Baguenaude

La ligne Orléans-Moulin-de-l'Hôpital-Ouzouer-le-Marché
32,430 Km.

Marc André Dubout

La ligne Blois-Saint-Lazare-Ouzouer-le-Marché (41) fut ouverte le 1er novembre 1888 par les Tramways du Loir-et-Cher (TLC). Ouzouer-le-Marché, terminus de la ligne se situe en Loir-et-Cher, en pleine Beauce, complètement isolée des foires et marchés. C'est ainsi que naturellement le prolongement vers Orléans, Préfecture du Loiret, s'est fait sentir. Ce prolongement est concédé aux TLC. Il est construit en accotement des routes et contourne les villages qui n'acceptent pas le passage de la voie ferrée au centre ville.
Alfred Faliès1 administrateur de Carel et Fouché2 au Mans a déjà, depuis 1880, construit un réseau départemental en voie métrique dans la Sarthe et plusieurs lignes en Loir-et-Cher. C'est la Compagnie des Tramways du Loir-et-Cher (TLC), créée par Alfred Faliès qui en sera l'administrateur. La ligne est ouverte au trafic le 5 mars 1895. Le terminus orléanais est installé à Moulin-de-l'Hôpital, boulevard des Princes à l'emplacement des anciennes fortifications. Une prolongement en rebroussement jusqu'à la gare Orléans-P.O. est également réalisé, ainsi qu'un dépôt-atelier TLC, juxtaposant la gare d'Orléans.
Pour le matériel roulant, le groupe Carel et Fouché s'est adressé à Corpet-Louvet3 à la Courneuve, et aux Ateliers du Nord de la France (ANF) à Blanc-Misseron4, les grandes entreprises de construction ferroviaire de l'époque. ANF livre deux locomotives 030, aspect bi-cabine, bien qu'elles n'aient qu'un seul poste de conduite. Elles seront baptisées Orléans et Ingré mais ne suffisant pas au trafic, une autre machine,
Épieds, fut acquise en renfort du parc. Toutes ces locomotives dites "Tramways" furent carrossées avec des couvre-mouvements5 pour éviter d'effrayer les chevaux. Leur poids est de 14,7 tonnes et leur timbre de 12 bars. Leur largeur est de 2,04 m. En 1911 deux autres locomotives un peu différentes rejoignent le parc.
Les voitures et wagons sont construits par l'Entreprise Carel & Fouché au Mans sur le même modèle que ceux de la Sarthe et d'Ille-et-Vilaine où ils sont déjà en service. Châssis en fer, caisse en bois avec des sièges longitudinaux en bois pour les deuxièmes classes et banquettes rembourrées pour les premières. Par la suite, le Département du Loiret a acquerra d'autres types de voitures de 1ère et 2ème classe. Un parc de wagons de marchandises (plat, couvert, tombereau, traverse mobile) complète le matériel roulant qui augmentera selon les besoins ultérieurs. À travers les différentes acquisitions, on a du mal à différencier les matériels TLC et TL.
La ligne aura pour terminus Vendôme et le trajet de 70 Km. sera parcouru en environ 4 heures dont 1h45 pour Ouzouer-le-Marché à partir d'Orléans (32,430 Km).
Pendant la Première Guerre, le charbon se fait rare et l'exploitation se réduit à deux trains dans chaque sens. Par bonheur il n'y eut pas de réquisition de matériel comme dans l'Est.
Rien ne s'améliore avant 1921. Dix ans plus tard le Département du Loir-et-Cher remet la ligne à son voisin du Loiret, l'exploitation n'a pas changé avec deux trains par jour. La gare d'Orléans P.O. est parfois terminus de la ligne en fin de semaine.


Horaires de 1914 des trains d'Orléans à Vendôme (41) de la ligne d'Orléans—Ouzouer-le-Marché.
Il y avait en 1914 trois trains quotidiens dans chaque sens, le matin en milieu de journée et le soir et certains jours quatre. La durée du trajet était de 1h45 entre Orléans et Ouzouer-le-Marché.
En 1927 le Département du Loir-et-Cher rachète les TLC et le nombre de trains se réduit à deux quotidiens. Puis en 1931, la ligne Orléans—Ouzouer-le-Marché est reprise par le Département du Loiret.

La ligne Orléans-Moulin-de-l'Hôpital—Ouzouer-le-Marché au gré des archives et au fil des cartes postales

Carte Michelin n° 64 - édition 1932

Ouverture 5 mars 1895
Fermeture 1er juillet 1931
Origine Loir-et-Cher (500 km. de lignes)
Blois - Oucques - Ouzouer-le-Marché (1886) 48 Km en 2 heures
Embranchement vers Vendôme et contact avec le P.O.
Accotement des RN vers Le Mans et Châteaudun

La ligne Orléans-Moulin-de-l'Hopital-—Ouzouer-le-Marché au gré des archives et au fil des cartes postales


Gare d'Orléans P.O. (1843).

Dessin FACS
Plan du terminus des TELC à Orléans-P.O.


Orléans-P.O. l'usine des Tramways du Loir-et-Cher, rue
Emile Zola, près de la gare où se trouvaient les installations du dépôt (PK ).
Un projet d'électrification de la ligne ne vit jamais le jour. La gare P.O. est à gauche hors de la prise de vue.


Orléans-Gambetta, premier arrêt du tramway. La voie que l'on observe sur la carte postale est celle des tramways urbains d'Orléans (VN).


Place Gambetta, croisement des lignes du tramways urbain et des TLC. On distingue la différence d'écartements entre les deux voies VN et VM.
Au fond, l'église Saint-Paterne.


L'abri de quai pour les voyageurs fut le premier bâtiment construit pour le terminus de la ligne. Noter l'agent qui entretient l'aiguillage.

1917 2015

La gare de Moulin-de-l'Hôpital (1895). Elle semble être une gare terminale mais en fait non, c'est une gare de passage comme le montrera le plan ci-dessous, avec trois directions : vers la gare Saint-Marceau, vers la gare d'Ouzouer-le-Marché (41) et vers le dépôt près de la gare d'Orléans-P.O.
Cette gare sera démolie en 1937. Sur l'image de droite (2015), la voie de la gare d'eau passait sous le pont vers la droite.
La ligne a été construite en voie métrique à cause du réseau du Loir-et-Cher édifié à cet écartement ce qui a permis de réunir plusieurs départements Loiret, Loir-et-Cher, Sarthe Cher, etc.


L'intérieur de la gare du Moulin-de-l'Hôpital pourvue de six voies dont cinq de garage.
À gauche un long train en provenance de la gare P.O., tracté par une 030T locomotive bi-cabine Blanc-Misseron (1887-88), série 5 à 16 des Tramways du Loir-et-Cher (TLC).
Noter la batterie de plaques tournantes qui relient les voies de garage à la principale.

Document FACS
Plan de voie de la gare du Moulin-de-l'Hôpital qui occupe tout un quartier entre la route nationale 135 et le boulevard Jean-Jaurès et entre les deux chaussées du boulevard du Prince.
Une voie traversait la Chaussée Est (boulevard des Princes) pour desservir le dépôt-atelier et la remise des locomotives accessible par des plaques tournantes.
La gare a été achetée par la municipalité en vue de sa démolition mais elle subsista jusqu'en 1967 en tant qu'école (heureux élèves). Elle sera démolie en 1967 conjointement à la construction du pont sur la Loire.


Orléans- Faubourg-Saint-Jean, avec le tramway urbain et à gauche la voie métrique du tacot Orléans-0uzouer-le-Marché.


Orléans- Faubourg-Saint-Jean. À gauche, sur le trottoir, la voie du tramway Orléans-0uzouer-le-Marché.
Vue en direction d'Ouzouer-le-Marché, la voie est sur accotement gauche, vers la province.


Toujours sur le Faubourg-Saint-Jean. idem.


Vue en direction 'Orléans-P.O.


 


 


La ligne quitte Orléans pour atteindre Saint-Jean-de-la-Ruelle. Vue en direction d'Ouzouer sur la RN 157.
La voie est sur l'accotement gauche jusqu'à Ormes. Nous sommes en face du restaurant du " Petit Pont " (sur la Chilesse)


Petit Saint-Jean. La ligne entre dans Saint-Jean-de-la-Ruelle. On distingue le bâtiment-voyageurs au centre de la CP.
Vue vers Ouzouer-le-Marché.

Document FACS
Les haltes et stations étaient disposées de manière uniforme sur l'ensemble du réseau et présentent le minimum d'installation.
La voie principale longeait la route. Une voie d'évitement desservait un quai haut comprenant, le bureau du chef de gare et un abri pour les voyageurs. Une plaque tournante donnait accès à une voie de garage perpendiculaire au quai ou oblique, dans ce cas le chargement en bout des wagons étaient possible.


Saint-Jean-de-la-Ruelle, traversée du village toujours en accotement.


Le Grand Orme.
Noter le cachet de la poste ambulante6.


Villeneuve-d'Ingré, la gare où stationnent quelques wagons de marchandises. Un train vient d'Orléans et se dirige vers Ouzouer-le-Marché.
Sur toute la ligne on retrouve ce type de gare constituée d'une halle des marchandises en bois avec ouverture sur le côté et en pignon un bureau et abri en brique pour les voyageurs.


La gare du Tramway. Un train mixte avec derrière la locomotive A.N.F. quatre wagons plats, un couvert et trois voitures voyageurs. Lorsqu'il y avait des manœuvres pour laisser ou prendre un wagon, on dételait les voitures de voyageurs toujours en queue de train, le mécanicien effectuait la manœuvre, puis on raccrochait les voitures voyageurs et le train repartait. L'avantage, c'est que les voyageurs n'étaient pas secoués par les aller-retour, du convoi, l'inconvénient, c'est que la vitesse commerciale pour les voyageurs était médiocre.


Villeneuve-d'Ingré la traversée du village. Vue en direction d'Orléans.


Villeneuve-d'Ingré, vue en direction d'Ouzouer.


Moulin-Choix. Carte de 1933, inauguration de la ligne de car. Trajet de 1h40 au lieu de 2 heures. Trois A-R quotidiens.
Il y avait une déclivité et les trains en hiver redescendaient en bas de la côte pour reprendre de l'élan ou laissaient des wagons qu'ils revenaient chercher jusqu'à Villeneuve.


Moulin-Choix. Vue en direction d'Orléans.


Ormes, la voie change de côté. L'accotement est maintenant à droite de la route départementale 5 jusqu'à Ouzouer-le-Marché puis Vendôme ou Blois.


Ormes, l'entrée du village.


Ormes. Vue en direction d'Ouzouer.


Ormes.


Ormes. Vue en direction d'Orléans. L'auberge Chambrain. Sur la devanture du commerce il est écrit " Auberge de la Boule Blanche ".


Ormes. Vue en direction d'Orléans.
Noter le cachet de la poste ambulante.


Bucy-Saint-Liphard, l'entrée de la gare.


Bucy-Saint-Liphard, la gare. Un train arrive d'Orléans sur la voie directe, tandis qu'un wagon couvert stationne sur la voie d'évitement.


Coulmier. Pas de carte postale éditée, alors je suis allé prendre une photographie. Le bâtiment a bien vieilli. Au premier plan le bureau et l'abri pour les voyageurs et derrière la halle de marchandises. C'est une des rares gares qui a survécu, sauf en carte postales. Pour les autres, c'est le contraire.
En 1910 le Conseil général propose d'installer des toilettes dans les gares au frais de la Compagnie qui refuse. Le Projet est abandonné.
Il y eut ici un accident de cheval, aveuglé par l'épaisse fumée émise par la locomotive.


Épieds, la gare avec un train qui arrive d'Orléans et se dirige vers Ouzouer-le-Marché. Locomotive Blanc-Misseron des ANF d'un poids de 14,7 tonnes et timbrée à 12 bars.
Les tonneaux attestent la présence de commerce de vin, spiritueux et boissons en tout genre. Le vin était livré en tonneau et c'est le commerçant qui le mettait en bouteille.

Document FACS
Les stations de passage disposaient d'installations plus fournies que les simples haltes. La voie principale longeait la route. Une voie d'évitement desservait le bureau du chef de gare et un abri pour les voyageurs et une halle, pour les marchandises, flanquée d'un quai haut. Une plaque tournante donnait accès à une voie de garage perpendiculaire à ce quai et une deuxième oblique, permettait le chargement en bout des wagons plats et leur garage. En option une deuxième voie d'évitement était construite.


Épieds. Locomotive Blanc-Misseron des ANF. Longueur 5,48 hors tampon largeur 2,04 m. empattement 1,80 m.


Épieds. Un long convoi mixte (voyageurs-marchandises arrive d'Orléans avec en tête une bi-cabine ANF. Wagons Carel et Fouché Longueur 5 m. empattement 1,80 m. pouvant charger 10 tonnes. Certains wagons  ont ceux qui ont participé à la construction de la ligne.


Charsonville. La voie quitte l'accotement de la route D5 pour éviter le centre du village. La gare se trouve soit à l'entré, soit à la sortie du village comme ici à Charsonville.


Ouzouer-le-Marché (Loir-et-Cher). La gare terminale avant le prolongement sur le Département du Loiret, comprenant plusieurs voies de garage, une plaque tournante desservant des voies de débord dont une à quai haut.


Ouzouer-le-Marché. La halle et le bureau du chef de gare sont aussi plus conséquents. Leur construction est en bois. Les voitures voyageurs étaient de construction Carel & Fouché, semblables à celles de la Sarthe et de l'Ille-et-Vilaine. À deux essieux, caisse en bois, banquettes longitudinales en bois ou rembourrées selon la classe, accès par plate-formes d'extrémité,16 places assises.
Largeur 2 m, hauteur 2,90 m.


Ouzouer-le-Marché. Deux wagons plats stationnent sur la voie de débord oblique en attendant d'être manutentionnés, derrière, un tombereau à barre de faîtage est stationné sur la voie perpendiculaire.
Avec trois trains quotidiens dans chaque sens, cette ligne avait une exploitation semblable aux autres Voies Ferrées d'Intérêt Local (VFIL). Les jours de foire, dimanches et jours fériés, un quatrième train était mis en marche.
Noter le cachet de la poste ambulante.


Ouzouer-le-Marché. Gros plan sur la plaque tournante et le quai haut. Le pan coupé du quai permet le chargement en bout sur les wagons plats.
Les voitures et wagons circulaient indifféremment sur le TL et TCL.
Plan des voitures


Ouzouer-le-Marché. Vue générale de la gare.

Carte Michelin n° 64 - édition 1932
Après Ouzouer-le-Marché, la ligne TCL continuait vers Marchenoir où il y avait un important trafic de bois puis vers Oucques, étoile à quatre branches avec pour destination : Châteaudun au Nord, Blois au Sud et Vendôme au Sud-Ouest. Toutes ces terminaisons étaient en correspondance avec des grandes lignes.

 

Notes :   retour

 

  • 1 Alfred Faliès, Centralien, ingénieur civil et administrateur délégué de la Compagnie des tramways de la Sarthe, dessine ces plans de voitures de première et deuxième classe pour le premier réseau des tramways de la Sarthe, entre 1882 et 1888. Il créée la Compagnie des tramways de la Sarthe le 28 juillet 1883. In construit la ligne Orléans—Ouzouer-le-Marché (1895).




    2 Carel et Fouché. Les établissements Carel et Fouché & Cie sont une ancienne entreprise française de construction de matériel roulant ferroviaire, créée en 1904, spécialiste de l'acier inoxydable à partir de 1935.



  • 3 Corpet-Louvet, Société, sise à la Courneuve, qui construisait des locomotives à vapeur essentiellement pour les voies ferrées d'intérêt local des réseaux départementaux. Cette entreprise familiale débute dans la deuxième moitié du XIXème (1876) siècle et se poursuit pendant toute la première moitié du XXème siècle, la fin de la production ferroviaire se situant en 1952. Les productions sont étroitement liée aux chemins de fer secondaires qui ont circulé jadis à travers nos campagne en accotement des routes encore peu fréquentées.
     
  • 4 La société des Ateliers de construction du Nord de la France (ANF) est un constructeur ferroviaire français implanté à Crespin-Blanc-Misseron, près de Valenciennes, à proximité des exploitations minières françaises et belges, sur le réseau ferré reliant Valenciennes à Mons. L'entreprise deviendra Bombardier Transport France.

     
  • 5 Couvre-mouvement. Ce sont des tôles qui cachent le mouvement des bielles de locomotives dans l'objectif de ne pas effrayer les chevaux qui empruntaient les rues, routes et chemins, tout comme les machine à vapeur au début du XIXème S.
     
  • 6 Certaines voitures possédaient tous une boîte aux lettres mobile sur chaque face latérale pour y accueillir les courriers des voyageurs ou du public présent sur le quai. Cet usage s'est retrouvé sur les chemins de fer secondaires, les "Tacots" qui sillonnaient nos campagnes fin XIXème, début XXème siècle. Il n'y avait pas de wagon-poste, mais les fourgons attelés aux voitures possédaient parfois une boîte aux lettres qui transitait sur la ligne. Le cachet du convoyeur avait cette forme caractéristique.

Sources :

  • Trains oubliés 3 P.O. & Midi - Banaudo - Cabri - 1982
  • Les petits trains de jadis - Domengie Ed. Cabri - 1986
  • De gare en gare sur les chemins de fer du Loiret - Surier - Cercle cartophile du Loiret - 2007
  • Deux siècles d'industrie dans le Loiret 1750-1950 - Flonneau -1992
  • Les petits trains du Loiret 1892/1992 - Bouchaud, Duclos, Giraud - AMTP- 1992
  • Chemins de Fer à Traction de Locomotive sur Routes. Choix de la Largeur de Voie -‎ Alfred Faliès - Lemoine Paris - 1878
  • Les premiers chemins de fer dans le Loiret
  • Ouvrages généraux et techniques sur les chemins de fer

Sites :

 

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