Le carnet de MAD

Oradour sur Glane

MAD

" C’était un village comme il y en a tant d’autres en France. Un village en apparrence sans histoire. Et pourtant ce nom d’Oradour à lui seul évoquait un passé lointain. Aujourd’hui ce passé s’est figé le 10 Juin 1944. On voudrait pouvoir reconstituer l’atmosphère de ce village pendant les quelques heures qui ont précédé son anéantissement. "

Episode du tramway.

Deux tramways en provenance de Limoges sont arrivés à Oradour au cours de l’après-midi. Le premier était un train d’essai ; seuls quelques employés de la compagnie CDHV y avaient pris place. L’un de ceux-ci, M. Chalard, en descendit. Il fut abattu d’un coup de feu alors qu’il passait sur le pont. Les Allemands se débarrassèrent de son corps en le jetant dans la Glane, où il fut retrouvé par les équipes de secours (pièce no 28). Le véhicule fut ensuite refoulé sur Limoges.

Un second train, celui-ci de voyageurs. apparut vers 19 heures, c'est-à-dire au beau milieu de I'incendie. Mlle Maria Gauthier, débitante, 17, place de la Motte à Limoges, se trouvait dans ce tramway. Elle a fait le récit suivant (pièce n° 10)

" Ce tramway fut arrêté à l'embranchement de la route de Saint-Victurnien par les Allemands qui nous enjoignirent de rester dans les voitures.

Un soldat partit à bicyclette, vraisemblablement pour demander des ordres. En revenant, il fit descendre tous les voyageurs qui étaient à destination d'Oradour.

Nous fûmes, au nombre de vingt-deux ou vingt-trois, conduits, sous bonne escorte, non loin du village des Bordes. On nous fit traverser la Glane sur une étroite passerelle faite a l’aide d'un tronc d’arbre. Puis nous fûmes dirigés vers la Maison Thomas où se trouvait le poste de commandement.

On arrête alors notre groupe en plain champs. Le gradé qui commande le détachement s'entretient avec l'officier de poste. Les hommes sont séparés des femmes ; on vérifie leurs papiers, puis on nous réunit à nouveau. On hésite, on parlemente... Soudain, les S. S. s’avancent, font cliqueter leurs armes, forment le cercle autour de nous. Nous comprenons tous qu’à n'en pas douter, il s’agit là de préparatifs d'exécution. Ce sont des minutes interminables d’angoisse et d'épouvante.

Enfin, après une explication un peu vive entre l'officier et le gradé, on nous annonce que nous sommes libres.

Un autre voyageur qui faisait partie de ce même convoi a précisé qu'un interprète, à ce moment-là, s'est écrié : " On vous laisse partir ! Vous pouvez dire que vous avez de la chance ! " 

Une bicyclette, volée au cours du pillage, est remise à une jeune fille voyageuse pour qu'elle puisse regagner plus vite son domicile : maintenant qu'on a massacré toutes les femmes et toutes les jeunes fille du village, on peut se payer le luxe d'un semblant de galanterie.

Et pendant ce temps, on donne l'ordre de reconduire le tramway à Limoges, où il arrivera aux alentours de minuit. "

Oradour sur Glane après son anéantissement par les Allemands le 10 Juin 1944.

Source : Crimes ennemis en France tome I Oradour sur Glane - Archive du service de recherche des crimes de guerre ennemis - Office Français d’Edition - 1945.

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Dessins MAD.

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