Le train Capitale - la plate-forme Péchot modèle 1888

 

C’est en 1875 que Paul Decauville, dans ses usines de Petit Bourg, près d’ÉVRY met au point la voie étroite pour permettre le transport des betteraves à sucre dans des chariots roulants. Quelques années plus tard, en 1878, lors de l’exposition universelle les visiteurs étaient promenés dans des wagonnets tirés par des poneys et, lors de celle de 1889, c’est une locomotive à vapeur qui effectuera la traction.

En 1882 le colonel d’artillerie Péchot présente un mémoire sur les avantages de la voie de 60 pour une utilisation militaire. Dès 1884 il procède aux premiers essais et en 1888 la première démonstration officielle a lieu à Toul (54) devant le ministre de la guerre Freycinet qui adoptera le système le 3 juillet de la même année. Dès lors un réseau sera construit dans toutes les places fortes de l’Est ainsi que sur la ligne de défense de la ville de Paris dont certains tronçons existent encore de nos jours comme dans le fort du Mont Valérien. Pendant la première guerre mondiale ce réseau fut développé et installé en fonction de la position de la ligne de front.

Le système de voie et de matériel tracté reposait sur la modularité et la facilité de mise en œuvre. 

En effet la voie était conçue à base de d’éléments préfabriqués (panneaux), de 5 mètres de long, dotés de traverses métalliques en forme de U renversé qui permettait à la voie, une fois posée, de s’agripper au sol. Le panneau était mis en place par 4 militaires et le rail en lui-même pesait 9,5 kg au mètre. Les traverses étaient percées à chaque bout ; ainsi, lorsqu’elles sont stockées à l’envers, l’eau ne stagne pas et ne les fait pas rouiller. Le système comportait aussi des plaques tournantes, des droites de 1,25 m, de 2,50 m et des courbes de 2,50 m.

Le matériel roulant tracteur était constitué par des locomotives à vapeur de type Péchot qui avaient la particularité d’avoir deux cheminées et une chaudière unique avec deux foyers centraux placés dos à dos ce qui permettait, quelque soit la pente (au maximum 10 cm par mètre) que l’eau soit toujours au dessus du foyer. Dotées de deux bogies dont les 4 essieux sont moteurs elles avaient un empattement très court qui leur permettait de s’inscrire dans des courbes à rayons serrés.

Le matériel tracté avait pour base un « wagon » Péchot que l’on appelle aujourd’hui bogie. Ces bogies à un, deux ou trois essieux pouvaient être reliés par des barres d’accouplement qui pouvaient alors leur conférer une capacité d’emport allant jusqu’à 48 tonnes. Très bien suspendus et dotés d’un centre de gravité très bas ils étaient très stables et pouvaient épouser sans difficultés toutes les irrégularités de la voie.

Le matériel exposé est une plate forme d’artillerie Péchot modèle 1888 entièrement d’origine, seule manque la vis serre freins. Créée à la base pour le transport des obus d’artillerie elle aura servi à effectuer aussi le transport de blessés, de permissionnaires, de panneaux de voie, de ravitaillement. 

Il ne faut pas oublier la contribution de Paul Decauville à cet effort de guerre puisqu’il conçut lui aussi des plates formes et des locomotives à vapeur dont certaines fonctionnent encore dans des associations.

Tout ce matériel fit les beaux jours de l’industrie (carrières, scieries) et l’agriculture (betterave) après la première guerre ainsi que des troupes allemandes qui récupérèrent ce matériel en 1940 principalement dans la ligne Maginot où il était encore en service.

Les traces de ces matériels et de ces réseaux ont subsisté longtemps dans les villes de l’Est de la France où les voies qui reliaient les dépôts de centre ville aux forts perduraient entre les pavés.

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