Impressions ferroviaires lors de mon voyage à bord du "Train européen contre le cancer" organisé par Aventis.

MAD

16:52 29/03/2004
Hier soir, j'ai mis mon réveil à 5h28, mais à 4:35 j'étais déjà réveillé et n'y tenant plus, je me suis levé. Toilette, puis mon sac bouclé j'étais sur le quai de la gare de Nanterre-Ville pour le train de 6h02 direction Paris. J'arrivais à la gare du Nord à 6h35, soit 20 minutes avant le départ du train N°9309 de 6h55 pour Bruxelles voie 8.
Je me dirigeais immédiatement en tête du train vers la cabine de conduite et frappais au carreau pour demander au mécano s'il voulait bien m'accepter en cabine, lui tendant mon billet pour la capitale belge. Une minute plus tard, j'étais à bord, nous avions encore 10 minutes avant le départ.
Pas sitôt commencé le voyage, j'étais "dans le bain". Démarrage lent, puis les premières aiguilles en sortie de quai et bien vite la banlieue encore endormie. La gare de St Denis que nous traversâmes sur la voie centrale, puis les petites maisons de long de la voie encore plongées dans la lueur du jour naissant.
Le train quitta la ligne classique pour s'engager sur la LVG et là je sentis l'accélération douce pour atteindre le 300. Logiquement la ligne devait être autorisée à 320, mais vu la consommation d'énergie pour un retour sur investissement non pertinent, les ingénieurs avaient décidé de la limiter à 300. Le jour de printemps se levait dans le matin brumeux et le soleil rouge était positionné à droite des voies juste au dessus de la caténaire.
Nous discutâmes tout au long du trajet. Le mécano habitait St Quentin et il avait rejoint Paris pour un aller-retour sur Bruxelles. Ensuite la rame se séparait en deux, avec une partie pour Deutz-Cologne. Ayant quitté la LGV, peu avant Bruxelles, il dut ralentir sa course à cause d'un train qui précédait le nôtre, nous mettant en retard de 5 minutes. A Bruxelles-Midi, (car il y a trois gares dans cette ville : Central et Bruxelles-Nord), pas de train exposition. Tout d'un coup, j'ai eu un doute, je n'ai pas pris le nom de la gare où était stationné le Train Exposition. Je quittais la machine un peu anxieux. Sitôt descendu dans le hall je demandais au "point info" où était le "Train européen contre le cancer"et on me répondit qu'il devait arriver à 10 heures sur la voie 16. Je profitai de cette heure d'avance pour sortir de la gare et aller voir les tramways jaunes. Double voies au milieu de la chaussée avec double branchement en triangle à l'intersection de certaines avenues. En France, nous redécouvrons le tramway comme un moyen de transport silencieux et propre.
Le train arrive et stationne devant le long du quai. L'équipe installe le matériel pour accueillir les visiteurs et les officiels, puisque la Princess Astrid elle-même va inaugurer le train, pour la Belgique, accompagnée du Premier Ministre. Suite à cette visite de qualité, celle du grand public. 
A l'heure du repas, je vais dans la voiture Agora, une ancienne voiture restaurant du Trans Europe Express (TEE) décorée dans le goût des années 70 bleue, orange, avec des néons, quelque chose qui pète genre pop music et mini-jupe à carreaux de préférence avec de l'orange, ça flasche, et dans laquelle une délicieuse blanquette de veau nous est servie. Puis je retourne à la banque de la voiture 5, la dernière de l'exposition où de la documentation est remise au public.
16 heures. Notre train doit partir. Le matériel extérieur a été bien vite rangé. Un chef de train belge nous accompagne à bord jusqu'à la frontière, c'est le règlement. J'apprends que le train arrivera à Villeneuve-Prairie vers 1 heure du matin ou quelque chose comme ça, en tout cas dans la nuit, puis il gagnera la gare de Lyon vers 6 heures demain matin pour l'inauguration officielle du train par le ministre de l'enseignement et de la recherche (qui n'est pas venu, période d'élection).
Nous traversons les gares de Tubize et de Mons et arrivons dans une gare dont le nom est caché par un train de marchandises en stationnement.
Le soleil donne dans la cabine et derrière moi, il y a un train de ciment, les Ciments Calcia chez EVS, 172 avenue de la République à Puteaux 33 RIV 87 SNCF 930 5 545-4P. Il est arrêté juste à la hauteur de l'attelage à choquelle que j'ai tout le loisir d'observer. Il se déplace lentement en pousse car les tampons sont collés et la vis détendue. Cette fois il démarre dans le sens inverse, en traction, car l'attelage est tendu et les tampons ne se touchent plus. Il prend de la vitesse, puis disparaît laissant derrière lui un voyageur dont la machine semble faire une remise en tête. Le commissaire de bord qui a interdit à tout le personnel à bord de descendre avant demain matin en gare de Lyon, saute sur la voie et se dirige vers l'atteleur qui attend la machine pour faire l'attelage. Elle est à l'aiguille et refoule lentement. Il se met face à elle. Il brille dans le soleil dans sa tenue jaune de sécurité. C'est la 2727 dans une livrée bleue avec une bande jaune. Elle s'arrête à un mètre puis se colle contre les tampons de la rame de voyageurs. L'atteleur passe sous le tampon, accroche la choquelle puis accouple les boyaux d'air. Ensuite il branche les connexions électriques puis ressort et discute avec le commissaire de bord et un agent qui passait par là. C'est comme ça au chemin der fer on ne rompt jamais le contact entre cheminots. La parole est le lien entre les membres de cette grande famille.
Comme en France, les petites gares ont perdu leurs voies de débords et les bâtiments marchandises sont laissés à l'abandon. Parfois ils sont proches de la ruine et au bout d'un chemin on voit un heurtoir preuve qu'il y avait encore là une voie qui est restée longtemps sans être utilisée et qu'un jour on a décidé de déferrer.
Maintenant le mécanicien de la 2727 est passé dans la cabine avant et, c'est le pento arrière qui est levé. A travers la vitre j'entends le compresseur ronronner, mais le son est atténué par le double vitrage. Il est 17h50, ça fait presque qu'une heure que sommes arrêtés en gare de Quévy. Pas un bruit. A l'opposé du BV, les dernières voies donnent sur des prés verts, séparés par des haies basses et des clôtures rectilignes. Au fond des saules dénués de feuille brandissent leurs branches arc-boutées vers la ligne d'horizon dont les premières futaies se noient dans le ciel violet. La journée s'achève doucement comme les journées de printemps tardif déjà empruntes d'été.
Je n'arrive pas à lire le nom de la gare. Il faudrait que le train se déplace. C'est peut-être la frontière, dans ce cas, il y aurait un changement de machine et le contrôleur belge quitterait le train.
17:58 la 2727 s'en va avec sa douzaine de voitures vides laissant apparaître le nom de la gare : Quévy.
Un train de houille SGW 163 bis avenue de Clichy Paris vient de s'arrêter derrière ma fenêtre. Les deux machines de traction ont fait le tour de notre train pour se mettre dans la direction opposée. Je vais bien voir quand il va repartir. Ca y est, les vis se tendent, les tampons s'écartent, il repart dans l'autre sens, puis s'arrête à nouveau un long moment puis continue sa route vers la France. Il s'agissait sûrement d'un changement de traction, les deux machines belges retournant vers leur dépôt d'attache. Je regarde la carte Michelin n° 53 sur le Nord de la France et la Belgique et repère l'itinéraire que nous avons emprunté. Nous ne sommes pas loin de Maubeuge.

20 heures l'équipe se rassemble dans la voiture Agora et avant le dîner, J. nous offre le champagne. Nous sommes une vingtaine à bord pour ce repas du soir, essentiellement l'équipe de Y. le régisseur du train, celle de la STE, la Société des trains exposition, celle du traiteur et nous sommes deux d'Aventis J. et moi, les deux qui n'avons pas compris que le train quittait Bruxelles à 16 heures et qu'à 16h10 il y avait un Thalys pour Paris.
Après le repas le technicien du son nous installe une projection cinématographique et nous regardons "Constant", un film anglais stupide qui égrène les spectateurs. A la fin de la projection nous ne sommes plus que quatre, dont deux dorment et un autre somnole.
Je regagne ma cabine, ouvre la fenêtre, le train roule dans la nuit. A un moment des lumières éclairent la cabine, je me redresse, nous passons la gare de Chauny dans l'Aisne. Demain, je regarderai la carte, nous sommes sur la ligne de St Quentin et je me rendors jusqu'au lendemain et me réveille Gare de Lyon sur la voie M.

Mardi 30/03/2004
Première et bonne nuit passée dans la cabine 71/73 De la voiture 618775-71 2086-5. Il est 6h30, je vais prendre ma douche à l'extrémité de la voiture Agora qui est attenante à la mienne, puis reviens dans ma cabine avant d'aller déjeuner. Il fait froid, le ciel est clair. La journée est fatigante, vers 20 heures, je rentre chez moi par le RER.

Mercredi 31/03/2004
J'arrive à 8h45 et prends mon service à 11h30 jusqu'à 18h. La journée est moins fatigante, j'étais à l'accueil Grand public et VIP et ensuite à la banque documentaire. Le soir, nous sommes allés dîner à la brasserie de Maître Kanter gare de Lyon, retour à bord 22h40, départ 23h12.
Le train roule dans la nuit. Je suis dans la voiture hôtel 1, celle où est installé notre PC. En effet une semaine avant le départ avec l'équipe informatique, nous avons installé un ordinateur avec imprimante couleur qui fait aussi fax et scanner, un fax, un téléphone et une borne wifi pour connecter 4 micro portables. C'est là que je viens passer un peu de temps la nuit quand je ne dors pas. Soit je prends mon micro soit j'utilise celui du poste central avec ma clé USB.
Ah ! au fait il faudrait que je parle de la composition du train. 15 voitures : 5 voitures exposition présentant chacune un thème sur le cancer, une voiture conférence, une voiture bar et une voiture dialogue pour accueillir les actionnaires que l'on nomme pudiquement les "invités". Eh ! Oui, nous sommes en période d'OPA et il faut par conséquent prendre des précautions de langage, bien que parfois le mot soit lâché et le regard qui le supporte gêné. Du côté équipes, ce sont deux voitures hôtel composées chacune de 5 cabines individuelles, encadrant une salle de réunion et dans l'une d'elle, le poste central qui dans chaque gare est relié à une connexion ADSL et deux connexions téléphoniques. La voiture Agora qui est une voiture restaurant avec une cuisine qui occupe un quart de la surface et en bout de rame deux voitures de première classe avec 18 cabines chacune. La capacité d'accueil de notre train est de 46 personnes en théorie car en pratique nous sommes seuls par cabines ce qui en fait moins.
Tiens notre train s'arrête à Villeneuve St Georges. Cet arrêt est nécessaire  pour que nous fassions le plein de gas-oil et le plein d'eau, car j'ai oublié de parler des deux fourgons munis chacun d'un groupe électrogène alimenté par des moteurs diesel 12 cylindres en V et qui fournissent l'alimentation électrique du train : chauffage l'hiver et éclairage toute l'année.
Nous repartons lentement pour nous garer près d'une rame voyageur avec un trottoir au niveau du rail afin que la citerne puisse approcher des réservoirs qui se trouvent sous le châssis des fourgons. Le plein fait 2000 litres soit deux citernes. L'opération doit durer une heure environ, ensuite, nous nous dirigerons sur Valenton, Creil, Chauny, Arras et Lille, mais c'est à vérifier. De toute façon, on a la nuit entière pour gagner Lille où l'inauguration du train aura lieu demain matin.
J'ai regagné ma cabine et ce fut un festival de manoeuvres. Notre train était garé sur la voie 107. Un peu plus loin une BB-63000 manoeuvrait des voitures Corail pour reconstituer des rames sur les voies 125, 126, 127 et d'autres encore. Puis ces manoeuvres se rapprochaient, l'agent de manoeuvre à l'aide de sa lanterne faisait les signaux réglementaires de refoulement. Traction, refoulement, changement d'aiguille, coup de sifflet au droit de notre train, histoire de réveiller les passagers sans compter le claquement des roues aux éclisses. Moi j'étais heureux, peut-être le seul du train à ne pas être dérangé. De l'autre coté de la voie un agent remplissait les soutes à eau pour le voyage, au loin un train passe dans la nuit. Doux martèlement. Je m'endors.

02/04/2004 Lille, le train arrive dans le mauvais sens dans la gare terminus de Lille, il est 6 heures. Après un moment d'arrêt, il repart sur Tourcoing pour atteindre un triangle de retournement et entrer, voitures exposition côté heurtoir. Le matériel est installé et la journée commence.

03/04/2004

21/04/200422:55 
Villeneuve St Georges, Chelles, Vaire, Esbly, Meaux, Châlon-en-Champagne, Forbach, Francfort.

Jeudi 22/04/2004
Un autre bon moment ferroviaire. Nous arrivons à Frankfurt-Griesheim, le matin de bonne heure et le train stationne en gare en attendant son transfert vers le quai au bord du Main en plein centre ville. Nous savions qu'à cette étape, le train ne restait pas en gare mais serait stationné en centre ville. Vers 8 heures un premier mouvement se fait, emmenant le train sur un embranchement qui semble être industriel et qui sera, je l'ai su par la suite, la voie mère qui dessert le port fluvial de Francfort. 

Un peu plus tard, il s'arrête sur une voie et la machine coupe le train en deux car sa longueur trop importante ne permet pas un stationnement sur le quai, puis remet en tête la partie exposition et repart toujours dans la même direction. Nous passons devant la gigantesque centrale thermique de Francfort où des wagons CARGO stationnent. Ce sont des wagons trémie spécialisés dans le transport du charbon pour alimenter la centrale thermique. Puis nous continuons dans les rues de la ville. Avec G., nous sommes en queue, toutes portes ouvertes, même celle de l'intercirculation, ce qui nous permet d'avoir une vue géante sur les voies. Notre train créée un étonnement auprès des piétons et des automobilistes. Enfin nous quittons les rues pour rejoindre le Main par une voie noyée dans la pelouse rigoureusement tondue et nous commençons lentement à longer ce fleuve très agréable sous un soleil qui annonce une belle journée. Nous nous approchons du centre ville. Un premier arrêt est nécessaire pour décrocher un fourgon, une voiture hôtel, la voiture restaurant et les deux voitures-lit, le reste du train continuant sur quelques mètres afin de laisser libre le passage des piétons et des voitures de service. 

A Francfort, le train qui mesure 375 m est coupé en deux. Sur la photo, on voit la partie exposition avec l'arche d'entrée;
Toujours la partie exposition vue de l'autre côté du port.
Vue prise du pont sur le Main.

Vendredi 23/04/2004 21 heures
D. et G. font les pleins de gas-oil et d'eau et c'est à ce moment que le locotracteur Krauss-Mafféi arrive pour ramener la rame à Frankfurt-Griesheim. 

C'est le camion des pompiers qui assure le ravitaillement en eau.
Dans la cabine du locotracteur Krauss-Maffei.
Aux commandes.

Présentation de l'équipe on discute un peu (en anglais) et les gars vont nous prendre en cabine. Après un dernier tour du train, c'est la manoeuvre d'attelage. Ce locotracteur est un loco privé appartenant à l'administration du port. Il est piloté par radio. Le chef de manoeuvre porte sur sa poitrine, un petit boîtier avec des boutons qui commande au loco les mouvements de manoeuvre. Une autre particularité, c'est 'attelage automatique. Une sorte de barre parallèlipédique jaune avec une pince à son extrémité qui vient, à la commande, serrer le crochet du wagon qui doit être manoeuvré. L'approche se fait doucement et l'attelage sans heurt. Puis étonnement car en fait il faut refouler pour venir atteler la partie exposition. Le chef de manoeuvre va en tête et refoule à partir du boîtier de commande. Une fois l'attelage fait, nous nous dirigeons vers la cabine. Le chef de la manoeuvre reste sur la passerelle avant, commandant la vitesse et l'avertisseur au croisement de rues. La nuit tombe, nous avançons lentement, c'est sympa. Puis le train entre à nouveau dans la ville. L'agent de manoeuvre descend de la machine pour se positionner aux passages à niveau et arrête la circulation et remonte, une fois le train engagé à la traversée de la rue. Nous passons à nouveau devant la centrale thermique où des vides attendent sans doute leur reprise et arrivons sur les voies de garage où la manoeuvre de reconstitution de notre train s'effectue de manière automatique. Nous restons seul avec G. dans la cabine, la machine fonctionne toute seule. Le mécano reste au droit des aiguilles pour les manoeuvrer pendant que son train circule.
Tout est bien vite terminé, nous regagnons la voiture restaurant. Une autre machine nous ramènera en gare de Frankfurt-Griesheim.
Retour Hambourg-Altona Paris, train 236 Départ 27/04 22h33 arrivée Paris-Nord 28/04 09h14. le train est passé par Dormund, Bruxelles St Quentin Compiègne et Paris.
Lorsque je suis retourné à Strasbourg pour les deux derniers jours d'exposition, les 03 et 04 mai, l'accès en cabine n'était plus possible à cause du plan vigi-pirate renforcé. C'est confortablement installé dans un salon de première d'une voiture corail, que je suivais le tracé de la ligne sur mes cartes anciennes.

LeTrain européen conte le cancer a reçu au cours de son périple dans les cancéropôles françaises et en Allemagne 39915 visiteurs.

 

 

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