LE CHANTIER DE LA BELLE SUZANNE
 

Pose de la quille de Suzanne

Le 19 octobre 2004, la quille de Suzanne est mise en place à l’association Sequana dans la plus pure tradition “canotière” en présence de Monsieur Philippe Dupont, Président du Groupe Banque Populaire. Une joyeuse mise en chantier de Suzanne naturellement arrosée au Bischoff ! Depuis cette date, le chantier a trouvé son rythme.

SUZANNE avance bien. Le galbord donne du fil à retordre mais Jim affirme que cela va “twister” sans problème : un petit séjour dans la Seine, puis dans l’étuve, et tout va aller pour le mieux pour le bordé récalcitrant !
Le premier effort que nous avons dû faire avant de démarrer ce chantier relève de la communication ! Nous avons dû nous adapter au vocabulaire, très anglo-saxon dans la forme, de notre charpentier. Cela ne “trévire” pas mais ça “twist”, et bien entendu il faudra au préalable s’inquiéter de “l’instorage…” ces quelques exemples étant des échantillons !
- “L’oeil… fiez vous à votre oeil… il faut que ça file !” dix mille fois nous aurons entendu cette instruction.
Quand la leçon est comprise nous avons le droit à un : - “Bravo les lions… !” allusion ironique à l’engagement des stagiaires ainsi qu’à la moyenne d’âge de certaines “pintades” Décade = 10 jours ! P(en)tade = 5 jours… il n’en a pas fallu plus pour que les stagiaires soient gratifiés du nom de ce sympathique gallinacé !

 


Pose du tabelau arrière de Suzanne

C’est le rythme des stages, cinq jours, du vendredi au mardi. Nous ne remercierons jamais assez Jim d’avoir accepté cette répartition des journées de travail, cela facilite grandement l’adhésion des stagiaires : avec RTT + deux jours de vacances c’est possible !

Nous en sommes à six mois de chantier et cette organisation s’est avérée efficace. Elle n’exclut pas les “auditeurs libres” qui viennent le week-end, Vous l’avez compris nous sommes assez fiers de cette organisation !


La cale à border

CONSTRUIRE un bateau quille en l’air et le membrer sur lisses c’est un dépaysement total pour nous tous habitués à border à la parisienne c’est-à-dire à claire voie. - “Pourquoi vous compliquez la vie ? Cherchez la simplicité, le moyen efficace…” Il en a de bonnes ! Les habitudes ont la peau dure, ce n’est jamais simple de les remettre en question !

Des exemples ?
Cela commence par peindre le contreplaqué de traçage : c’est plus pratique de passer une couche de peinture sur un trait à corriger que de gratter avec la “gomme à Guydhouilles” (breveté S.G.DG) les traits directement tracés sur le contreplaqué !

Le chantier, on l’installe sur le tracé : c’est tellement plus pratique, on a tout sous les yeux !

- “Yaka s’baisser !”

Pour tracer les faux couples – “néanmoins légitimes !” précise notre maître, un bidule à coulisse tout simple à faire, c’est nettement plus simple que d’aligner des clous, qui plus est, on peut rattraper des imperfections du tracé pour que cela file bien ! Pour travailler des bordés il faut être à son aise, être bien installé. Deux établis confortables vont être le premier travail, ils seront particulièrement efficaces. Nous les apprécierons dès le début du chantier lors d’une formation intensive au creusage sur des rablûres d’entraînement ! Là où ça tourne histoire de pimenter l’affaire ! A chacun sa cale, son ciseau et rendez-vous deux ou trois jours plus tard pour l’examen de contrôle…

Les faux couples sont dressés sur le chantier, la quille est ajustée à sa place, de même pour l’étrave et le tableau arrière avec un étambot en forme de S du plus bel effet, mais il a fallu trouver le bout de bois qui aille bien !

Intense réflexion sur la répartition des bordés, chacun y va de sa proposition. Pour renforcer l’argument on prend des lattes que l’on promène sur les faux couples, à l’avant tout va bien on est content, bien sûr on fait gaffe au bouchain, et puis on arrive sur l’arrière et patatras, plus rien ne va ! - “Non, mais tu as vu le développé de ton spaghetti ?” et l’impétrant de revoir sa copie ! Pendant ce temps là un autre prend sa place et l’histoire recommence !


Rivetage des membrures de Suzanne

 
- “Un bordé cela doit être harmonieux, joli à voir…c’est pas compliqué ! Regardez votre bateau et imaginez les aboutissements, le rythme…
” Il en a de bonnes le Jim ! Le bateau étant à l’envers, il faut prendre du recul et se tordre le cou pour regarder à l’envers histoire de se faire une idée ! Sensible du torticolis, s’ abstenir ! Pose de la quille de Suzanne. Pose du tabeleau arrrière de Suzanne La cale à border. Rivetage des membrures de Suzanne. LE CHANTIER DE LA BELLE SUZANNE. Bref, on est d’accord et commence alors la pose des lisses, costaudes les lisses ! - “Plus c’est raide et mieux ça file !” Vient le moment tant attendu de la mise en place des membrures !

UN GRAND MERCI à Boris Proutzakoff qui ira nous choisir un acacia du pays angevin, plein d’eau, droit de fil, une merveille ! La machine à bouillir fume il est temps d’y aller. Membrer sur lisses c’est le bonheur absolu ! C’est à ce moment que l’on apprécie des lisses costaudes ! On en profite pour ajuster les varangues.

LE MOMENT tant attendu du bordage est arrivé ! Dans l’enthousiasme on découpe le gabarit qui servira à reporter les points, on affûte le crayon du compas, on prépare des crayons de couleurs pour être certains de bien identifier les points et, consternation, nous voyons notre maître muni d’une simple cale (en bois dur quand même) reporter son profil de bordé d’une main en sifflotant. Aucune possibilité de se tromper, il suffit de réfléchir un peu pour équerrer la cale convenablement !


La charpente de Suzanne

 
Nous sommes le 1er février et les sept premiers bordés sont en place. L’acajou du Honduras que nous avons trouvé est une vraie merveille. Le grain, la qualité, en font un bois facile à travailler. Séché au fil du temps, il présente une patine plus que sympathique. On a du mal à brûler les chutes !

Suzanne est bien partie, elle sera légère, élégante, une vraie parisienne !

Pendant ce temps les “bouchons gras” s’activent autour de Jean-Jacques qui est le Maître de cérémonie ! Au niveau de l’ambiance pas de changement, chaque victoire se fête dignement !
Les outils sont différents, essentiellement électroniques pour le moment ! En effet il s’est tissé une toile de compétence autour de la machine Schindler. D’un côté l’ABV (Amis des Bateaux à Vapeur), de l’autre le Chemin de Fer des Chanteraines avec un président qui se réjouit de reprendre ses cours de thermodynamique qu’il avait un peu négligés ces derniers temps.
Il est vrai que faire tourner une dizaine de locomotives à vapeur, même s’il n’est pas tout seul, cela prend du temps !
On passe les frontières et une collaboration franco-suisse est en place avec la célèbre Compagnie Générale de Navigation sise à Ouchy non loin de l’établissement de Mayu qui nous a mis en relation avec Guillaume Linder responsable des machines à vapeur installées sur les fameux bateaux du Léman. J’ai eu l’occasion d’aller saluer Guillaume Linder sur ses chantiers, c’est un homme qui aime ses machines, il en parle avec une émotion non dissimulée.
Il a pris Suzanne en sympathie et il ne compte ni son temps ni ses efforts pour nous guider vers une restauration efficace. Par ailleurs le directeur technique de la CGN est un ancien de la Royale qui connaît parfaitement notre atelier qu’il a eu l’occasion de visiter à plusieurs reprises quand il vient rendre visite à sa famille à Mareil Marly, le monde est petit !

Nos mécaniciens sont en plein calcul !

Quelles doivent être les performances du générateur, autrement dit les caractéristiques de la chaudière ?
Prenez une feuille de papier et notez !
Sachant que la machine de Suzanne est une machine à double détente en tandem présentant un piston haute pression de 6cm de diamètre et un piston basse pression de 12 cm de diamètre, que la course des dits pistons est de 80mm, que le régime de marche devrait se situer autour de 200 tours par minute et que la pression d’entrée de la vapeur se situera autour de 8 bars. Veuillez préciser :
1) la puissance exprimée en Watts de la machine
2) La quantité de vapeur nécessaire à l’heure de fonctionnement à plein régime
3) La surface de chauffe nécessaire pour fournir la quantité de vapeur nécessaire pour satisfaire à une marche à plein régime. Je ramasse les copies dans une heure et on ne copie pas sur son voisin ! Les meilleures réponses seront récompensées et publiées dans la prochaine Feuille à l’Envers.

Pour les maniaques précisons que le bateau pèse en charge avec son équipage 1500 kg, qu’il fait 7m30 à la flottaison et que son tirant d’eau avoisine les 70 cm et que la navigation se déroulera en moyenne à 50m au dessus du niveau de la mer.


“Je vous avais 
averties qu’il ne
fallait pas tant
déjeûner”
Grav.de Robida, série
Les régates
d’Argenteuil.. Coll.Part.
 

Autour du Chantier ! Les bonnes fées de Suzanne !

À La Fondation d’Entreprise Banque Populaire, viennent s’ajouter la Ville de Chatou qui nous renouvelle une subvention de fonctionnement en plus de la disposition des locaux,

Les Établissements Mutelet à Rahon, dans le Jura, spécialistes du chêne dont le directeur Jean-Marie Mutelet nous a trouvé et offert la charpente de Suzanne dans une qualité de chêne de premier ordre,

Thibaut Merceron qui a fait don à Suzanne de sa première paie d’apprenti charpentier (du bâtiment pour le moment!) sous forme de serre-joints de la meilleure marque ! Et il y a encore de la place….

Tous nos remerciements pour toutes ces aides, des plus modestes au plus généreuses. Toutes les initiatives sont bonnes et peuvent revêtir des formes différentes. Il nous faut des sous bien entendu, mais pas seulement que cela. Nous avons besoin de vis, de bronze pour les membrures, l’arbre moteur, les paliers, les pièces d’accastillage, du coton pour le calfat, de la peinture,des pinceaux…des tuyaux, des manomètres, des vannes…

Le printemps arrive venez nous voir sur le chantier on vous dira ce qu’il nous manque pour habiller la belle Suzanne !

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