Decauville, et le chemin de fer de Royan  - 2/6

Marc André Dubout

Le petit train Decauville (Royan)


Quelle plus belle image que cette photographie vendant les "Trains de loisir". La 021T Decauville arbore sur sa porte de boîte à fumée un calicot, comme les Britanniques aiment à le faire, sur lequel est écrit "Trains de loisir". 
À gauche la boutique évoque le même thème.

Lors de l'Exposition universelle de 1889, Frédéric Garnier, maire de Royan emprunte le Decauville. Il est subjugué, par ce matériel roulant sur une voie de 60 cm de large. C'est exactement ce qui correspond à ce que la municipalité de Royan attendait. 
Victor Billaud, journaliste et imprimeur, va l'aider en communiquant sur le projet. Le photographe Fernand Braun contribuera au succès du tramway en éditant de nombreuses cartes postales le représentant. 
À la fin de l'exposition universelle de 1889, le matériel Decauville qui avait œuvré pendant les six mois de l'exposition était disponible et Paul Decauville en homme d'affaires averti, entendait bien le vendre et appliquer son système en obtenant de la municipalité l'autorisation de l'implanter.
Decauville avec des fonds propres est prêt à venir installer son chemin de fer et exploiter un premier tronçon entre la halte de la Falaise et le Grand Hôtel. Dès l'été 1890, des éléments de voies (75 tonnes) utilisés à Paris vont arriver à Royan. Sans aucune concession ni convention signées, le train circule dès 1890 à raison de 50 par jour.
Cependant quelques conditions sont posées : 

La concession est pour une durée de 50 ans, le service ne sera assuré que pendant la période estivale.
Le premier tronçon du Tramway Decauville est mis en service. 
Le premier Directeur de la Société Génerale des Tramways de Royan est Jules Lehucher, ingénieur chez Decauville.

Nous n'aborderons pas les divers projets antérieurs : Tarbé des Sablons (monorail -1857), Dufrane (en voie métrique- 1775-86), le tramway du parc de Royan (1885 auquel le projet Decauville s'est substitué. Mais ce tramway était bel et bien un tramway de loisir, créé indépendamment de Paul Decauville. Combien d'inventions se sont manifestées de manière contemporaine en des lieux et moments n'ayant pas de correspondance directe. etc.

carnet3_26.jpg (25744 octets)Le parcours part du Grand Hôtel, à la plage de Pontaillac avec raccordement à la gare. Elle suivra les boulevards, arrivera en face des Ponts & Chaussées, passera devant les hôtels. Le service commence le 27 juillet 1890 de 8 heures à 20 h du Grand Hôtel et de 8h03 à 20h18 du boulevard de la Falaise. Le trajet se parcourait en 17 minutes, voire un peu plus distendu. La fréquence est de 15 minutes et le prix de 0,25 f en seconde et 0,50 f en première classe. La foule s'enthousiasme pour ce nouveau transport et il est parfois impossible de trouver de la place. Une moyenne de 2452 voyageurs par jour est estimée.
Le tracé et les stations dans Royan
en 1890 : en rouge la ligne principale, en vert l'embranchement vers la gare, en violet l'accès au dépôt.

 


Les horaires d'été de Saint-Georges-de-Didonne à Ronce sans préciser la rupture de charge à la Grande Cote.

À la fin de cette année 1890, les prolongements vers Saint-Georges-de-Didonne et vers la plage de Pontaillac sont évoqués, ainsi que le passage entre Foncillon et le fort du Chay. Le premier est ouvert le 28 juin 1891. Au Paradou la ligne se sépare en deux branches, l'une vers St Georges-de-Didonne (1891), l'autre vers Saint Georges-Port (1906).

À la même époque, Paul Decauville s'intéresse au tramway forestier. En 1898, une demande de concession est faite par M. Odelin qui représente le Tramway de Royan, mais l'Administration s'y oppose.

carnet3_23b.jpg (521988 octets)Le tracé de la ligne en 1895, suite à la création du casino municipal. La ligne ne passe plus par le "Champ de foire" mais entre le casino et le bord de mer. 

 

 

 

 

 

Côté Foncillon une déclivité trop prononcée retardera le projet et un mur de soutènement maçonné sera construit, empiétant sur la largeur de la plage. Pontaillac sera atteint le 15 juillet par un itinéraire provisoire à cause de problèmes de terrains.
La voie entre la gare et le champ de foire est maintenue mais seulement à titre de voie de service pour les transports de matériel.

Le train passe devant le Casino.


Les Horaires de 1894.


La ligne en images de Saint-Georges à la Grande Côte (15,2 km).

Pour la bonne compréhension à Saint-Georges-de-Didonne il y avait deux branches celle de Saint-Georges-de-Didonne (1891) et celle de Saint-Georges-de-Didonne-Port (1905). Elles rejoignaient à la station "Le Paradou" en bord de mer.

Documents FACS n°139, le plan des deux lignes de Saint-Georges-de-Didonne.

En 1891, Simon-Eugène Pelletan, maire de Saint-Georges-de-Didonne et cousin de l'ancien ministre Eugène Pelletan, dont la statue s'élève à l'angle Nord du square Botton, fait voter par son conseil municipal le prolongement de la ligne, à travers le Parc, jusqu'à "l'Hôtel de Plaisance" du centre de la station balnéaire sur la route de Royan. Le 28 juin de la même année, le tramway relie les deux communes.

Saint-Georges-de-Didonne. Noter l'abri en bout du tiroir. Un train est en attente de départ pour Royan sur la voie principale. La voie d'évitement est au milieu de la route. À droite l'Hôtel de Plaisance.

Au terminus de Saint-Georges-de-Didonne, un simple évitement permettait les remises en tête. Au fond du tiroir, un abri du type standard  de la compagnie servait de bureau. Les abris étaient construits en bois vernis puis peint. Un petit local avec guichet et une salle ouverte mais protégée de la pluie, munie de deux bancs complétaient l'installation sommaire. Comme on peut le voir sur les cartes postales, ces abris étaient largement recouverts de publicités.
La ligne suivait la route, en accotement gauche sur 750 m. jusqu'à la station "Le Coca". Peu après elle quittait la voirie pour entrer dans le "Parc de Vallières" où se trouvait la station "Les Sports". 

 
L'entrée du parc et les premières villas.
Il s'agit de la 021T n°10
"La Coubre" qui remplaça en 1910 une 031T "Fernande".
Noter la forme
inclinée des soutes à eau. Cette modification avait été apportée pour améliorer la visibilité mais elle ne fut pas suivie.


Presque au même endroit, une des 021T de 7,5 t. à vide, 10 t. en charge à l'entrée du parc. Ces machines sont restées sur le réseau jusqu'en 1945..

 
Le train en accotement de la route à travers le parc de
Vallières.  
Le train a été abondement photographié plus de deux cents cartes postales le mettent en scène.

17royan148.jpg (87556 octets)
Sur ce dessin, l'artiste a substitué avantageusement une voiture automobile à celle tirée par le cheval de la photo précédente et le promeneur a disparu.

La voie continuait en site propre au milieu des bois et franchissait le ruisseau de Belmont par un pont métallique de 4 mètres. Elle s'inclinait ensuite vers l'Ouest en pénétrant dans le parc de Royan puis longeant une route jusqu'à la station "Parc Oasis" où il y avait une station avec un simple évitement.


La station "Parc Oasis", anciennement "Parc Vallières" dénommée ainsi suite à la suite de la création de la station "Vallières" lors de l'ouverture de la branche Saint-Georges-de-Didonne-Port en 1905.


L
e Parc Oasis, avenue Émile Zola, où il y avait un simple évitement. 

La ligne continuait dans la même direction pour rejoindre la branche du Saint-Georges-de-Didonne-Port à la station "Le Paradou".
Le rayon des courbes ne descendait pas en dessous de 50 m.

  • Saint-Georges-de-Didonne-Port (deuxième branche)

En 1906, l'embranchement jusqu'au Port de Saint-Georges-de-Didonne est créé pour le service des voyageurs et des marchandises. La ligne atteint sa longueur maximale soit 15,2 km. Cette seconde branche se détachait de la première à l'arrêt du "Paradou" et suivait le boulevard le long de la grande conche (CG45). 
Dès lors l'exploitation s'effectue sur les deux branches à raison de circulations alternatives.

 
L'arrivée du tramway de Royan au terminus de Saint-Georges-de-Didonne-Port situé boulevard de Royan. Au fond du tiroir en impasse, se trouvait l'abri.
Les aiguillages étaient manœuvrables seulement à l'aide d'une clé en L que le mécanicien tournait et qui était à bord de chaque machine.


Saint-Georges-de-Didonne-Port. Le départ du tramway vers Royan locomotive 021T en tête d'une rame de voitures KE de l'Exposition universelle de 1889.Le train est sur la voie principale en accotement du boulevard de Royan. La voie d'évitement quant à elle est en rail à ornières au milieu de la route. 
Le terminus de Saint-Georges-de-Didonne est à peu de kilomètres de Royan .


Saint-Georges-de-Didonne-Port. Manœuvre de remise en tête au terminus du boulevard de Royan.
La locomotive est la n°10, reconnaissable à ses soutes à eaux tronquées.

  • Plume de la Poule


Entre Royan et Saint-Georges-de-Didonne
-Port, en accotement du boulevard de Royan  proche de la station de "Plume de la Poule".


Sur cette autre photo, prise au même endroit, la rame à quatre voitures et c'est tout naturellement la 031T de 10 tonnes à vide et 13 t en charge, plus puissante qui est à la traction.


Dans l
e parc de Vallières, 021T Decauville avec réhausse de cheminée.

Suivait l'évitement de "Vallières" (photo) face à l'avenue des Amazones. Puis le "Le parc façade" au niveau de la rue Notre-Dame-des-Dunes.


Le train arrive à la station du "Parc" dont on aperçoit une partie de l'abri qui comporte une voie d'évitement.


La sortie du tram à Vallières au niveau de la rue des Amazones et va en direction de la prochaine station "Plume de la Poule".

La ligne se raccordait ensuite à celle de Saint-Georges-de-Didonne à la station "Le Paradou".

  • Le Paradou


On distingue la voie en accotement coté plage. La ligne suit la pointe de Vallières, non loin de l'embranchement des deux lignes de Saint-Georges-de-Didonne

  • Le Grand Hôtel


Arrêt avec abri du Grand Hôtel (PK 2,814), boulevard Saint-Georges. Le train
passe devant le" Grand Hôtel" et se dirige vers Saint-Georges-de-Didonne:

  • Boulevard Saint Georges (Royan)

Le boulevard Saint Georges pris par la suite le nom de Frédéric Garnier, (maire de Royan de 1870 à 1905).

 
Boulevard Saint-Georges, vue en direction de Royan. Les trains, cabines en tête se dirigent vers Saint-Georges-de-Didonne.


Vue vers Saint-Georges-de-Didonne. Le train est en accotement, côté plage.
Le boulevard Saint-georges a été rebaptisé "Frédéric Garnier en 1907.


Le tramway Boulevard Saint-Georges en direction de Saint-Georges-de-Didonne. 

  • Boulevard Frédéric Garnier2


La voie en accotement, côté plage. Arrêt "rue de l'État" (PK 3,102) qui mène à l'usine à gaz à gauche sur le deuxième cliché.


Un train en direction de Saint-Georges-de-Didonne.

   
Nombre de cartes postales mettent le petit train de Royan en scène.


Au milieu droite, le
"Family Hôtel" et à droite le "Grand Hôtel". La station "Grand Hôtel n'avait pas de voie d'évitement.

 
Deux vues, de jour et de nuit, prises du "Family Hôtel"
. La courbe au niveau de la rue de l'État, boulevard Frédéric Garnier.


Au niveau de la rue de l'État (PK 3,102)
dans la courbe du boulevard Frédéric Garnier.
À gauche, le "Family Hôtel" et juste derrière l'immeuble qui a été construit à la place du "Grand Hôtel". 1904.


Train boulevard Saint-Georges, devenu boulevard Frédéric Garnier en 1907, et en direction de Saint-Georges-de-Didonne.

  • Le casino municipal

Depuis 1894, la ligne contourne le Casino  Municipal (1895) en laissant, à droite la voie qui va au dépôt (ancien arrêt du "Champ de foire" (PK 3,435)) pour enfiler le Boulevard Botton en passant devant la Poste et s'arrêter devant les Nouvelles Galeries.
C'est au "Champ de foire" que prenait naissance l'embranchement vers la gare État où 75 tonnes de rails avaient été livrés en 1890, moins d'un an après l'Exposition universelle de 1889. La semaine suivante la voie avait commencé à être posée et le 30 août ce fut l'inauguration. 
Un mystère subsiste concernant le casino municipal créé en 1895, dix ans après le casino de Foncillon et devant lequel passait la voie de tramway, or peu de cartes postales ne le représentent.
Un arrêt avec une voie d'évitement et un court tiroir sert de station
l'entre voie dispose d'un château d'eau pour l'alimentation des machines.
Le tiroir servait pour le stationnement d'un fourgon abritant les sacs de coke pour les machines3.


Arrêt à la station du casino municipal. Noter l'abri à gauche de la 021T Decauville type 6. La voie d'évitement passe derrière la première rangée d'arbres.
Train en direction de Saint-Georges-de-Didonne.


L'ancien tracé du tramway au niveau du casino municipal. Il passe derrière et on voit, en haut,
l'embranchement vers le dépôt.
Par la suite il passera devant le long de la conche.

Notes
  • 1 Peu avant l'aiguillage, la traction dételait la remorque et se garait sur une voie, puis par gravité la remorque allait se positionner sur l'autre voie et ensuite la traction se remettait en tête.
  • 2 Frédéric Garnier maire de Royan.
  • 3 Les machines étaient chauffées au coke tout comme à l'Exposition universelle de 1889 afin de ne pas émettre trop de fumée.

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