Baguenaude
Le rail à Saint Germain-en-Laye
MAD
Saint Germain-en-Laye
1,
ville royale, berceau de Louis XIII, ville qui a vu naître le roi soleil a dès 1837
été conquise par le rail.
Abandonnés les chevaux, carrosses à cinq sols, vinaigrettes et autres chaises
de louage qui, elles, survécurent avant de laisser place
aux carabas ou aux "pots de chambre"2.
Dès 1835 les gazettes donnèrent à lire au public le projet d'un chemin de fer
reliant Paris à St Germain. La voie de fer allait remplacer celle des pavés et le coche
abandonner le voyage aux trains "rapides comme l'éclair" et traînés
par une machine de fer et de bronze recèlant dans ses entrailles une
chaudière de feu et d'eau bouillante.
Allait apparaître alors la voiture sans
chevaux : l'inimaginable.
Après l'établissement du chemin de fer industriel d'Andrézieux, on choisit
pour premier essai de transport voyageurs la ligne de Paris à St Germain.
Un établissement :
Par ailleurs l'importance du port du Pecq 3 assurerait en plus du service voyageurs un trafic marchandises à prendre en considération. En effet c'est de ce port que partent et arrivent les marchandises de Rouen et du Havre, ainsi que celles nombreuses acheminées par l'Oise.
Le premier chemin de fer fut donc établi à Paris le 26 août 1837 et inauguré par la Reine Marie-Amélie. Mais cette ligne avait pour terminus Le Pecq sur la rive droite de la Seine, ceci pour éviter de gravir les 51 m de la terrasse de St Germain.
Le Paris—St Germain à la gare du Pecq. Fresque relatant le chemin de fer historique. |
Une loi du 19 juillet 1835 concéda pour quatre-vingt-dix-neuf ans
l'établissement de cette ligne de 19, 2 km à Émile Péreire 4. Avec lui Eugène
Flachat 5
Ingénieur en chef de la Compagnie du Chemin de fer de Paris à
Saint-Germain et le Baron de Rothschild 6
le grand argentier de l'entreprise.
Il n'est pas nécessaire ici de reprendre l'histoire de cette ligne mythique
déjà maintes fois décrite. Cela dit, rappelons que le cahier des charges prévoyait un prix
du transport des voyageurs à 1 fr. 50 pour un trajet d'une demi-heure, alors
qu'il était encore de 1 fr 80 en diligence pour un trajet de deux heures. Quant
aux marchandises il serait de 1 à 3 fr. par tonne pour une durée de 45 minutes
alors que sur l'eau il était de 3 à 4 fr. par tonne pour une durée de cinq à
six jours (56 km plus les ponts et pertuis).
Les trains auront 10 voitures d'une capacité d'environ 400 voyageurs et leur vitesse sera de 40 km par
heure.
La nouvelle image qu'offre le train est la sécurité, la rapidité,
l'économie, la régularité (pas toujours de nos jours) et l'intensité de
trafic.
Les gazettes ont relaté l'évènement de l'inauguration avec La Reine Marie-Amélie accompagnée
du duc d'Orléans, du duc d'Aumale et du duc de Montpensier.
N'était-ce pas braver l'inconnu ?
"Le coursier bardé de fer et qui se nourrit de feu" était
mené par Adrien Poncet 7
qui avait fait ses premiers essais sur la ligne de St
Étienne à Andrézieux. Il était accompagné d'Eugène Flachat et de deux
aides Fauconnet et Wall. Le lendemain la ligne nouvelle était inaugurée par
les politiques et les notables de la finance de l'industrie et des arts.
Il serait intéressant de reprendre les articles de la presse satirique et les
dessins des caricaturistes de l'époque.
Un mois plus tard le chemin de fer de
Paris à St Germain était mis en scène dans des pièces de circonstance.
—Et si la
chaudière éclatait..., gémit-elle en se cramponnant à son bras.
—Je suis là ma bonne, répondit-il avec sang froid.
Le surlendemain 18000
voyageurs furent transportés de la capitale à St Germain.
Les voitures de première classe furent des berlines très bien
suspendues de 24 ou de 40 places fermées et mal aérées, celles de deuxième
classe des diligences ouvertes à tous les vents et munies de filets (pour
empêcher les voyageurs de tomber sur la voie). Elle offraient 30 places. Enfin
les wagons destinés normalement aux marchandises mais garnis de bancs et
non couverts.
Comme on le voit des wagons ont également transporté des voyageurs, c'est
peut-être de là que vient cette confusion entre voiture et wagon.
On parle de wagons-lit alors que les britanniques appellent ça élégamment
un sleeping-car. Anyway !
En 1838 la Compagnie possédait 105 voitures et trois locomotives devisées 8
La
Seine, Saint Germain et Louis-Philippe.
Pour faire une comparaison avec ce qui existait auparavant, cela correspondait
à 4070 places et pouvant transporter 900 voyageurs par convoi, soit de 18 à 20
000 personnes par jour avec 12 locomotives représentant 360 chevaux. À la fin
1837 le chemin de fer avait transporté près de 500 000 voyageurs, 499 442
exactement.
On comprend vite à l'époque que le chemin de fer est en train de "chasser
les chevaux" et "renverser les cochers".
Dans la bonne ville de St Germain on se frotte les mains.
Un projet restait à
réaliser, celui de prolonger la ligne jusqu'à la place du château.
C'est en 1847, dix ans plus tard que cette difficulté fut surmontée.
En effet plusieurs obstacles se présentèrent. Tout d'abord le dénivellement de 51 m à gravir. Par ailleurs les locomotives de Paris au Pecq ne traversaient que des plaines sans profil difficile et aucune locomotive n'avait été construite pour des rampes de 35 %o. Restaient à construire deux ponts routiers, un pont et un viaduc sur la Seine et encore une tranchée et un tunnel pour quelques kilomètres de plus. On voit par conséquent les difficultés financière et technique que ce prolongement entraînait.
Wagon
directeur du chemin de fer atmosphérique de St Germain. (Ch. Noel. D.) |
À cette époque en
Angleterre un nouveau syst ème de chemin de fer à traction atmosphérique 9
était déjà en exploitation. C'est cette technique qui fut retenue pour
l'extension de la ligne Le Pecq—St
Germain 10
.
Les travaux commencèrent en 1845 pour être livrés deux ans plus tard.
Au Pecq le changement se faisait rapidement. La locomotive était décrochée et
passait à l'arrière de sa rame pour la pousser sur la voie atmosphérique où
elle était accrochée au wagon directeur. Le train montait en trois minutes
actionné par les machines fixes de 200 CV qui déplaçaient des pistons
capables de produire un vide de 4m3 en une seconde dans les
cylindres.
Ce système dura
jusqu'en 1860. Entre temps le développement des locomotives, l'augmentation de
leur puissance permirent de revenir à un système de traction classique pour
franchir cette rampe inhabituelle. Il s'agissait malgré tout de locomotives
spécialement conçues pour cette fonction.
En 1847 la gare de St Germain—Ouest est édifiée sur la place du château
Quelques vues de l'époque de l'intérieur de la gare de St Germain—Ouest
Ces voitures à impériale ouverte ou fermée étaient directement inspirées des omnibus à impériale tirés par des chevaux sur route ou sur rail.
Une autre gare à
St Germain : St Germain—Grande Ceinture
La loi du 4 août 1875 déclare d'utilité publique la ligne de la Grande
Ceinture autour de Paris totalisant 124 km. exploité par le Syndicat du Chemin
de fer de Grande ceinture regroupant les quatre réseaux et l'État.
C'est dans ce projet que la gare de St Germain Grande Ceinture fut édifiée
lors de l'adhésion du réseau de l'Ouest en 1882.
La gare de St Germain—Grande Ceinture était également en correspondance avec les Chemins de fer de Grande Banlieue (C.G.B.).
Le raccordement de
St Germain Ouest—Grande
Ceinture
En 1879 un
projet de loi prévoyait la construction d'un raccordement de 2,8 km de la gare St Germain
Ouest
avec celle de St Germain
Grande Ceinture, raccordement qui
fut
construit en 1880 dans l'intérêt stratégique de pouvoir faire pénétrer des
trains dans la capitale à partir de la G.C. plus que dans celui des habitants pour se rendre à Versailles.
Ce raccordement est ouvert à
l'exploitation deux ans plus tard et fermé en 1939 puis déposé. Construit à
double voie il servit aux essais de la traction électrique par troisième rail.
Des trains venant de St Lazare par St Cloud—St Nom-la-Bretêche—St Germain
GC—St Germain Ouest virent le jour en 1889.
Une seule gare
intermédiaire existait entre St Germain GC et St Germain Ouest : St Germain Sport.
La
gare de St Germain était le terminus de St Lazare par Nanterre et de St
Lazare par St Cloud et St Nom-la-Bretêche via ce raccordement. C'est ce
qui explique son dimensionnement . Un train prêt au départ entre "cages à poules" et "bidel" 11. |
Les C.G.B. !
Les C.G.B. Chemins de fer de Grande Banlieue 12.
La Sous-Préfecture était située sur les branches de St Germain—Poissy
et St Germain—Les
Mureaux d'une part et sur la branche du tram 58 vers Rueil, Porte Maillot et les Halles et la ligne 60 du tramway
St
Germain—Rueil-Ville.
C'est dire si la ville royale était merveilleusement desservie par le rail.
Plan des différentes lignes urbaines de la Sous-Préfecture. | |
Détail dans St Germain-en-Laye | |
et le centre (château, église, place). |
La ligne du Tramway
de St Germain à de Poissy a été mise en service en 1896 pour doubler la
relation de la G.C. peu pratique pour se rendre d'une ville à l'autre, les
gares étant éloignées des centres-ville.
La concession fut accordée à MM. Francq, Evignet et Gosselin en 1894 et la
ligne ouverte en 1896.
La voie constituée de rails 13
de
20 kg au mètre était de 1,44 m de largeur avec un gabarit de 2,25 m et des
courbes de 30 m de rayon, rampe maxi de 55 mm/m.
La voie suivait
la route de Poissy et entrait dans St Germain par la Porte de la Forêt et suivait
ensuite la rue de la République. Le
terminus initial côté St Germain se situait côté rue des bûcherons
derrière l'église St Germain. Il fut
reporté sur la place du Château. La voie en contournait l'église où elle
était en correspondance avec les lignes 58 et 60 de la S.T.C.R.P.
12.
La composition
des trains était toujours la même : la locomotive, deux voitures à
bogies AB de 50 ou 60 places selon le type et un fourgon à essieux de 5m de
longueur.
Le Tramway
de St Germain à Poissy intègre les C.G.B. en 1911. En 1912, des
automotrices Piepper pétroleo-électriques de la société belge
"Énergie" furent essayées mais ne donnèrent pas satisfaction.
Le
terminus initial du tramway Poissy—St
Germain, avenue de la République. Un simple évitement pour la remise en
tête de la locomotive Lamm & Francq et un kiosque pour la billetterie. Ces locomotives étaient construites par Fives-Lille pour le Paris—St Germain.. Elle seront remplacées ultérieurement par des 030T Tubize. |
|
Le même terminus vu du côté opposé. Locomotive Lamm & Francq sans foyer 14 | |
Dans
la rue de Poissy, un tramway à vapeur comme on pouvait en croiser
il y un siècle. Une vision aujourd'hui oubliée et qui appartient à une
autre époque. Locomotive Lamm & Francq. |
|
La voie C.G.B. contourne l'église St Germain pour passer de la rue de République à la rue de Paris. | |
En
forêt, la voie du Poissy—St Germain traversait à niveau celles de la
Grande Ceinture. Les rails étaient légèrement surélevés et coupés
pour que les mentonnets des tramways passent sur les rails G.C. qui eux
étaient sans discontinuité. Noter le carré d'arrêt absolu sur la droite de la carte postale. |
C'est la Société
Générale des Chemins de Fer Économiques qui exploitait la ligne de St Germain
aux Mureaux longue de 23,9 Km, ouverte en 1912 et fermée en 1937 de St Germain à
St Germain Péreire et en 1948 de St Germain Péreire aux Mureaux. Elle
avait pour terminus la place Maurice Berteaux à la suite de la ligne de Poissy,
empruntait la rue de Paris, traversait la place du marché longeait la rue de
Paris, puis la rue de Pologne, passait devant le cimetière, longeait l'avenue
Carnot, empruntait la rue Pereire, passait au-dessus des voies de la G.C. et
gagnait la gare de St Germain
Péreire de l'autre côté du B.V. par une courte impasse. Elle rattrapait
ensuite la R.N.190 15
qu'elle suivait en accotement en direction des Mureaux.
La gare C.G.B. n'était pas directement en correspondance avec celle de la G.C,
bien qu'un embranchement y menait. Il prenait naissance rue Turgot. Cette gare
possédait des voies d'évitement et en tiroir, une remise à machine et une
plaque tournante ainsi qu'une grue à eau. Le B.V. donnait sur la rue Péreire.
La gare Place Maurice Berteaux était commune aux lignes de Poissy et des Mureaux
et avait deux
voies encadrant un quai central, une voie pour chacune des deux directions. Il y
eut une plaque tournante supprimée en 1925.
La S.T.C.R.P.
La S.T.C.R.P. exploitait deux lignes de tramways qui avaient pour terminus la
place du Château à St Germain :
La ligne 58
dans St Germain commençait en bas de la côte du Pecq qu'elle gravissait
malgré sa rampe de 54%o.
(cette rampe
était déterminante pour le sens des machines toujours cheminée en avant pour
ne pas découvrir le ciel de foyer).
L'entrée dans St Germain se faisait par la place Royale dotée d'un évitement
puis suivait l'avenue Gambetta, passait la place Thiers (avec un évitement)
pour atteindre son terminus place du Château où se trouvait un kiosque pour la
vente des billets.
il reprenait ensuite la Place Maurice Berteaux, la rue Louis XI et à nouveau la
Place royales d'où se détachaient les deux direction des ligne 58 et 60.
La ligne 60 traversait la Seine au Pecq avant de gravir la rampe qui permet d'atteindre la Place Royale et suivait le même itinéraire que le 58.
Avenue Gambetta, train en direction de Porte Maillot. | |
L'évitement du théâtre, Place Thiers |
La desserte des
Halles
Notons au passage que les trains nocturnes de la desserte des Halles de Paris
passaient par St Germain. Ces trains acheminaient les produits maraîchers venant
de Chambourcy et de la Basse Mauldre, et de Cergy et la vallée de l'Oise.
Le réseau C.G.B. conçu comme celui des tramways parisiens, dont il était en
quelque sorte l'extension, a permis ces circulations qui ont fait l'objet de
clause spéciale dans le cahier des charges des compagnies.
Notes
:
Bibliographie :
Sites à visiter :
|
Si une image de cette page vous paraissait non libre de droits, merci de m'en faire part