Zambèze voguera* au printemps

Véronique Leloup

Voici quelques années maintenant que Zambèze, canoë français, a trouvé sa place dans le garage à bateaux. Au lendemain de sa donation en 2009, il avait connu quelques interventions dont le renforcement du pont. Le chantier, qui a repris en 2013, approche désormais de sa fin. On peut espérer une mise à l’eau au printemps prochain!

Gratté de son vernis et démantelé, Zambèze a mauvaise mine sur ses tréteaux. C’est en s’approchant et en observant les détails de sa construction qu’on mesure l’intérêt de ce canoë. La finesse de la forme et la légèreté de la coque ne laissent aucun doute sur les motifs de sa construction. Au contraire des yoles de louage, dont la rotation constante des rameurs amateurs nécessitaient une construction robuste, Zambèze à été conçu, probablement sur mesure, pour un propriétaire privé et en vue d’une utilisation qu’on qualifierait aujourd’hui de sportive. Il nous tarde de pouvoir l’entendre à nouveau glisser sur l’eau et apprécier son allure!

Selon sa plaque, Zambèze, dont le nom se réfère au fleuve d’Afrique australe, pourrait bien être le bateau le plus ancien de la collection. Le nom et l’adresse mentionnés renvoient aux ateliers Tellier installés, de 1868 à 1905, au 52, quai de la Rapée, à Paris. Aucune information ne nous renseigne sur le premier propriétaire de Zambèze. En revanche, on sait qu’après avoir vogué sur la Vienne en compagnie de l’oncle de son donateur, il a été entreposé plusieurs années dans une cave troglodyte de tuffeau. Dans la roche, l’hydrométrie et la température constantes ont offert au bois la meilleure conservation.

Malgré cette attention particulière, certains bois n’ont pas résisté aux attaques de la discrète mais virulente vrillette. Trop prudentes et somme toute bien peu curieuses, les larves ne sauraient s’aventurer au festin exotique que sont l’acacia et l’acajou, bois d’importation, qui constituent respectivement chez Zambèze les membrures et les bordés. C’est en revanche avec un appétit féroce qu’elles ont dévoré genoux, lisses et supports de barre de pieds réalisés en résineux, si tendres au croqué.

 

Afin de minimiser à l‘avenir ces attaques, il a été décidé de restituer l’ensemble de ces pièces structurelles devenues inexploitables, par des pièces en chêne, bois dur, dont la vrillette est moins friande puisqu’elle y laisse régulièrement des dents.

Par ailleurs, la coque, bien qu’en bon état général, présentait de nombreuses gerces. Trop étroites pour nécessiter un flipo, elles ont été ouvertes et comblées à l’époxy.

Le plancher démontable a lui aussi fait l’objet d’une intervention. Épargné par notre amie la vrillette, les deux planches de résineux de 4mm d’épaisseur pour 250 mm de large qui reposent sur les membrures présentent aujourd’hui un risque de rupture à l’utilisation. Nous avons travaillé à un renfort fait de fines cales collées à l’époxy en sous-face des planches, dont-elles épousent la forme. Une fois le plancher en place, elles viennent se positionner entre chaque membrure, assurant ainsi de doubler le contact du plancher avec la coque et offriront aux pieds les plus larges de pouvoir se poser sur Zambèze.

Peu d’étapes restent à franchir avant la mise à l’eau. La coque et les pièces de structure restaurées, il s’agit surtout aujourd’hui de remonter l’équipement et l’accastillage puis d’appliquer quelques dernières couches de vernis. Les cuirs de la barre de pieds ainsi que les tire-veilles du gouvernail restent à fabriquer.

On prévoit par ailleurs de restituer à Zambèze un mât ainsi qu’une voile en coton. En effet, un coffrage carré, à l’avant du canoë, assurait le maintien d’un mât démontable. La voile tendue au vent donnera aux plus paresseux quelques instants de répit…

* NDLR : Comme chacun sait, il n’y a que les bateaux à rames qui voguent, les autres naviguent

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