Le carnet du CFC

Souvenirs d'enfance

Patrick De Decker

"Moru ou Mauru" au 16 et 17ème siècle, dépendait de la paroisse de Roberval et de la seigneurie de Ponpoint, un petit hameau niché au milieu des bois sur les bords de l'Oise. Quelques fermes, et maisons, sa forge, son café, son épicerie.
Pour l'instant rien de spécial un village comme tant d'autre.

Mais au début des années 1900 l'extraction du sable a commencé à Moru à la carrière du Plant et c'est à cette époque que commença l'histoire des sablières et du petit train. C'est pour cela que ces dernières années, je me suis mis à la recherche de documents, photos, et témoignages pour faire revivre cette période. Enfant, j'ai bien connu le chemin de fer car la voie de 60 passait le long des grilles de la maison où mes parents habitaient.
Je suis né à Moru où j'ai passé les huit premières années de ma vie entre Moru/Ponpoint, où j'habitais et Roberval où on allait à la messe le dimanche et Rhuis où j'ai passé mes premières années scolaires, tout ça  bercé par le petit train de mon enfance.

Le train avec ses wagons de sable passait plusieurs fois par jours le long des grilles de ma maison.
Pour aller à l'école à l Km de la maison, et dans le hameau de Moru nous étions obligés de traverser la voie du chemin de fer. Derrière le jardin il y avait un embranchement où plusieurs wagons étaient garés pour vider leur chargement de sable blanc et former un stock qui servait aux sociétés qui venaient le charger dans des camions. Ce tas de sable était un beau terrain de jeu pour les enfants du village.

Il y avait aussi les machines à vapeur qui venaient faire le plein de leurs soutes à eau au même endroit. Il y avait un bassin recouvert d'une plaque de tôle où était stokée l'eau récupérée du fossé longeant la route et une manche à eau faite d'un support en fer sur lequel était suspendu un tuyau en caoutchouc permettant l'alimentation des locomotives. J'en ai appris le principe de fonctionnement il y a pas très longtemps. 

Le bruit caractéristique de la prise de vapeur résonnait tous les jours dans le hameau en fin de matinée quand les machines venaient faire le plein d'eau, manœuvre que j'ai souvent observée en regardant à travers le grillage du jardin, le jeudi ou il n'y avait pas d'école.
On l'entendait arriver de loin le petit train. Le bruit des roues des wagons passant sur les joints des rails et le vrombissement du moteur diesel. On a souvent joué le long du bassin de récupération d'eau où on attrapait des grenouilles et des têtards. Et souvent quand le train arrivait le conducteur de la loco qui n'était autre que le grand-père d'un de mes amis que j'ai encore aujourd'hui a Moru, se penchait à la porte de sa machine et nous criait « Si je vous revoie ici je vais vous botter les fesses ». 

Je pense que c'était surtout par souci de sécurité. Je revoie aussi les serres-frein debout sur la plate-forme du wagon, la main sur la manivelle près a intervenir par tous temps, en toutes saisons.

Patrick De Decker sur la photo devant les wagonnets sur le port de Moru dans les années 50-52.
Ce que  je voyais de mon portail, l train venant de Roberval arrivait en haut à gauche et descendait la rue avant de passer devant chez moi. La voie est cachée par l'herbe. On reconnaît la place avec le café et l'épicerie. (Patrick De Decker)
Ce que voyait le conducteur du train en passant devant la maison. La maison était une ancienne forge. On distingue à gauche à travers les grilles le tas de sable blanc desservi par la voie de garage. Je suis sur la photo (avec la casquette). Année 54-55  (Patrick De Decker)

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