Le carnet du CFC

La locomobile Lobin du château de Tholonet (Aix-en-Provence)

Marc André Dubout

Le château de Tholonet.
Le château de Tholonet "Castrum de Tullone" fut signalé en 1191. Il dépendait de la seigneurie d’Aix-en-Provence.
Propriété d'Alexandre de Gallifet, Président au Parlement de Provence, le château restera dans la famille deux siècles et demi et sera considéré comme le « Versailles d’Aix », avec ses 16 appartements, ses grands salons, un théâtre dans l’aile droite aujourd’hui disparue et une bibliothèque renfermant toutes sortes de pièces de théâtre des plus sérieuses aux plus libertines.
Le château était également un centre agricole important exploité en métayage. Céréales, fourrages, pommes de terre, vin, arbres fruitiers, oliviers, amandiers faisaient du Tholonet une terre de prédilection, riche et productive.
Depuis 1959, il abrite le siège de la Société du Canal de Provence.

Le canal du Verdon.
Le canal du Verdon a été construit de 1864 à 1875 pour alimenter en eau la région d'Aix-en-Provence. Sa longueur est de 82 Km et comporte 20 Km de souterrain. Malheureusement des difficultés techniques, administratives et financières entravèrent sa construction et au final à sa mise en eau, il ne fut pas en capacité de livrer les 6m3 concédés à la ville et les dérivations de 4m3 prévues pour les communes du Tholonet, de Meyreuil et de Gardanne.
En 1970, la mise en service du canal de Provence a entraîné la désaffection du canal de Verdon qui malgré tout pendant un siècle a contribué largement au développement économique de la région d'Aix-en-Provence.

La locomobile Lobin
La locomobile Lobin d'une puissance 6 chevaux a assuré pendant la durée des travaux l'évacuation des déblais des souterrains du canal du Verdon. Engrenée à l'extrémité d'un treuil constitué d'un énorme cylindre autour duquel s'enroulait un câble de fer elle remontait à la surface des godets d'une charge de 500 kilos.
Cette machine a été utilisée pour le creusement de trois galeries : galerie des Maurras, de Ginasservis et de Pierrefiche qui comportaient à elles trois, 27 puits totalisant  2360 mètres de profondeur.
Cette locomobile était déplacée par un attelage de chevaux sur son lieu de travail. 
Au XIXème Siècle, ce type de machine servait pour les moulins à blé, les scieries, l'épuisement des mines, les forges à fer, le battage, les travaux de la ferme. C'est dans cette dernière activité que les Établissements Lobin à Aix étaient spécialisés.
Catalogue des brevets, page 581

La locomobile, vue coté foyer.
Le treuil constitué d'un cylindre en fer dont la face portante est en bois est mu par un engrenage en chevron.
Une poulie changeait la direction du câble et s'enfonçait dans un puits par lequel, la machine remontait des godets.
À droite, un godet de 500 Kg de charge utile.
Ceux-ci étaient ensuite évacués manuellement sur les wagonnets plats en voie de 80. 
Contrairement à d'autres locomobiles connues, celle-ci possédait un changement de marche et des crans d'admission utilisables certainement en fonction de la charge à remonter au jour.
Le dôme de prise de vapeur muni de ses deux soupapes et d'une prise de manomètre étalon en laiton.
Noter le travail de chaudronnerie. Sur la photo de gauche, certains rivets pincent trois épaisseur de tôles.
La pose des rivets en dents de scie évite la déchirure du recouvrement de tôle.
Locomobile Calla telle qu'elle est représentée dans le catalogue. Toutes ne possédaient pas d'inverseur de marche.

Ce qu'il en est dit dans Les Merveilles de la science.
M. Calla est parti de la locomobile Clayton, telle qu'elle était en 1851 ; mais il y a apporté quelques modifications. Il a augmenté la pression et  donné plus d'étendue à la surface de chauffe, qui est portée à 1,40 m  et jusqu'à 1,8 m par cheval. Il a, de plus beaucoup agrandi les passages de vapeur dans la distribution.
C'est avec ces dispositions que M. Calla, entreprit sur une grande échelle, la construction des locomobiles. C'est donc à cet habile constructeur que revient le mérite d'avoir répandu, en France, l'usage des machines à vapeur appliquées à l'agriculture. 
L'Exposition Universelle tenue à Paris en 1855, exerça une très grande influence pour vulgariser en France, les machines agricoles, et notamment les locomobiles, en présentant au public intéressé à ces questions, les résultats de l'expérience et de la pratique des différentes nations. Il était impossible  qu'à la suite d'un examen attentif des nouveaux appareils exposés par les constructeurs anglais, français, allemands et américains, l'agriculteur de demeurât pas convaincu de leur utilité pratique, et de l'importance que doit offrir leur usage bien entendu. Signalons quelques-unes, des machines qui furent présentées à l'Exposition Universelle de 1855, et qui se distinguaient par des dispositions utiles. M. Calla, était parvenu à diminuer le poids total des locomobiles sans rien ôter de leur solidité ; il avait pu porter la pression de la vapeur jusqu'à 5 atmosphères, tout en diminuant l'espace occupé par le moteur. L'une de ses machines, de la force de trois chevaux, consommant 150 kilogrammes de houille par journée de dix heures, ne pesait que 1600 kilogrames, et n'occupait qu'un espace de 2 m sur 1,5 m.

Les Établissements Lobin.
Les Établissements Lobin avaient été créés en 1843 pour la construction du canal du Verdon et en assuraient l'entretien la réparation et les fournitures (machines outillages, etc.).
Bien que le nom Lobin apparaisse sur la machine il s'avère qu'il s'agirait d'une machine Calla1.

Notes

1François-Étienne Calla (1760-1836) est un mécanicien et industriel. Il créa les établissements de mécanique et les fonderies Calla à Paris en 1788.
L’activité principale de ses ateliers de mécanique était la construction de machines-outils pour les filatures et de machines à vapeur. 
François-Étienne Calla réalisa également la chaudière modèle Barlow et la mécanique du premier bateau à vapeur de Robert Fulton, le Nautilus
Il innova en créant le « tour parallèle » dans les années 1830.
C'est aussi à lui que l'on doit diverses fontes ornementales à Paris (Panthéon, Église Saint-Vincent-de-Paul) réalisée par l'architecte Jacques Hittorff.

François-Étienne Calla participa activement à la création de l'industrie des fontes d'art.

Il porta le titre honorifique de « Mécanicien du Roi » (1824).

Sources :

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