Les Canotiers du Nil

Pratiquement navigable toute l'année, le Nil devint dès la plus haute Antiquité la voie commerciale la plus importante de l'Egypte et très tôt les Egyptiens, ces fabuleux " marins d'eau douce " acquirent une grande technique dans la construction de bateaux. Sur les rives, poussaient des palmiers, des tamaris, des sycomores, des acacias sauvages ; or tous ces arbres ne permettaient pas d'obtenir de planches de grandes dimensions (au plus un mètre soit deux coudées de 52 cm).

Dès la protohistoire, ils utilisèrent les matériaux élémentaires et construisirent une sorte de flotteur en liant ensemble des bottes confectionnées à l'aide de roseaux, qui prirent bientôt la forme d'une barque. Suffisante pour chasser dans les marais ou gagner les localités, les îlots voisins pendant l'inondation. Elle ne permettait pas d'aller très loin, ni de transporter des objets lourds et volumineux. C'est grâce à des représentations peintes, des bas-reliefs, des modèles réduits en bois, en argile, trouvés dans les mastabas et les hypogées que l'on a pu étudier les plus anciens bateaux .
A l'Ancien Empire, 3100 ans avant J.C, leurs formes rappelaient pour certains des barques, des canots faits de bottes de papyrus entrecroisées ou une véritable marqueterie de planches pour constituer la coque. Au début, pas très grands, ces bateaux n'avaient que trois ou quatre rames de chaque côté et les rameurs devaient se tenir debout. Ils présentaient à l'arrière un cabanage fait d'une toile de lin tendue sur une armature de roseaux, une petite cabine en planches que l'on retrouve également sur le " Voleur de Poules " lui-même inspiré des bateaux Foncet des gravures du XVIIIe siècle. Mais, environ 2900 ans avant l'ère chrétienne, les Pharaons avaient fait construire une flotte importante grâce à l'importation de troncs de cèdre du Liban, pour transporter sur le Nil des marchandises, des animaux dans des " bateaux-étables ", des troupes, des blocs de calcaire, de granit, de marbre… Tous ces matériaux nécessaires à la construction des pyramides et de leurs complexes funéraires.
Les Pharaons, leurs familles et les hauts dignitaires disposaient également d'une véritable " flotte de plaisance ".. Les " yachts " royaux longs, étroits, somptueusement et remarquablement aménagés, possédaient plusieurs ponts, des cuisines, des salons et des chambres.

La décoration des tombes aux différentes époques permet une étude détaillée de l'aménagement et du gréement des diverses embarcations des défunts dont l'interprétation est parfois délicate. Nous découvrons des images profanes avec une joyeuse agitation, des scènes de pêche et de chasse, une agréable croisière ou bien le retour d'une inspection dans les domaines lointains avec des textes hiéroglyphiques descriptifs. Toutefois, dans la plupart des cas, ceux-ci mettent souvent l'accent sur le caractère funéraire du voyage " naviguer vers le Champ des Offrandes auprès du grand Dieu… " assimilé à un pèlerinage vers les villes saintes de l'Egypte Ancienne. Vœux du propriétaire de la tombe qui désire cheminer éternellement vers " le Bel Occident ", royaume des morts où chaque jour disparaît le soleil.

Marie- Christine De RYCK

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