Le carnet de MAD
Les Plymouth 0B0-07 à 10 du CFC
MAD
Les PLYMOUTH du CFC : comment?
Jean FINOT membre du CFC me présenta un jour Francis Reusse fanatique de chemins de fer en général et chemins de fer industriels à voies étroites en particulier. Au cours des échanges de connaissance que nous eûmes à plusieurs reprises, il évoqua la carrière de Cantin dans le département du Nord. Quelques photos de qualité moyenne présentaient des convois de bennes tirées par des locotracteurs PLYMOUTH relativement imposant.
A coté de Cantin une briqueterie possédait également un petit réseau de quelques centaines de mètres, avec un rustique
locotracteur MOES tirant deux ou trois wagonnets.
Peu de temps après, mon ancien collègue et ami François LABLANCHERIE passait une journée aux CHANTERAINES avec une amie dont un parent éloigné possédait une usine à Souesmes dans la même région. Et bien sur dans l'usine qu'est-ce qu'il y avait: un petit réseau à voie de 60.
C'en était trop: une escapade s'imposait.
Un matin tôt (vers 6 heures) d'Août 1984, Maurice POOT et moi, prîmes la direction des carrières à la recherche des lieux indiqués et précieusement repérés sur des cartes Michelin, qui en effet mentionnaient du moins la carrière de Cantin.
Arrivés à Cantin nous prîmes à gauche après le PN en direction de la gare. L'usine était embranchée, la carte le mentionnait. La direction de l'usine nous fût indiquée par une personne du village:
- "Tout droit et ensuite à gauche après le passage à niveau."
Nous sortîmes du bourg mais quelle ne fût pas notre surprise en voyant un PN automatique protégeant une double voie de 60. De plus (certaines fois le sort fait bien les choses) au moment où nous arrivâmes le signal sonore accompagné du feu rouge clignotant nous invita à nous arrêter.
Le bruit bien familier d'un locotracteur se rapprochait de nous. Le convoi formé de 16 bennes de gros gabarit passa devant nous à une bonne allure puis s'éloigna sans que la barrière ne se leva pour autant. En effet une deuxième convoi, vide cette fois s'acheminait en sens inverse.
"Alors çà, çà ne se voyait pas tous les jours"! Un peu ahuris, nous ne prîmes pas le chemin à gauche qui un peu plus loin menait à l'usine, mais celui de droite qui avant le PN suivait la "double voie de 60" en direction de la carrière. Le chemin boueux à souhait aboutit au milieu d'un chantier boueux lui aussi. Au bout de quelques centaines de mètres les voies se séparèrent.
Derrière le locotracteur, une benne vide, peut-être pour le transport des agrès. |
Un train de 16 berlines était en cours de chargement à l'aide d'une machine pivotant autour d'un gigantesque bras alors qu'un autre train pas encore arrivé sur le lieu attendait son tour tracteur en tête. 12 berlines de calcaire et 4 berlines d'argile formaient les 6 convois en permanence sur la ligne longue de 2 Km environ.
Benne basculante Decauville (Usine de Lille) de 4m3 pour le transport du calcaire et de l'argile. |
Chaque train comportait une benne vide entre le locotracteur et la rame
(Cf photo) peut-être servait elle à transporter le matériel de secours.
Nous restâmes un moment devant ce spectacle, puis repartîmes en direction de l'usine où nous présentâmes pour une autorisation de visite, mais ce ne devait pas être le bon jour. On nous
éjecta avant même que nous ayons pût clairement expliquer notre requête et avons dû paraître un peu fou aux yeux de notre interlocuteur. Nous fîmes cependant le tour de l'usine pour voir à l'intérieur le déchargement des bennes. Chaque train s'engageait dans un bâtiment et en ressortait vidé de son contenu. Un dispositif en boucle permettait de repartir sans avoir à faire de manoeuvre de
détèlement ou de remise en tête. En milieu de boucle un embranchement avec 2 voies menait à un petit dépôt que j'eus l'occasion de visiter lors d'un autre voyage avec Gilbert DUMY, mais cela est une autre histoire et nous y reviendrons.
Nous reprîmes la route d'Arleux pour voir le réseau de la briqueterie. Au moment où nous arrivâmes près de la courbe à 90° de la petite ligne, le locotracteur MOES et ses deux ou trois bennes arrivèrent, passèrent devant nous en direction de la drague pour être chargées.
Locotracteur Moes |
Un deuxième voyage à la carrière de Cantin.
Par une belle journée
de Mai 88, nous décidâmes avec Arlette d'aller visiter Arras, ville magnifique
que je connaissais déjà et qui fût après guerre reconstruite avec l'art et
l'esprit de ces villes du nord qui élèvent l'âme de leurs bâtisseurs.
Après une visite des Petites et Grandes Places du pur style flamand des 17 et
18 ème siècle et un repas très simple pris au soleil à la terrasse d'un café,
nous retournâmes à la carrière de Cantin. Rien n'avait changé. Il faisait
beau. Le chemin qui longeait la voie en direction de la carrière était sec et
éblouissait tant la blancheur du calcaire éclatait sous le soleil.
Nous suivîmes ce jour, par un chemin difficilement carrossable, la ligne en
direction opposée, c'est à dire vers l'usine jusqu'à un petit monticule près
duquel il disparaissait. Je laissai la voiture et gravis la pente. Quelle ne fût
pas ma surprise de voir, garées sur 4 ou 5 voies, des trains de berlines dont
certaines étaient encore pleines de calcaire. Elles devaient être là depuis
longtemps car nombre d'entre elles étaient complètement rouillées.
Benne Decauville usine de Lille |
Me rapprochant du chantier désert, je fus impressionné par la largeur du gabarit (2,10 m). Le châssis de construction solide était à l'intérieur des roues. La stabilité ne devait pas être extraordinaire et d'ailleurs une autre fois j'eus l'occasion de voir une benne renversée près de la voie.
Chaque benne était munie de roues folles de bon diamètre avec une bande de roulement généreuse pour de la voie de 60. Je ne sais plus de quelle construction ce matériel était, mais bon nombre d'entre elles portaient une plaque de constructeur recouverte d'une épaisse couche de ciment ce qui les rendait illisibles. A tamponnement central avec un attelage par anneau et clavette, elles devaient charger entre 2 et 3 m3, d'ailleurs la robustesse du châssis en témoignait.
Trois exemplaires de ces bennes ont été conservés par l'usine à titre historique. Trois autres ont été rachetées par le CFCD et peut être qu'après un bon nettoyage, quelqu'un pourra me donner les indications portées sur la plaque du constructeur.
Ce jour là je vis très bien, perché sur le sommet du monticule, l'arrivée des trains pleins, la boucle de retournement, le bâtiment de déchargement et le départ des vides sur l'autre voie. Les mêmes PLYMOUTH oeuvraient inlassablement.
Depuis ce jour je téléphonai 2 ou 3 fois par an à l'usine pour savoir si un jour ...
Nous n'avons pas eu le temps de nous rendre à Arleux... mais j'aurais bien l'occasion d'y revenir.
L'arrivée au CFC
Dès lors les choses
allaient s'accélérer. Un matin de je me rendis une fois de plus sur place avec
M. Becquart de la Direction des Espaces Verts pour rencontrer le directeur de
l'usine, choisir les locotracteurs et concrétiser les diverses démarches que
nous avions les uns et les autres entreprises à ce sujet. II ne restait à
cette époque plus rien du réseau et lorsque notre voiture se présenta au PN,
qui il y a quelques années m'avait ému, il ne restait plus que les barrières
automatiques donnant priorité cette fois non plus à la double voie de 60 mais
à la route que l'usine avait substituée à la voie ferrée et sur laquelle
circulent maintenant une noria de camions.
Les locotracteurs étaient toujours dans la carrière isolés, éparses sur des
coupons de voie qui n'attendaient plus que leur départ. Leur aspect sentait déjà
l'abandon et les administrateurs de l'usine semblaient s'impatienter de leur évacuation.
Nous allions les y aider puisque la DEV décidait in fine d'acheter 4
exemplaires, plus un lot de pièces que nous n'avons jamais vu arriver au CFC
(d'autre ont été plus rapides).
(Les locotracteurs sont encore sur le camion Photo J.M. Yot) |
Quelques jours plus tard, nous allions voir les locotracteurs chez Bonal et Fils sur les remorques qui ont assurées leur transport. Une semaine après (le 25 Juin 1990) ils étaient déchargés sur le grill et rangés dans le dépôt. Un rapide examen de chacun d'eux permit d'établir l'état de chaque locotracteur que nous publions pour information.
Entre ciel et rails Photo J.M. Yot) |
ETATS DE SERVICES DES LOCOTRACTEURS PLYMOUTH (immatriculation CFC)
PLYMOUTH n° 7
05/89 Refait
l'embrayage
07/87 Pose de 6 injecteurs
02/87 Pose de 2 essieux neufs
11/86 Pose d'un jeu de chaînes
07/85 Changements des sabots de frein
(les premiers essais Photo J.M. Yot) |
PLYMOUTH n° 8
03/89 Refait
l'embrayage
11/88 Pose d'un jeu de chaînes
04/87 Pose d'un moteur neuf ?
03/86 Pose d'une boîte rénovée
Changements des
sabots de frein
11/85 Changement de la pompe d'injection
04/84 Pose d'un démarreur
09/82 Pose de 2 essieux neufs
PLYMOUTH n° 9
03/89 Pose d'un jeu
de chaînes
11/88 Refait l'embrayage
09/88 Réglage des culbuteurs
11/87 Pose d'une dynamo
08/87 Pose de 6 injecteurs
07/87 Pose d'un démarreur
07/86 Pose d'une boîte rénovée
PLYMOUTH n° 10
03/89 Refait
l'embrayage
05/88 Pose de 2 essieux neufs
Suspension
09/87 Pose de 6 injecteurs
Pose d'un jeu de
chaînes
09/86 Pose d'un démarreur
12/85 Pose de 2 essieux neufs
03/85 Pose d'une boîte neuve
10/81 Pose d'un moteur neuf
(Entrée dans le dépôt. Photo J.M. Yot) |
Entre temps Monsieur K. W. CLINGAN qui avait appris notre acquisition se mit en rapport avec moi pour avoir des renseignements sur l'actualité des 4 Plymouth et en contre partie m'envoya des notes sur leur historique qui feront l'objet de la 5ème et dernière partie de cette série d'articles.
A partir de là il ne restait plus qu'à nous attaquer à leur restauration et leur adaptation pour leur circulation sur le réseau. C'est Gilbert Dumy qui pris en charge ce travail sur le N°7 qui fut achevé début Mars 92. Les lecteurs de ont pu suivre l'évolution des travaux dont nous publions ici une synthèse.
Locotracteur 0B0-07
Pose de batteries
Installation d'un compresseur
Reprise du jeu d'embrayage
Révision. Nettoyage.
Installation du circuit d'air comprimé. Installation d'un embrayage
pneumatique. Installation de l'avertisseur.
Installation du tableau de bord électrique. Peinture.
Remontage des vitres.
Première mission, le garage des plats Decauville. Photo J. M Yot. |
Dernières finitions. Photo J.M.Yot |
Le 1er Avril 1992, l'autorisation de circuler couronnait notre travail pour le n°7.
Notes historiquesNous arrivons avec cet article au terme de notre mémoire sur les Plymouth en publiant les lettre échangées avec Monsieur K.W.Clingan dont nous reproduisons le texte intégral.
Lettre du 03 Octobre 1990
Cher Monsieur,
Il y a quelques
années vous m'avez aidé avec mes recherches dans les histoires des locomotives
à vapeur et les locotracteurs en service de l'industrie française en me
donnant des renseignements sur ceux qui se trouvent maintenant sur le Chemin de
Fer des Chanteraines. Je vous en remercie vivement.
Récemment j'ai lu en voie étroite N° 120 que le CFC a acquis, en juin (1990)
quatre locotracteurs de construction Plymouth aux Ets Poliet et Chausson où ils
portaient les numéros 5, 7, 8, 9. J'espère que vous avez reçu aussi ses
dossiers et je me demande s'il serait possible à m'aider encore en me donnant
des renseignements supplémentaires, par exemple
J'espère qu'il sera possible à m'aider encore sans difficultés et je serai reconnaissant de votre aide avec mes recherches merci d'avance.
Veuillez...
A la suite de quoi je transmis à M. Clingan tous les renseignements qu'avaient livré les carnets d'entretien des locotracteurs ainsi que leurs caractéristiques que je reproduis ici.
PLYMOUTH n° 4842
Année 1945 (0B0-07 au CFC)
Type 6
Modèle DLD
Poids 10 tonnes
Moteur Deutz F6L413V
n° 6273578
puissance 113 CV à 1800 tours
PL YMOUTH n° 4835
Année 1945 (0B0-08 au CFC)
Modèle DHD
Type 6
Poids 8 tonnes
Moteur Deutz F6L413V
n° 7156308
puissance 125 ev à 2150 tours
PLYMOUTH n°
(plaque absente) probablement 4854 Année 1945 (OBO-O9 au CFC)
Type 6
Modèle D LD
Poids 10 tonnes
Moteur Deutz F6L714
n° 4731584
puissance 105 CV à 1500 tours
PLYMOUTH n°4853 (0B0-10
au CFC)
Année 1945
Type 6
Modèle DLD
Poids 10 tonnes
Moteur Deutz F6L413V
n° 5388566
puissance 122 CV à 2000 tours
Lettre de K. Clingan du 23 octobre 1920
"Cher Monsieur,
Je vous remercie de votre lettre du 04 Octobre, de son contenu et de tous les renseignements que vous m'avez donnés. Ils m'aident beaucoup avec mes recherches dans les histoires des locomotives et locotracteurs en service dans l'industrie française et j'en suis reconnaissant.
Vous m'avez demandé si j'ai des informations qui seraient peut-être d'intérêt pour le patrimoine du CFC à ce sujet. Voici les détails que j'ai pu trouver dans les archives de l'lndustrial Railway Society concernant les machines appartenant à la Société Anonyme des Ciment Français, Usine de Cantin Nord (Etablissements Poliet & Chausson jusqu'à une date inconnue).
Machines à voie normale
Machines à voie de 600mm
Machine." à voie de 600 mm.
Des autres, un membre de l'IRS, visitant l'usine en août 1965 a vu les suivants :
PLY n° 2 hors
service portant la plaque PLYMOUTH 4837 de 1945
PLY n° 3 portant la plaque PLYMOUTH 4837 de 1945
PLY n° 4 portant la plaque PLYMOUTH 4847 de 1945
PLY n° 7 portant la plaque PLYMOUTH 4842 de 1945
PLY n° 8 PLYMOUTH inconnu possiblement 4840
PLY n° 10 portant la plaque PLYMOUTH 4850 de 1945
PLY n° 12 portant la plaque PLYMOUTH 4841 de 1945
PLY n° 14 portant la plaque PLYMOUTH 4832 de 1945
PLY n° 17 portant la plaque PLYMOUTH 4853 de 1945
PLY n° 18 portant la plaque PLYMOUTH 4854 de 1945. Cette machine portait aussi
le n° 5
PLY n° 19 portant la plaque PLYMOUTH 4835 de 1945.
A noter SVP que, à cette date la machine PLV n°18 portait aussi le n° 5. Selon vos informations, c'était le n° 17 qui fût re-numéroté n°5 (n°10 au CFC).
J'ai noté que M.
Banaudo est du même avis que M. Reusse, que certaines de ces machines
(lesquelles ?) sont venues de l'usine de Mours Val d'Oise (près de
Beaumont-sur-Oise).
Ont-ils peut-être la même source de renseignements ?
M. Maurice GEIGER a vu plusieurs de ces locotracteurs dans la cimenterie de Gargenville il y a une trentaine d'années
Je vous rassure
Cher Monsieur de mes meilleurs voeux ferroviaires.
Your Sincerly
Keith Cligan
Voici quelques
photographies du livre très complet de Richard Dunn intitulé: "Narrow
gauge to no man's land - US Army 60 cm Gauge Railways of the tirst World War in
France ". Bien que consacré essentiellement au matériel américain de la
première guerre
mondiale, l'ouvrage présente quelques matériels de la seconde guerre dont les
premiers
Plymouth.
Les deux premières photos représentent une génération antérieure de Plymouth, datés de 1941.
Number 999, A Plymouth, looked like this when she was newly delivered in 1941,; what number she received in the renumbering that occurred at Fort Dix in the 1940s has not determined U.S. Army. |
Le n°8210 est quant à lui ultérieur aux nôtres et d'ailleurs, il s'en rapproche en apparence.