Peintres de Carrières

Denise TISSERANT NIVOT

Promenades au fil de l’eau au Pays des Impressionnistes : Carrières sur Seine.

À la « Belle Epoque » la campagne est aux portes de la capitale. Le train de Saint Germain déverse sur les bords de la Seine, sa cargaison de parisiens avides d’air et de verdure. On conçoit que les peintres impressionnistes, amoureux de la nature, aient hanté ces lieux pour y planter leurs chevalets.
Carrières n’eut pas l’heur de recevoir la pléiade d’artistes qui hantèrent Chatou, Bougival, Argenteuil, Louveciennes et d’autres villes riveraines de la Seine. 
Certains d’entres eux seulement fixèrent sur la toile des aspects de cette localité.

Claude Monet « pape de l’impressionnisme » et immortel auteur des «nymphéas » pendant son séjour à Argenteuil où il s’établit en 1872, installa son atelier sur un bateau qui fit l’objet d’une toile : « le bateau atelier ». Depuis cet esquif, il a peint une vue campagnarde de Carrières.

C’est en septembre 1909 que Braque fait un bref séjour en compagnie de Derain pour y peindre quatre toiles ayant pour thèmes Carrières et son parc : « paysage au clocher », « parc de Carrières », « Carrières le village ». L’évolution cubiste de l’artiste y est très prononcée : des formes de plus en plus rigides, une végétation d’abord stylisée puis abandonnée, élimination des détails, la structure des paysages s’affirme avec netteté.

Derain, créateur avec Vlaminck du groupe de Chatou est un maître du fauvisme dont il exécutera quelques unes des toiles les plus importantes. Il est simultanément novateur et traditionnaliste et deviendra un pré-cubiste avant de revenir à une peinture de tradition. Sa toile « le parc de Carrières » est bien dans la tradition des fauves et n’est pas sans analogie avec celles de Vlaminck.

Vlaminck, farouchement indépendant, est le fauve à l’état pur. C’est en 1904-1905 qu’il peint à Carrières le village et les bords de la Seine. Il a subi l’influence de Van Gogh qu’il vénérait et aussi les effets de ses racines flamandes.

De nos jours, parler de peinture à Carrières-sur-Seine revient à évoquer un lavoir de la localité qui est devenu le quartier général des peintres locaux et un lieu d’exposition. Sis au bord de la Seine dans un cadre idyllique, il a l’aspect d’un atrium romain avec sa salle longiligne et son toit ouvert convergeant vers l’intérieur sur un bassin faisant penser au vers de Verlaine « le ciel par-dessus le toit ». Les murs du bâtiment servent de cimaises aux peintres. Il y a longtemps que les battoirs des laveuses ne retentissent plus en ce lieu.
Le filet d’eau s’échappant vers l’extérieur suit une rigole aboutissant à une vasque circulaire avant de se jeter dans le fleuve en passant sous un ponceau romantique qui enjambe le chemin de halage qui relie Chatou à Carrières.
C’est devenu un lieu de promenade et nombreux sont les promeneurs et cyclistes qui prennent le temps de s’y arrêter et de flâner pour regarder les expositions temporaires qui s’y déroulent de mars à octobre, d’autres avec un coup de cœur y font l’acquisition d’un tableau.

Page précédente