Images de la ligne

Les lignes 62, 62 bis & 63 - Neuilly—Maisons-Laffitte 2/6

Marc André Dubout

L'exploitation
Quelques documents nous renseignent sur l'exploitation de la ligne.

.Dès février 1901, le préfet avait arrêté la suppression des places de première classe sur la ligne Neuilly—Maisons Laffitte.
Archives municipales de Bezons
À propos des horaires un relevé minutieux dans les deux sens sert d'argumentaire aux représentants des communes pour demander à la compagnie d'améliorer les dessertes, le minimum étant de 100 trains par jour alors qu'il était de 104 en 1913 et seulement de 94 six ans plus tard.
C'est surtout Bezons, ville industrielle et ouvrière, qui était la plus concernée comme l'atteste ce document sur lequel figure les lignes 62, 63 et 64.
Archives du service Archives-Documentation de Houilles
La question des points d'arrêt a été durant toute la vie de la ligne un sujet épistolaire entre les communes et les différentes compagnies comme l'illustre cette lettre du 6 février 1926 adressée au maire de Houilles concernant l'édification d'un abri rue de Pontoise sur la commune de Houilles pour le service de cette ligne.
Archives du service Archives-Documentation de Houilles
Ci-contre ce document relatif à la distance entre les stations de la communauté de communes regroupant Bezons, Houilles, Sartrouville, Maisons Laffitte.
Il y avait 2 stations (La Porte Maillot et Maisons-Laffitte), 12 arrêts fixes et 38 arrêts facultatifs, ce qui devait faire passablement baisser la vitesse commerciale.
Document des Amis de l'Histoire de Sartrouville et des Environs
ligne62_144.jpg (95943 octets) Il y avait 6 sections tarifaires : Neuilly, Courbevoie, La Garenne, Bezons, Houilles, Sartrouville et Maison Laffitte.
Le prix le plus bas était de 0,05 Francs et pour la ligne complète il fallait compter 0,40 Francs en Deuxième classe et le double en première.
Document des Amis de l'Histoire de Sartrouville et des Environs
Un tableau à double entrée était affiché dans les stations.

Les tarifs étaient bien moins élevés que ceux du chemin de fer.
Archives du service Archives-Documentation de Houilles

ligne62_118.jpg (440576 octets) Le syndicat des communes de Bezons, Houilles Sartrouville, Maisons Laffitte sollicité par les voyageurs pensait que les tarifs n'étaient pas en rapport avec les parcours effectués en Seine & Oise et que le système de sectionnement n'était pas satisfaisant.
Archives
du service Archives-Documentation de Houilles
ligne62_141.jpg (204850 octets) Plusieurs enquêtes sur la fixation des tarifs eurent lieu sur l'ensemble du réseau.
Archives municipales de la ville de Puteaux

Toujours au sujet de l'exploitation, l'administration interdisait la présence de voyageurs sur les plate-formes des voitures qui circulaient sur la ligne, ce qui entraîne de facto une diminution de capacité. La compagnie informe le maire de Bezons dans une lettre du 26 janvier 1901 qu'elle oeuvre pour faire lever cette interdiction que rien ne justifie et est contraire à la pratique des autres réseaux en France.
La compagnie demande de surcroît l'intervention du maire de Bezons pour abonder dans son sens.
Certaines cartes de circulations étaient octroyées aux personnels officiels comme les gardes champêtres, agents communaux, etc. 

ligne62_120.jpg (370437 octets) Les maires quant à eux semblaient bénéficier de cartes gratuites, c'est en tout cas certain pour le maire de Houilles.
Archives du service Archives-Documentation de Houilles
Le 9 novembre 1920, 
Archives municipales de Courbevoie
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Archives municipales de Courbevoie

ligne62_145.jpg (94620 octets)Comme le montre ce tableau à double entrée, l'amplitude des tarifs étaient de 15 et 10 centimes à 80 centimes et 55 centimes pour chacune des deux classes. La ligne était divisée en 9 sections.
La Garenne-Bifurcation était communément appelée "l'Embranchement"

 

La concurrence
La concurrence routière était déjà présente avant la première guerre comme l'atteste cette lettre de 1908 adressée au maire de Bezons par la Société des Trains Renard de Seine & Oise 1 qui propose ses services. D'ailleurs les maires ne manquaient pas de communiquer leur information comme l'atteste cette lettre du maire de Montesson adressée à un de ses collègues au sujet des Trains Renard assurant des services de voyageurs dans la région de Chantilly et sur une partie du territoire de Seine & Oise. Cette Société semblait briguée les projets non aboutis comme celui de la ligne du Pecq à Argenteuil.
La Compagnie Départementale de Transports Automobiles envoie elle aussi en 1905 une lettre au maire de Bezons pour présenter son projet d'exploitation de cette ligne Le Pecq—Argenteuil, lors d'une réunion rassemblant les maires des différentes communes traversées.
Les horaires de différentes lignes de l'Oise (Chantilly—Luzarches, Luzarches—Persant) sont transmis servant d'exemples.

Les accidents
Archives du service Archives-Documentation de Houilles
La ligne ne fut pas à l'abri des accidents dont certains entraînèrent les pires conséquences comme celui de cette femme de 58 ans qui a eu les jambes broyées entre Bezons et Houilles.
Moins grave cette voiture de laitier qui traversait la voie du tramway sur la commune de Houilles à la minute même où il ne le fallait pas.
Exemple de rapport détaillé d'accident avec croquis à l'appuis

Les tracés
La ligne 62 (et ses dérivées) a subi des modifications de tracés et d'exploitation au gré des acquisitions des différentes compagnies.

Au début (en 1901), la ligne appartenait aux T.M.E.P. et était numérotée 1. Le terminus était situé à la Porte Maillot. Elle empruntait l'avenue de la Révolte, l'avenue du Roule, la rue du Château, puis le boulevard Bineau et traversait la Seine au pont de Courbevoie.
Ensuite l'itinéraire reste inchangé.

En 1920, l'indice de la ligne devint ML MO pour Maisons-Laffitte—Porte Maillot.  Le terminus est reporté porte Champerret, le tracé emprunte le boulevard Bineau de la ligne B des T.P.D.S. déjà existante jusqu'au pont de Courbevoie.


Dans Courbevoie et la Garenne-Colombes.

Dans Bezons, Houilles Sartrouville et Maisons-Laffitte.

Entre 1921 et 1925 le tracé de la ligne fut remanié dans Courbevoie. C'est à cette époque que la possibilité de double traction vit le jour ainsi que l'augmentation de la vitesse commerciale.
Sur la ligne 62 bis on voit apparaître l'exploitation à un seul agent. 14 voitures anciennes type 150 - CNF furent modifiées pour ce nouveau mode. Le nombre de voyageurs augmenta sensiblement suite à diverses améliorations.
L'ancien tracé GN MO a son terminus à la Garenne-Bezons, en correspondance avec la ligne ML MO de Maisons-Laffitte.

Le 8 février 1930, le président du Conseil général écrit au Directeur de la S.T.C.R.P. pour l'informer qu'il a reçu une délégation accompagnée du Maire d'Argenteuil, d'un Conseiller général, du Président des commerçants, venus défendre les intérêts des usagers de Bezons.
 Et voici les questions qu'ils l'ont chargé de transmettre à la Société.
1. - Ligne 61
Cette ligne, construite avec la participation de Seine-&-Oise, est frappée d'un tarif plus élevé que toutes les autres puisque pour deux sections, il est perçu 1,20 Fr. au lieu de 0,90.
Sur la même ligne, les billets aller-retour ne sont valables que dans la partie comprise entre Bezons et la place du 11 novembre.
Quelle grosses difficultés y aurait-il à donner satisfaction sur ces deux points ?
2. - En ce qui concerne les ligne 62 & 63 il est demandé de rétablir la section Bezons-Grand Cerf—Gare de la Garenne.
Avec le nouveau sectionnement fixé à la Maison de Nanterre, il est payé 0,90 Fr. au lieu de 0,60 Fr., c'est-à-dire que sur cette ligne, comme sur quelques autres, les usagers ont eu à subir une double augmentation, celle résultant de l'augmentation du tarif et celle résultant d'une modification du sectionnement.
En ce qui concerne les lignes de Seine-&-Oise, les propositions de la S.T.C.R.P. de la Région parisienne, approuvées par l'Administration départementale avaient été plus sévères, puisque le Département de Seine-&-Oise ne participe pas au déficit des transports.
Puisque l'entreprise des transports est devenue pratiquement inter-départementale, - et presque régionale - et que les usagers ne peuvent pas comprendre les raisons administratives et financières d'appliquer des règles variables pour le sectionnement et la tarifications des lignes, il semble que ces problèmes comme celui de la desserte de Longjumeau, doivent faire l'objet d'une étude générale et que par exemple, il y aurait utilité à réunir la Sous-Commission du Comité consultatif, où sont représentés les intérêts de Seine-&-Oise.
Le moment est venu de négocier avec le Conseil général voisin pour établir, sinon une convention, du moins un modus vivendi en attendant que la "région parisienne" devienne une réalité administrative.
Il conclut en lui demandant d'étudier surtout les points de détail soumis plus avant de telle sorte que les représentants puissent, soutenir une discussion en Commission.
En post scriptum il évoque la question que pose la disparition du tramway 64 entre la place du 11 novembre, à Argenteuil et le boulevard de Valmy, à Colombes. Ce point mériterait également d'être évoqué avec les affaires indiquées ci-dessus.

Archives de la RATP
 

La ligne 62 fut supprimée le 19 août 1935 et remplacée par un autobus. Les élus qui réclamèrent le tramway le firent aussi disparaître.
Dans un extrait du registre des délibérations  du conseil municipal de Houilles dans sa séance du 3 décembre 1932, on peut lire : "La circulation , intensive,  présente de gros dangers  pour les habitants de Houilles qui ont à traverser cette route nationale et même pour les usagers de cette route". Et plus loin : "La circulation routière est rendue difficile et dangereuse par la place excessive réservée à un moyen de transport  incommode, lent et onéreux.
Et le texte se termine par : Qu'il serait en conséquence conforme à l'intérêt général de supprimer la ligne 62... et de la remplacer par un autobus moderne".

ligne62_143.jpg (230906 octets) Dès 1932, une enquête sur la consistance du réseau et du service des trains de la région parisienne est lancée et un dossier est déposé auprès de chacune des mairies. La fin des tramways se profile à l'horizon des rails.
Archives municipales de la ville de Puteaux
ligne62_121.jpg (115832 octets) Début des années trente, la suppression plane dans les salles de conseil municipal et les maires transmettent leur avis au directeur de la compagnie. Trois ans plus tard ils auront vu leur vœu exhaussé.
Archives du service Archives-Documentation de Houilles
ligne62_142.jpg (97114 octets) Mais avant de déclasser on reporte le terminus de la Porte Maillot au Rond point de la Défense, ce qui oblige les voyageurs à une rupture de voyage. Cette stratégie a également été mise en oeuvre pour la ligne 58 Porte Maillot—St Germain-en-Laye.
Archives municipales de la ville de Puteaux
ligne62_127.jpg (1000686 octets) D'ailleurs le déclassement de la ligne 62 passe inaperçu dans les bureaux de la compagnie en regard à toutes les autres lignes, dix-huit au total. Autant dire que c'est la fin du tramway.
C'est la fin des tramways dans l'ensemble des villes qui en possédaient un.
Archives du service Archives-Documentation de Houilles

Détail de la notice explication sur le déclassement des lignes de tramway.

 

Notes :
  • 1 La Société des Trains Renard exploitait des lignes de voyageurs à l'aide de routière à laquelle étaient attelées deux ou trois remorques routières également et qui se dispensaient ainsi de voie ferrée.

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