Les régates d'Argenteuil

Article paru dans Le Monde Illustré du 22 novembre 1879
Fragment de dessin de P. Renouard

Tous les genres de sports prennent en France un grand développement; les jeux nautiques notamment ont depuis quelques années, trouvé d'ardents partisans, et les régates ont fini par triompher de l'indifférence du public, qui supporte en foule partout où elles ont lieu..
Les dernières régates de la saison avaient lieu les deux derniers dimanches d'octobre à Argenteuil. Ces régates internationales à la voile et à la vapeur étaient sous le patronage du Cercle de la voile de Paris.
Fondée en 1858 par un petit nombre d'amateurs, cette société ne tarda pas à prospérer, grâce au zèle de ses fondateurs. Il y a vingt ans, à peine les amateurs se souviennent encore du succès qu'ont obtenu dans nos régates les premiers voiliers américains à dérive. Les constructeurs parisiens se sont inspirés de ces modèles, et maintenant de nombreux voiliers stationnent sur les rives de la Seine et de la Marne.
C'est surtout à Argenteuil que se sont donnés rendez-vous les amateurs de canotage à la voile. Le fleuve, en cet endroit, forme un bassin large et découvert, et toute une flottille de bateaux de plaisance lui donne l'aspect d'un petit port. C'est de là que chaque année, vers la fin du printemps, quantité de petits yachts partent pour aller disputer les prix des régates de la basse-Seine et des côtes de Normandie. - Rouen, Le Havre, Trouville, Fécamp, Dieppe, ont coutume d'inscrire, parmi leurs vainqueurs, les noms des bateaux parisiens.
Chaque année, à l'automne, alors que tout le monde est revenu de la mer ou de la chasse, le cercle d'Argenteuil invite tous les amateurs de yachting, aussi, l'autre dimanche, vingt-huit voiliers de différents tonnages et une dizaine de vapeurs prenaient part à des courses. Les prix étaient offerts par la ville de Paris, le Cercle de la voile, la mairie d'Argenteuil, etc.
Nous trouvons parmi les vainqueurs des deux dernières courses : Ninette et Zéphir pour la première série au-dessous de quatre tonneaux ; Le Lison et Passe-partout pour la deuxième série au-dessus de quatre tonneaux ; Jupiter pour la troisième série (yachts à dérive au-dessus de six tonneaux ; Miss Helen et Miss Jeanne pour la quatrième série (yachts à quille fixe propres à la navigation maritime).
Dans la course que représente le remarquable dessin de monsieur P. Renouard, c'est le prix d'Argenteuil qui est disputé et que gagnent Lison et Pierrot. C'est le dernier rayon de soleil d'automne dont profitent les canotiers comme les promeneurs des environs de Paris. Avant qu'on mette toutes ces embarcations au remisage, avant que les campagnes soient abandonnées par les parisiens, nous avons voulu en laisser au moins les souvenirs sur nos tablettes pour ceux de nos lecteurs et de nos abonnés, et nous pensons qu'ils sont nombreux, qui prennent part à ces joyeux et intéressants tournois nautiques, soit comme acteurs, soit comme spectateurs. Il en est beaucoup d'autres qui y sont étrangers, mais qui verront avec plaisir cette amusante scène des nouvelles mœurs parisiennes.

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