léon Francq introduisit en France, en la perfectionnant notablement, la machine sans foyer mise en service par le docteur Émile Lamm sur les tramways de la Nouvelle-Orléans à Carrolton.
    Il est l'inventeur d'un procédé de moteur à vapeur pour locomotive fonctionnant à la vapeur comprimée. 
    Francq était par ailleurs concessionnaire des tramways de Versailles.
    Il participa aussi aux études du métropolitain de Paris.

  • 6 Le réservoir de vapeur soigneusement isolé, situé sur la locomotive, et constitué d'un réservoir en grande partie rempli d'eau que l'on échauffe progressivement par un courant de vapeur de manière à la porter à 200°, ce qui correspond à 15 atmosphères de pression (le temps de remplissage des machines utilisées sur la ligne Rueil - Marly durait vingt minutes pour un réservoir de 1800 litres) ;
    Un détendeur automatique dans lequel se rend la vapeur sortant du dôme, ce détendeur permettant de détendre la vapeur pour la mettre à la pression d'utilisation des pistons ;
    Une distribution et des cylindres avec leurs pistons classiques permettant toutefois de faire usage de la détente, ce qui n'existait pas dans les machines primitives de Lamm.
    Un condenseur à air  permettait d'économiser l'eau de la vapeur, et de limiter fortement le bruit de l'échappement.
    La vapeur surchauffée était produite dans les dépôts par des chaudières industrielles, plus efficaces que les chaudières tubulaires utilisées dans les chemins de fer

  • 7 Émile Lamm est né en France et émigre aux États Unis en 1848 où il dépose divers brevets dans le domaine de la médecine dentaire et s'oriente vers le moyen d'améliorer le fonctionnement des locomotives de tramways de la ville de la Nouvelle Orléans en Louisiane.
    Le tramway de Lamm circule à la Nouvelle Orléans et est propulsé par un moteur au gaz d'ammoniaque. Le docteur Lamm s'oriente vers deux voies : le moteur à ammoniaque qu'il applique sur des locomotives de tramway et les locomotives à vapeur sans foyer.
    Il développe une locomotive sans foyer et crée les sociétés : Ammonia & Thermo-Specific Propelling Company of America, le 27 mai 1872, après des essais de locomotives munies de moteur au gaz d'ammoniaque et Lamm Fireless Engine Company, le 10 décembre 1874, en s'associant avec Sylvestre L. Langdon, détenteur de plusieurs brevets sur les locomotives sans foyer.
    Son système est appliqué à la Nouvelle Orléans, Saint-Louis et New York. L'ingénieur Léon Francq va développer le système en Europe.
  • 8 Tilkin-Mention à Liège, société de construction de locomotives et de ponts.
    Machine à chaudière verticale de 6,5 t. en ordre de marche et développant un effort de traction de 830 kg.
  • 9 La boucle en raquette se retrouve sur le chemin de fer de Sceaux à la gare terminale de Denfert-Rochereau
  • 10 Ce tracé est différent de celui réalisé dont les parcours est station de Rueil, Rueil-Ville, Bougival et Port Marly avec extension ultérieure à Marly (l'Abreuvoir).
  • 11 La Compagnie de l'Ouest exploite la ligne Paris—St Germain depuis 1837. Il 'agit de la première ligne de chemin de fer pour voyageurs en France
  • 12 Le T.N. Tramways Électriques Nord parisiens

    13 Cette voie a fait l'objet de rejet.
  • 14 À l'époque, Rueil était situé en Seine & Oise et Nanterre dans le département de la Seine.

Sources :

  • Les tramways parisiens 2è Édition - Jean Robert - 1959.
  • Archives municipales de Bezons
  • Le Petit Journal
  • CFRU n°122 & 123 - 1974-2-3
  • Archives municipales de Rueil-Malmaison
  • Archives municipales de Chatou
  • Archives municipales du Pecq
  • Cent ans de transports en commun dans la Région Parisienne Tome 3 - Album de plans (1662-1890) - Louis Lagarrigue - 1956
  • Wikipedia

Sites :

 

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